N'enterrons pas la Radio Numérique Terrestre trop tôt !

Marianne Fily, Senior Manager chez Colombus Consulting, explique les enjeux du développement en France de la Radio Numérique Terrestre, alors que l'appel à candidature lancé par le CSA se clôt lundi prochain.
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Le sujet de la Radio Numérique Terrestre (RNT) revient sur le devant de la scène avec l?appel à candidatures pour la distribution de services radio lancé par le CSA. Avec cet appel, qui clôture ce lundi 27 février, le CSA ouvre une brèche dans la gratuité de la radio pour l?auditeur. Le futur distributeur de services pourra, s?il le souhaite, mettre en place un modèle économique payant pour l?auditeur. Comme les bouquets de télévision satellite. Qu?on accepte ou qu?on réfute cette évolution, le sujet revient sur la table !

Baroud d'honneur ?

Alors, est-ce le baroud d?honneur de la RNT ? Pas à mon sens, il peut être un déclencheur du projet. Les enseignements de cet appel d?offre seront déterminants pour la suite.
Il est vrai que l?engouement des acteurs est faible, en particulier des grands groupes de radios nationales privées. Pourquoi ? Le coût pour les utilisateurs. Un ménage français moyen possède 6 postes de radio. Or l?apparition de la RNT n?est possible qu?à condition de moderniser et de remplacer l?ensemble du parc de récepteurs dont le prix à l?unité varie entre 70 euros et 250 euros (soit un budget de 420 - 1500 euros). Au vu de ces coûts additionnels pour les auditeurs, le renouvellement des équipements et l?adoption de la RNT peuvent s?avérer longs?

Le financement des infrastructures de réseau de la RNT

Le Bureau de la Radio, qui regroupe les quatre "majors" de la radio a récemment affirmé que "compte tenu du coût du développement de la RNT et des recettes attendues, elle ne voyait pas de moyen de rentabiliser cet investissement" ! Par ailleurs, aucun calendrier d?extinction de l?analogique n?étant prévu, les quatre majors auraient à financer deux diffusions : l?une traditionnelle FM en analogique, et l?autre en numérique. L?Etat, bien qu?intéressé par le lancement d?un projet de RNT, refuse pour l?instant de financer les besoins d?infrastructures requis.Le troisième frein, soulevé par le rapport Kessler en 2011, vient de la concurrence des autres réseaux (IP, satellite, TNT), qui proposent une offre de radio numérique complémentaire à celle de la FM, nécessitant néanmoins des accords entre les éditeurs de programmes et les opérateurs de ces réseaux.

L'exemple britannique


Pourtant, la RNT n?a pas été rejetée par nos voisins européens il y a une dizaine d?années. Au Royaume-Uni la BBC couvre plus de 85% de la population en numérique terrestre avec 230 programmes complémentaires à l?offre FM traditionnelle. Soit 3 fois plus de programmes que l?offre FM ! Cette généralisation a permis une réduction des coûts des récepteurs pour une meilleure accessibilité de l?offre au grand public.La Belgique a décidé en 2011 du lancement effectif du projet RNT.
Des expérimentations sont actuellement en cours en France. Elles rencontrent même un franc succès auprès du grand public, si on se fie à la prolongation de l?expérimentation marseillaise.Car la Radio Numérique Terrestre dispose de vrais points forts...
Une meilleure couverture du territoire de l?offre radio. La généralisation de la RNT permettrait à chacun de recevoir une offre doublée voire triplée sur l?ensemble du territoire, sans compter la possible apparition de « bouquets » de radio, permettant potentiellement aux 1100 stations que compte la France d?émettre sur tout le territoire. Grâce au multiplexage, il devient possible de combiner jusqu?à 15 signaux radio sur une même fréquence (15 programmes), ce qui permettrait le désengorgement d?un réseau aujourd?hui totalement débordé.
Le signal numérique permettra d?offrir des options supplémentaires.De l?interactivité, comme l?ajout de données multimédias, la possibilité de mettre en pause les programmes ou encore d?acheter les titres passant à l?antenne.

Le passage au numérique limitera les interférences inhérentes à l?analogique,ce qui permettra d?offrir un service de meilleure qualité aux auditeurs. Mais pour que la RNT puisse avoir une chance de voir le jour dans des conditions satisfaisantes pour les auditeurs et les acteurs, les freins pesant sur ce projet doivent être rapidement levés.

Changer de norme

A commencer par le changement de norme pour passer au DAB+. La France est en effet le seul pays européen à avoir choisi la norme T-DMB, imposant aux constructeurs de récepteurs d?y intégrer plusieurs normes. Si aujourd?hui, il existe de nombreux modèles DAB+ à bas prix, les modèles multi-normés sont beaucoup plus rares et à des tarifs considérablement plus élevés?Et il n?est pas prouvé que les coûts de diffusion en T-DMB soient moins élevés qu?en DAB+.

