Les chambres d'hôtes, un bouc-émissaire trop facile pour expliquer les difficultés de l'hôtellerie indépendante

Par Laurent Guéna, journaliste au Quotidien du Tourisme  |   |  651  mots
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Les chambres d'hôtes, qui travaillent souvent dans l'illégalité, sont la cible des hôteliers indépendants qui souffrent d'un taux d'occupation en baisse. Sont-elles la cause de tous leurs malheurs ? Certainement pas.

 L'Union des métiers de l'industrie et de l'hôtellerie (Umih) semble avoir trouvé la principale cause, en dehors de la crise, de la désaffection d'une partie de sa clientèle. L'ennemi est identifié, il s'agit des chambres d'hôtes qui accueillent des clients en toute illégalité. De fait, les propriétaires - des particuliers - deviennent hôteliers sans en assumer les devoirs. Roland Héguy, président de l'Umih, lors d'une conférence de presse début mai, a fait simple : "Une chambre d'hôte, c'est cinq chambres, quinze clients maximum, l'obligation de les héberger dans la résidence principale et de leur faire partager le repas sans pouvoir leur proposer le menu". 50 assignations, dans dix départements, ont été envoyées aux chambres de commerces. Dans la foulée de la conférence de presse, les représentants de l'Umih ont rencontré Sylvia Pinel, ministre du tourisme. Elle a promis des contrôles mais a quand même tenu à dire "qu'il ne faut pas stigmatiser un type d'hébergement plébiscité par nombre de vacanciers". 

220 établissements ont fermé en 2012

Il est vrai que la situation de l'hôtellerie indépendante est inquiétante : selon l'Umih, 220 établissements ont mis la clef sous la porte en 2012. Ont-ils tous été victimes de la prolifération des hébergements illégaux qui seraient plusieurs dizaines de milliers répartis dans toute la France ? Evidemment, non. Selon la dernière étude de la direction générale de la compétitivité de l'industrie et des services (DGCIS), les hôtels classés, selon les critères entrés en vigueur depuis juillet 2012, ont dans l?ensemble mieux résisté à la baisse de fréquentation sur la période décembre 2012 - janvier 2013. Ils affichent ainsi un recul de - 1,1 % de nuitées, contre - 3,5 % pour les hôtels non classés. Pour obtenir ce classement ou le conserver les hôteliers doivent faire un effort conséquent. Par exemple, pour obtenir trois étoiles, l'hôtel doit avoir des chambres "pour deux personnes de plus de 13,5 m2, un accès Internet dans les parties communes, téléphone dans les chambres et l'existence d'un espace "salon". On ne peut qu'être d'accord avec Georges Panayotis, président de MKG Group, cabinet spécialisé dans l'hôtellerie, quand il affirme que "le glissement de clientèle vers des établissements qui ont fait un effort de modernisation et d?équipement est réel.

Restructuration

Ce n?est qu?une étape vers une restructuration du marché hôtelier, qui doit être poursuivie par le développement de nouveaux concepts, originaux et mieux adaptés aux attentes de la clientèle". Comme il est écrit sur le site d'Atout France, l'organisme qui s'occupe de la gestion du classement, "le classement par étoiles apporte une garantie officielle de qualité de service et de confort aux clientèles françaises et internationales dont les exigences sont de plus en plus élevées." S'il est insupportable de se faire concurrencer par des hébergements qui ont les mêmes droits sans les mêmes devoirs, le syndicat devra quand même renverser la question : pourquoi certains clients les ont quittés au profit de chambre d'hôtes ? La crise a poussé les consommateurs à chercher sur des sites collaboratifs, comme Abritel ou Airbnb, des logements chez l'habitant, plutôt bon marché et on s'habitue assez facilement au confort. L'hôtellerie indépendante va devoir agir vite pour gagner en qualité tout en conservant des tarifs compétitifs : selon une étude Opinionway / Voyagermoinscher.com, "47%de ceux qui prévoient de partir en vacances cet été comptent "faire des sacrifices" pour réduire leur budget. Une proportion croissante prévoit d'être hébergée gratuitement chez des amis ou de la famille (17% contre 15% l'an dernier) ou de baisser le standing et le coût de l'hébergement (14% contre 16% l'an dernier).