Sarko déploie sa marque à l'international

Par Jean-Christophe Gallien*  |   |  721  mots
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Pendant que l'UMP se déchire, à nouveau,  pendant que Jean Marc Ayrault et la ministre de la famille tentent de justifier une attaque en règle de la politique en faveur de ladite famille, que fait Nicolas Sarkozy ?

Leadership storytelling

Il poursuit, méthodiquement, la mise en scène de sa nouvelle série, innovante et troublante dans le paysage économique et politique français. Un leadership storytelling comme disent nos amis anglo-saxons, quasi inédit chez nous, mis à part, peut-être, celui beaucoup plus discret mais bien réel de Valéry Giscard d'Estaing après sa propre défaite de 1981.
Après entre autres New York, Doha, Moscou, Montréal et Tel Aviv ... il est à Londres, pour donner une conférence à 100 000 dollars. Nicolas Sarkozy devient un speaker super côté sur le marché international. Une conférence sur l'Europe, sa situation et son futur, pour un parterre trié sur le volet par la sympathique banque Goldman Sachs. L'une de celles que Président en exercice, Nicolas Sarkozy, déjà en mode internationalisation de la marque Sarko, désignait comme responsables des dérives de la finance mondiale et de la crise qui nous plombe encore et en particulier l'Europe dont il va évoquer l'avenir. Une banque qu'il prétendait aussi, comme du reste le réélu Barack Obama qui embaucha pourtant nombreux de ses ex collaborateurs, mettre au pas dans un célèbre discours toulonnais qui fit date en son temps. « Une certaine idée de la mondialisation s'achève avec la fin d'un capitalisme financier qui avait imposé sa logique à toute l'économie et avait contribué à la pervertir. L'idée de la toute-puissance du marché qui ne devait être contrarié par aucune règle, par aucune intervention politique, était une idée folle ». Arnaud Montebourg et d'autres ont pu s'étonner de cet attelage du jour au c?ur de l'une des places même de l'exercice de la dérégulation financière.

La marque Sarkozy en déploiement global

Nicolas sarkozy mixe comme d'autres leaders anglo-saxons, conférences payantes portées par des partenaires puissants, BTG Pactual, Alfa Bank, Goldman Sachs donc, pour parties prenantes et autres influenceurs de haut niveau et plateforme de conversation orientée business diplomacy. Un mélange qui colle efficacement à ses déclarations d'avant et d'après campagne présidentielle : j'irai gagner de l'argent.
Il ajoute une touche plus française qui complète la démarche et lui donne des allures de visite officielle. Chaque épisode ou presque de cette série comporte une scène politique et diplomatique. Vladimir Poutine, Benjamin Netanyahu, David Cameron, ... rencontres en tête à tête, photos, déclarations, vidéos, ... au delà de Sarko le business diplomate, la marque Sarkozy poursuit donc son voyage politique et diplomatique comme si 2012 n'avait été qu'une parenthèse. Un "brand content" qui se déploie en rythme, qui ne doit rien au hasard ou à l'improvisation et qui veut nourrir la conversation du leader avec de nombreuses parties prenantes.
Elle semble très goûtée par les puissants de la mondialisation, banquiers, PDG, médias et politiques ... Une question demeure sur sa performance et son audience auprès des citoyens du Monde qui vivent autrement les performances de ladite mondialisation.

Le retour vers le peuple ?
Des citoyens qui pour la plupart n'avaient pu assister au discours de Nicolas Sarkozy alors Président de la République en exercice, en janvier 2010 au Forum de Davos, devant la aussi une assemblée de puissants, il terminait pourtant par quelques mots qui
« Oui, dans le monde de demain il faudra de nouveau compter avec les citoyens, avec l'exigence de morale, l'exigence de responsabilité, l'exigence de dignité des citoyens. Il faut regarder cela non comme un problème de plus mais comme une partie de la solution, non comme une difficulté supplémentaire mais comme quelque chose de sain, de vertueux qui, peut-être, nous conduira à nous sentir plus heureux de ce que nous sommes, plus heureux de ce que nous accomplissons. » C'était il y a à peine 3 ans et ce sera le prochain défi de la marque Sarkozy : se redéployer cette fois vers le peuple.

*Professeur associé à l'Université de Paris 1 la Sorbonne
Président de j c g a
Membre de la SEAP, Society of European Affairs Professionals