Une réflexion des pouvoirs publics sur un éventuel calendrier d?extinction de l?analogique permettrait aux différents groupes de radio de repenser leurs investissements, et de se positionner positivement sur la RNT.
La prise en main par un porteur de projet finançant les infrastructures. Reste à espérer qu?il se dévoile le 27 février prochain ! Onde Numérique et Médiamobilese sont positionnés sur le dossier.
Au-delà de la réponse à l'appel d'offres, ce qui va vraiment déterminer la suite (ou la fin) de l'aventure, ce sont bien entendu les décisions des pouvoirs publics et l?impulsion du CSA pour embarquer tous les acteurs de la radio dans le projet. Tout repose sur eux. Nous verrons s?ils dessinent à la RNT un avenir plus rose que celui de la Télévision Mobile Personnelle !
 

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Commentaires 16
à écrit le 11/05/2012 à 13:30
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Faux, les différentes normes offrent des possibilités de niveaux de HiFi bien supérieurs aux capacités de la FM actuelle. De plus, comme la TNT, la RNT permettra de couvrir tous les territoires, et avec beaucoup plus de chaines radio. Je ne reçois pa...

à écrit le 06/04/2012 à 21:37
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Et la qualité de cette radio serait insuffisante pour passer France Musique et Radio Classique déjà affectées par des compressions destructrices du message musical ? Mais de qui se moque-t'on ? Vous ne le dites pas ceci, alors serait-ce de la publici...

à écrit le 24/02/2012 à 8:33
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si la radio numérique est aussi merdique que la télévision TNT qu'on nous a imposée arrétons tout de suite ce projet . Autant la télé marchait bien avant que maintenant cela est une vraie galère pour suivre un programme .

à écrit le 24/02/2012 à 3:44
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Pourquoi persister a nous inonder de canaux unidirectionnels dignes du ministère de la propagande, et être sourd à la voie de retour ? Est-il encore pertinent aujourd'hui de vouloir consommer du spectre hertzien pour pousser de l'information unidirec...

le 24/02/2012 à 11:44
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Pas d'accord, le "bidirectionnel" est un gachis énorme de bande passante : si tout le monde passait à la radio sous IP le réseau serait complètement saturé ! De plus, l'unidirectionnel a 2 avantages essentiels par rapport à internet : - la gratuité...

à écrit le 23/02/2012 à 8:43
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Ca reste une histoire de coût ! ... vue la crise c'est pas gagné

à écrit le 23/02/2012 à 7:14
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"aucun calendrier d?extinction de l?analogique n?étant prévu, les quatre majors auraient à financer deux diffusions" J'avais entendu dire que la RNT devait remplacer (sans doute pour forcer la main) les émissions analogiques, mais pas s'y ajouter (po...

à écrit le 22/02/2012 à 19:08
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La France a 15 ans de retard dans la radio numérique, tous les pays frontaliers disposent depuis des decennies d'un réseau de radio numérique, notamment le DAB et DAB+, en Belgique, Suisse, Espagne, Italie, UK et surtout en Allemagne ou plus de 80% d...

le 23/02/2012 à 0:59
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Heuh ! ça fait... plusieurs baux que la réception sat diffuse de la radio en France ! On peut même y recevoir maintenant des flux 5.1... allemands généralement; ce qui semble indiquer qu'ils ne sont pas "tout RNT".

le 29/02/2012 à 15:48
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Renseignez-vous avant de parler, la diffusion satellitaire sur des postes de radio n'existe pas en europe, aujourd'hui il faut une antenne satellite de 60cm pour recevoir la radio via DVB-S. Je parle de diffusion satellite sur des postes de radio, de...

à écrit le 22/02/2012 à 18:03
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"A commencer par le changement de norme pour passer au DAB+" Tout le monde sait que le choix du T-DMB fait par les pouvoirs publics est une connerie sans nom et qui a lui seul explique l'échec de la RNT en France. Un récepteur T-DMB de base (style ...

le 23/02/2012 à 7:49
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Complètement d'accord avec vous, Foxy: le choix de cette norme complètement délirante a été "fomenté" notamment par certains grands réseau de radio nationale, comme on glisserait une peau de banane sous les pieds d'un concurrent. Incompréhensible que...

le 07/03/2012 à 23:48
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De plus la norme DMB est bien plus sensible aux perturbations et passe moins bien lors d'une réception difficile (meme constat que la TNT). Je possède un récepteur numérique et j'ai pu comparer les 2 normes, le DAB + est bien plus résistant et suppor...

à écrit le 22/02/2012 à 17:17
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Quand on regarde le dossier de la Radio Numérique Terrestre en France, on est frappé par la confusion qui règne depuis des années dans sa gestion technique et politique . En remontant dans nos souvenirs , à la fin du dernier siècle, on se rappelle le...

le 23/02/2012 à 0:54
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Dommage qu'il faille aller aux commentaires comme le votre (remarquable) pour trouver un avis SENSE sur le problème ! PS et il suffit de lire quelques blogs anglais pour confirmer que la RNT n'apporte RIEN au consommateur; juste une peu plus de... da...

le 02/03/2012 à 14:44
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Il existe déja en france un réseau numérique hertzien capable de diffuser la radio numérique, qui couvre toute les france et qui dispose de fréquences disponibles. Mieux: tous les français sont équipés d'un récepteur tout à fait capable de recevoir c...

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