Demain, la France sera-t-elle "Gangnam style" ?

Le succès planétaire de l'artiste Psy prouve que le Corée accède enfin à un niveau de notoriété digne de son statut de puissance émergente. C'est peut-être une chance pour la France car les deux pays sont incroyablement complémentaires et ont beaucoup à apprendre l'un de l'autre. Une tribune de François Assémat, directeur du Master Marchés Financiers (Groupe INSEEC).
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"Hey Sexy Lady, Oppa Gangnam Style!" Qu'il vous ait agacé que vous ayez dansé dessus, ce refrain de l'été ne vous a sans doute pas laissé indifférent. Visionné un milliard de fois sur YouTube, le clip de l'artiste Psy révèle bien plus du soft power coréen que n'indique à première vue un contenu parfaitement calibré pour un large public. La vidéo est d'abord un petit bijou de réalisation: débutant par un hommage à Michael Jackson, elle sait flatter avec légèreté et brio l'ego du public américain, ce qui a pu contribuer à son succès foudroyant. Le reste est de la Pop acidulée à la chorégraphie millimétrée, mais n'en déplaise, il ne s'agit pas de K-Pop. La personnalisation du style et l'humour décalé se démarquent d'une K-Pop aseptisée et trop formatée.

Maîtrise de la communication planétaire via Internet et les réseaux sociaux

L'ensemble forme un tout cohérent qui assimile tous les codes de la culture de masse internationale et démontre une maîtrise de la communication planétaire via Internet et les réseaux sociaux. Car la Corée accède enfin via son « industrie culturelle » - avec Dramas et K-Pop comme étendards -, à un niveau de notoriété digne de son statut de puissance émergente. Longtemps cantonnée aux seconds rôles dans l'ombre de puissants voisins (Chine, Japon), elle a aussi subi leur domination et leur occupation. Ce pays neuf, qui s'est progressivement ouvert depuis 1953, s'est forgé dans l'adversité une identité « en creux » et a développé un syndrome de l'abandon favorisant sa cohésion nationale, mais faisant naître aussi une soif inextinguible de reconnaissance.

Cette reconnaissance, la Corée l'a souvent cherchée du coté de la France: de Park Geun-hye, la nouvelle Présidente de la République, qui a étudié à Paris, à Ban Ki-moon - qui parle français - toute une génération a cherché dans la France des repères culturels. La vague cinématographique coréenne (Hong Sang-soo, Kim Ki-duk, Bong Joon-ho) se réclame d'Aragon, de Marcel Duchamp, de Marguerite Duras, de Robert Bresson ou de Jean-Marc Rochette (Le Transperceneige). Or, ce qui frappe les observateurs de la Corée, c'est à quel point le pays regarde la France et à quel point la France l'ignore, multipliant même les petites vexations: de la reprise en main de l'enquête des « bébés congelés » par les autorités françaises, aux attentes déçues qu'a suscitée la nomination de Fleur Pellerin au ministère de l'économie numérique, la France n'a rien fait pour valoriser un pays qui lui a souvent témoigné de l'intérêt.
C'est aussi la thèse que soutient Hye-ri Ham, une journaliste coréenne qui a longtemps vécu en France (La France n'est pas la France, 2009).

La Corée, un empire de l'empirisme qui devrait inspirer la France

Pourtant, les deux pays ont beaucoup à apprendre l'un de l'autre car ils sont incroyablement complémentaires: là où la France excelle dans le formalisme théorique, en témoigne ses Médailles Fields et ses Grandes Écoles, la Corée est un empire de l'empirisme, résiliente - au sens premier du terme - et pragmatique. Longtemps taxée de « copiste du monde », elle a su monter en gamme pour proposer des solutions technologiques innovantes qui font aujourd'hui sa réputation.
A une France sans doute trop centrée sur elle-même, le pays du matin calme oppose un tropisme centrifuge: grand exportateur, elle est aussi l'un des pays qui envoie le plus d'étudiants à l'étranger.
Là où la France excelle à entretenir son patrimoine, la Corée n'a su ou n'a pu conserver les témoignages du passé: si vous cherchez un charmant petit village en Corée... vous n'en trouverez pas. Ou plutôt si, entièrement reconstruit au pied de barres d'immeubles en banlieue de Séoul !

