Alléger la dette des collectivités locales, c’est alléger la fiscalité !

Les "emprunts toxiques" des collectivités locales pèsent sur les tissus économiques régionaux. Pour Bernard Cohen-Hadad, président de la commission financement de la CGPME, et Gérard-Philippe Ranson, conseiller en gestion financière, c'est une véritable urgence nationale.
Bernard Cohen-Hadad. DR

Depuis l'annonce de la cessation de paiement de la ville de Détroit, et à quelques mois des élections municipales, les déclarations s'enchaînent, pour nous rassurer, sur la nécessité de restructurer la dette des collectivités locales. En France, les collectivités locales sont largement endettées mais nous ne risquons rien car le dossier est géré par des… spécialistes. Mais, dans la réalité, qui s'y attelle vraiment ?

Le tissu économique local touché par les emprunts

Sur la base de conseils financiers autorisés, les collectivités locales ont voulu profiter de taux d'intérêt bonifiés en souscrivant aux mécanismes de marché sophistiqués proposés par les banques entre 2004 et 2008. Ces mécanismes entraînent aujourd'hui, en raison des effets de la crise financière des niveaux de taux d'intérêt très élevés, insupportables pour ces budgets publics.

Ce que l'on sait moins c'est que le tissu économique local est aussi durement touché et privé de ressources pourtant nécessaires à son développement, voire à sa survie. Les TPE comme les PME dans les régions voient leur croissance amputée que ce soit au niveau des acheteurs de leurs produits et services (contribuables personnes physiques) ou au niveau de leur capacité d'autofinancement (charge fiscale supplémentaire grevant leurs budgets). Et compte-tenu du niveau de la dette publique, il est difficile d'inverser la tendance.

Les surcoûts seront payés par les contribuables

Faut-il blâmer les élus locaux ? Naturellement non. Les collectivités locales, non familières des risques inhérents à ces produits financiers, ont fait confiance. Puis elles se sont retournées vers leurs banquiers prêteurs pour, dans un premier temps, « réaménager » la charge financière et tenter de la rendre supportable.

Ensuite, elles ont recherché un accord de partage des surcoûts importants. Ils se chiffrent en milliards d'euros. Ces ouvertures n'ont pas vraiment abouti et ont donné naissance à des contentieux qui traînent et sur lesquels planent un silence honteux et beaucoup d'incertitudes.

En revanche, une chose est sûre: les surcoûts seront payés soit par le contribuable au niveau local ou national, et par toutes les entreprises. Il devient donc urgent de gérer ces risques qui, jusqu'à présent, ont été essentiellement subis faute de moyens humains et techniques suffisants.

Une surcharge de 1,5 milliards d'euros pour Dexia

La Cour des Comptes s'est déjà exprimé sur le cas de la banque Dexia et revient aujourd'hui, avec sévérité, sur la gestion des collectivités locales. Chacun sait que Dexia a dû être soutenue par les Etats français et belges. Pour la partie française, les encours sont à 10 milliards de prêts structurés dits « sensibles », garantis par la France.

Aujourd'hui, en retenant un surcoût annuel de l'ordre de 15 % l'an, la surcharge à supporter est de 1,5 milliard d'euros par an. Et personne ne sait en estimer justement le montant pour les années futures. Toute évolution de marché fait amplement varier les indices concernés (cours de change, taux courts, taux longs...).

Alors est-il possible de contrôler le surcoût, voire de le réduire, par la mise en œuvre d'une gestion spécifique de ces prêts ? Puisqu'il n'y pas de solution miracle, il convient de globaliser les emprunts en cause par natures de risques pour asseoir, sur des volumes suffisants, une gestion adaptée confiée à des équipes d'intervenants indépendants. Une baisse de seulement 10 % de la charge représente 150 millions par an d'économie sur chacun des 15 à 20 ans résiduels. Soit 2 milliards d'euros environ.

Défendre l'intérêt des contribuables

Depuis quelques années, en Europe, des projets de cette nature ont été conduits avec succès en Allemagne, en Autriche et en Espagne. Des solutions opérationnelles existent, peuvent être déployées dans des délais réduits, en toute discrétion, mais dans la transparence. En France des équipes indépendantes sont prêtes à le faire aux côtés de la Société de Financement Local (SFIL) et de la Banque Postale, les deux nouvelles banques mises en place.

L'indépendance de ces opérateurs et l'éthique des établissements financiers impliqués, sont un atout. L'objectif est d'aider les collectivités à défendre les intérêts des contribuables dans le droit fil des préoccupations rappelées à propos du dossier d'arbitrage CDR/Tapie. De plus, une solution de cette nature fonctionne indépendamment de toute décision de partage des risques et des surcoûts qui pourrait intervenir in fine entre les collectivités locales et Dexia, donc l'Etat.

