Cette TV qui nous gouverne, ou le triomphe du media du siècle précédent

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Entre progression des audiences et formatage de la campagne, la télévision
s'est imposée sans contestation possible comme LE média de la première
partie de la campagne présidentielle.
Au moment où Facebook dépense 1 milliard de dollars pour une start-up sans
chiffre d'affaires, exit le web 1.0 et même 2.0. Une narration essentiellement
télévisuelle vampirise les stratégies des candidats. Temps forts, expressions
et paroles choisies, ... sont presqu'exclusivement délivrées via les écrans de la
télévision.

Formatage des journées des candidats
La TV formate même les journées des candidats côté chaînes d'information
continues qui, par tranches de rotation des équipes rédactionnelles, rythment
les séquences des journées. Tout cela en direct. Visites, débats, meetings,
réunions de travail et d'écoute, prises de paroles ... une déambulation
territoriale plus qu'une conversation citoyenne, mise en scène comme une
série en continu qui se prolonge par son propre commentaire sur les plateaux
du soir et du matin. Le tempo de visibilité des campagnes, la conversation des
candidats sont calés sur et par les grilles de ces chaines qui sont les nouvelles
arrivantes sur l'espace médiatique présidentiel.

L'arme absolue pour meubler les 18 heures de direct
Elles sont avec les journaux télévisés du soir et en particulier les 20 heures de
TF1 et de France2, les grands vainqueurs médiatiques de ce premier tour. La
présidentielle est l'arme absolue pour meubler les 18 heures de direct. Les
meetings proposés en live doublent l'audience des chaînes et les candidats
savent qu'ils ne parlent plus seulement aux gens présents dans la salle mais
aux téléspectateurs soient par exemple, pour BFM TV, près de 2 millions de
téléspectateurs. Réalité augmentée !
Il n'y a même plus de cobranding avec les traditionnelles stars du web. Pas
plus Daily Motion que YouTube et même Google ou Facebook. Pas de sccop
ou de performance journalistique événementielle des pure players, de
l'information horizontale. Le 2.0 se résume quasiment à une entrée
fracassante de Twitter et une réalité du maintien de la différence entre off et
online. La télévision a certes réussi à enrichir son offre. Elle a intégré des
éléments du Rich Media. Graphes, twits en direct, ... comme une forme de
préintéractivité, une verticalisation par les médias tv d'actes culturels du web
notamment du fact checking ou du datajournalism. C'est une victoire surprise
et sans débat !

Dominer la convergence
Comme si après une série d'événements internationaux qui ont nourri les
antennes tout au long de l'année 2011, révolutions arabes, tsunami au japon,
affaire DSK, mort de Ben Laden, les marques télévisuelles avaient profité de
ce moment politique événement pour tenter de reprendre une position
dominante sur la future convergence et l'ensemble des nombreux écrans à
notre disposition, à travers tous les outils de diffusion et de rediffusion
disponibles notamment sur le web. Comme si le mouvement de la campagne
se transformait en un contenu à la fois continu et spectacle mais seulement
télévisuel.

La télévision a gagné la bataille des écrans
Il semble que toutes nos prévisions d'équilibre dominant du web et en
particulier du 2.0 se soit évaporées. La Radio du matin résiste comme la
Presse écrite qui a déjà malheureusement perdu 2 quotidiens nationaux avant
le début de la campagne.
La télévision a gagné la bataille des écrans. Elle multiplie les fenêtres et
profite de leur explosion. TV classique, tablettes et autres smartphones
s'offrent aux images télévisuelles, à leurs rediffusions ou aux podcasting
internet de ce contenu télé.
Au delà c'est une forme qui appuie encore un peu plus sur la personnalisation,
l'hyper individualisation de la campagne. Une forme qui privilégie aussi la
narration. Peut-être aussi encore plus le spin. On a le sentiment de cortèges
qui suivent des candidats, icones bien seules dans ce mouvement répétitif et
quotidien.
Nous sommes mardi soir et le grand journal de Canal + reçoit parmi d'autres
invités, le candidat sortant à l'élection présidentielle, le Président Nicolas
Sarkozy. Tout cela se termine par ce que certains décriront comme un vrai
moment de télévision, un compte à rebours type « Qui veut gagner des
millions » avec baisse de l'intensité lumineuse du plateau, et battements
sonores sensés dramatiser le moment de vérité. Comme une sorte de Money
Time télévisuel pour compétiteur politique perdu dans un PAF dominant la
fabrication de l'élection.

* Conseil en communication d'influence
Professeur associé en à l'Université Paris 1 La Sorbonne
Membre de la SEAP Society of European Affairs Professionals
 

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Commentaires 4
à écrit le 14/04/2012 à 12:24
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Tout cela est hélas vrai. Les chaines de télévision n'informent plus, elles déforment, voire, elles inventent purement et simplement une réalité qui les arrange publicitairement. Cela est aujourd'hui ressenti par les spectateurs, qui n'aiment pas cel...

le 15/04/2012 à 9:51
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Phidias nous partageons le fond mais je vous trouve un peu sévère notamment avec les séniors qui deviennent chaque jour de plus en plus les "clients" du web classique et social. Et pour les pratiques je crois que les dimensions vérification par compa...

le 17/04/2012 à 13:48
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Merci pour cet article et ce commentaire qui donnent à réfléchir, enfin un peu de fond! Salutations

le 18/04/2012 à 2:03
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Opinion, merci pour ce commentaire fort sympathique. A bientôt !

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