Fillon, Sarkozy : guerilla des egos ou recomposition ?

Nicolas Sarkozy et François Fillon partagent une même posture narrative, peut-être même une certitude. Ils sont victimes ! Et ne maîtrisent en aucun cas leur agenda, ce qui n'est pas le meilleur moyen de la conquête... Par Jean Christophe Gallien, Professeur associé à l'Université de Paris 1 la Sorbonne
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Une guerrilla durable s?est installée à l?UMP. Pardonnez moi cet oxymore qui révèle l?incroyable absurdité d?un feuilleton qui semble ritualiser les affrontements en son sein sous des regards tour à tour effarés, effondrés, gourmands ou voraces selon sa relation avec ce parti politique.

Pourtant, les pertes électorales en séries du mandat de Nicolas Sarkozy s?étaient soldées par une ultime défaite présidentielle qui portait dans son score surprise, le sauvetage de l?essentiel. En résistant à la curée annoncée, l?UMP n?avait pas explosé au soir de ce second tour. Echec notamment de la stratégie du pire de Marine Le Pen qui visait à faire exploser la candidature de Nicolas Sarkozy au second tour de l?élection présidentielle avant de tenter de faire de même avec l?UMP à travers des triangulaires assassines.

Sarkozy,  un recours potentiel
Ce score permettait aussi au perdant, Nicolas Sarkozy, de demeurer le leader des droites. Un recours potentiel, au moins imaginaire, au grand dam de ceux qui voulaient, même dans son propre camp, en finir avec lui. Mieux, il pouvait même passer, après une période d?éloignement géographique et médiatique, à l?étape du bilan qui préfigurait le lavage des scories négatives de son quinquennat. Puis aurait pu s?engager la séquence de l?attaque proprement dite et le retour plein champ dans l?arène politique. C?était sans compter les autres acteurs et leurs propres ambitions, agendas et bilans. Amis ou ennemis, défaite ou victoire, quel que soit le bord, pour une grande majorité, la page devait être tournée.

Sauter à pieds jonrs dans la galère turbulente et instable de l'UMP
Nous l?écrivions déjà en décembre : il est trop tôt Nicolas ! Mais Nicolas a réagi à la décision du Conseil Constitutionnel et il est sorti de l?ombre bienveillante qui protège les candidats battus mais demeurés légitimes grâce à un score inespéré. Il a sauté, ce lundi, à pieds joints dans cette galère turbulente et instable qu?est devenue l?UMP. Et François Fillon a lui aussi réagi. Hier soir, à la Grand-Motte, et il s?est définitivement affranchi.

Voici donc qu?à l?UMP et en son palais mortifère, gardé par des intérimaires qui s?épient et se contrôlent tout en ambitionnant pour beaucoup de récupérer une mise incertaine, va se dérouler une nouvelle saison de l?absurde série du combat des egos. Comme un prologue houleux et surtout presque déjà fatal au terrible programme des futures primaires. La fracture semble ouverte entre deux versions dans un mouvement tiraillé entre deux  légitimités, pourtant on retrouve, dans un étonnant paradoxe, des similitudes stratégiques et tactiques qui ne portent pas non plus en elles, les promesses de succès futurs.

Une même posture narrative, celle de la victime
Nicolas Sarkozy et François Fillon partagent une même posture narrative, peut-être même une certitude. Ils sont victimes ! Nicolas Sarkozy fut victime de la crise, il est désormais la victime de l?acharnement des juges, du PS, de François Hollande, ? François Fillon est lui, il semble même qu?il l?était déjà à Matignon, la victime de Nicolas Sarkozy, de ses prétentions au retour, de son système, de ses dépenses? Etrange parallélisme narratif qui modèle un affrontement en creux, sans les noms, sans ring, à distance et surtout en réaction.

Et voilà une seconde proximité, nous l?évoquions plus haut, ils réagissent. C?est souvent le cas des victimes, c?est donc en ligne avec leurs scénarios respectifs. Loin du maître narrateur de la campagne de 2007, Nicolas Sarkozy réagit aux décisions des juges, François Fillon qui fait ses premiers pas de candidat à la magistrature suprême réagit au retour réactif du jamais partis Nicolas Sarkozy. Dans les deux cas, apparaît au grand jour une absence de maîtrise de l?agenda. Pour organiser la conquête, pour tenter de gagner, Nicolas Sarkozy le sait, il faut tenter de gérer le momentum, le rythme, la forme et le contenu de l?agenda préélectoral ou à tout le moins le sien.

Une question demeure pour l?été avant les universités de rentrée : sommes nous face à une pagaille et des désordres conjoncturels ou face aux étapes d?une recomposition structurelle en cours des droites et du centre ?

 

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Commentaires 4
à écrit le 13/07/2013 à 16:47
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Si une guérilla oppose Sarkozy et Fillon, cela se transformera en un véritable échec pour l'UMP, déjà dans une situation similaire au PS quand Jospin s'en est allé. Ça leur a coûté la place aux élections présidentiels. Si Fillon et Sarkozy font durer...

à écrit le 13/07/2013 à 14:35
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Il n'existe plus que quelques nuances de la droite du PS à la gauche de l'UMP : pensée libérale, européïste avec une dimension sociale. Le vrai "rift" traverse chacun de ces deux partis politiques : à la vraie droite comme à la vraie gauche, on sait ...

à écrit le 12/07/2013 à 22:56
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Je fais tardivement le lien avec un précédent article de l'auteur qui annonçait par avance une réaction de Fillon. En effet, derrière les postures des ténors de l'opposition se cache des intrigues et des enjeux qui dépassent vraisemblablement les amb...

à écrit le 12/07/2013 à 18:09
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Il faut en finir avec ce sarkosysme et ces égos qui pourrissent toute la Droite....Y en a marre maintenant, ça suffit !!

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