La France a une chance à saisir: reconnaître comme un égal une Corée désormais émancipée et tournée vers l'avenir, longtemps éconduite mais qui n'est pas rancunière. Les deux pays ont des atouts complémentaires et une véritable synergie pourrait naître d'un rapprochement mutuel.

 

 par François Assémat, directeur du Master Marchés Financiers (Groupe INSEEC)

 

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Commentaires 13
à écrit le 27/12/2012 à 8:04
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J'écoute Gangnam Style dans ma Kia Cee'd SW tous les matins. ET JE M'ECLATE COMME UN OUF !

à écrit le 27/12/2012 à 7:31
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Bien bel exemple d'arrogance franco francaise. Les Coreens n'envient pas la France, pas plus que les Chinois ou les Japonais. Ils ne la desirent plus mais sont plutot consternes et maintneant amuses de constater a quel point un pays aussi sur de lui ...

le 27/12/2012 à 10:12
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Je vis en Coree, je connais ce pays depuis 20 ans, la France y est tres respectee pour sa culture (litterature, cinema, mode de vie) comme pour sa technologie, et les affinites culturelles sont patentes, n'en deplaisent a ceux qui parlent sans savoir...

à écrit le 26/12/2012 à 23:20
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La Coree est dynamique, creative et pas pleurnicharde, ils se donnent les moyens nous, nous sabordons... si je devais parier sur une reussite cela ne serait pas sur la France

le 27/12/2012 à 7:31
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Tout a fait

le 27/12/2012 à 20:23
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le problème des Français, est qu' ils vivent toujours sur la grandeur de leur passé. Certes, c' est un magnifique pays, certes , leur gastronomie est reconnue dans le monde entier, mais...quelle arrogance! En Corée, les gens sont amicaux, ils s' ...

à écrit le 26/12/2012 à 19:03
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Article troublant. Un mélange de culture et d'ignorance totale. Là où vous êtes inspiré, c'est quand vous tentez d'ancrer le phénomène K-pop dans l'histoire récente du pays. Peu de journalistes se sont donné cette peine, comme on s'en aperçoit bien v...

le 26/12/2012 à 23:25
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"Certes le tourisme s'est développé ces 15 dernières années seulement, depuis que le pays est sorti de la pauvreté", Je suis alle la premiere fois en Coree en 1990 (22 ans) pour installer une usine siderurgique alors que la France deturisait les sien...

le 27/12/2012 à 10:10
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on a transformé le web en une gigantesque latrine.Tout le monde se prends le droit de y aller pisser et autre.Alors de quoi s'emerveiller?Ce nouveau messie de Seoul c'est une expression de notre misère culturelle.Attendez mars avril et personne parl...

le 27/12/2012 à 10:17
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Je suis d'accord avec Elodie et moi je vis en Coree depuis 20 ans. Il reste un patrimoine culturel a qui sait se donner la peine de le decouvrir> C'est vous le plombier qui racontez des sottises et vous n'avez pas du beaucoup circuler en Coree.

à écrit le 26/12/2012 à 17:21
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Du jour où j'ai commencé à voir des films et séries sud coréennes, j'en suis presque tombé fasciné par ce pays, tout semble naturellement clair, fluide, et des personnages toujours sensibles et attachants.

à écrit le 26/12/2012 à 14:15
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De bons arguments. Les Coréens du Sud ont fait de leur pays un grand pays, ce sont de bons compétiteurs internationaux et ils maitrisent les technologies modernes. Je vote pour.

le 29/12/2012 à 21:44
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Ce qui est réellement troublant, c?est l?agressivité de certaines réactions face à une thèse (les coréens sont comme des amoureux déçus envers la France) qui est d?abord d?origine coréenne, comme le dit l?article à propos de l?ouvrage « La France n?e...

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