La dette des collectivités locales est une urgence nationale

Dans un contexte où la maîtrise de l'endettement national est une question prioritaire, il serait opportun de conjuguer les aspects « gestion des risques » et « partage des pertes » au sein de la même solution, les acteurs devenant alors des alliés objectifs. Dans cette hypothèse, les intérêts de l'Etat, ceux des collectivités locales et ceux des agents sollicités, pour abonder le Fonds de Soutien envisagé par l'Etat, seraient alignés.

Le sujet des « emprunts toxiques » doit sortir du seul terrain judiciaire pour entrer dans une phase pragmatique de gestion. Le volume des pertes sera, à tout le moins, circonscrit. Et il n'y aura plus de coûts supplémentaires de procédures contentieuses. Le contribuable, et donc les entreprises, ne demandent qu'à payer moins.

A l'horizon des échéances municipales, la problématique de la dette des collectivités locales est devenue une urgence nationale. Et elle ne peut pas se résoudre par la politique de l'autruche ou par celle du déplacement des responsabilités. Elle passe par une déculpabilisation des élus, une information régulière des contribuables et la mise en place de solutions pragmatiques dès aujourd'hui.

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Commentaires 18
à écrit le 25/09/2013 à 7:40
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Notre société est peuplée d'irresponsables, et la gente politique n'y échappe pas..il y a là un problème 'culturel'...il y a cependant une multitude de moyens pour interdire aux collectivités locales de faire n'importe quoi: interdire certains produi...

à écrit le 24/09/2013 à 21:18
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Qui paye ses dettes s appauvrit ? Puisqu on parle littérature, on sucre leur retraite aux américains ? Ne risque-t-on pas de prendre quelques prunots ? On a déjà pris des torpilles? alors on socialise la dette par la nationalisation ? Et à quand l en...

à écrit le 24/09/2013 à 20:47
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Mon fils pour acheter une maison je lui ai dit de regarder sur http://www.proxiti.com . Car il y a des communes où la dette est telle, que la fiscalité locale ne pourra être qu'importante. De plus, j'ai toujours pensé, qu'un couple, ou seul était pou...

à écrit le 24/09/2013 à 20:18
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Il faudrait crer un label collectivité locale "light" ou "allegée".Ces collectivités auraient l'obligation de mentionner le % de prets toxiques, exemple "0% de prets toxiques, fiscalité allégée". Pratique pour savoir ou déménager.

à écrit le 24/09/2013 à 20:03
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si les collectivités local ne savent pas gérer un budget...... Bah il ne faut pas leur en donner Il y a suffisamment de fonctionnaire dans les bureaux des mairies pour avec des gens capables..... sinon dehors. Si on ne sait pas faire notre boulot , n...

le 24/09/2013 à 20:57
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réponse à votre question : Non

à écrit le 24/09/2013 à 19:36
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"Faut-il blâmer les élus locaux ? Naturellement non. Les collectivités locales, non familières des risques inhérents à ces produits financiers, ont fait confiance. " NON MAIS VOUS PLAISANTEZ ??? Vous iriez vous prendre un prêt de plusieurs centaines ...

le 24/09/2013 à 22:28
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Non, les responsables sont les électeurs qui élisent ces clowns.

à écrit le 24/09/2013 à 19:34
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c'est aux cela ne va pas arrêter les commune de faire de des travaux à tous va , c'est nous qui payons et non l'état , il faut qu'il arrête de refaire et refaire les trottoirs tous les cinq ans je vois dans ma commune même pas 1000 habitants , 670000...

le 24/09/2013 à 20:59
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oui et donc ? les trottoirs refaits c'est du Chiffre d'affaires pour les entreprises, emploi etc.... l'argent circule ... et il se crée par des gens qui appuient sur des boutons

à écrit le 24/09/2013 à 18:55
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Quelle naiveté de la part des auteurs.L'allègement de ladette permettra aux collectivités d'embaucher plus de copains et de passer de plus juteux contrats avec les entreprises "amies".Les impots contueront a exploser

à écrit le 24/09/2013 à 17:16
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Oui, mais allègez la dette des collectivités locales, c'est augmenter l'imposition de tous les français. La question est de savoir si la solidarité nationale doit jouer à l'avantage de peu qui bénéficie d' aménagements locaux supérieurs, à cause de l...

à écrit le 24/09/2013 à 16:38
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lorsqu'un élu achète un bien immobilier en propre il choisit un crédit a taux fixe, quand il endette sa mairie il prend des risques pour ne pas avoir a payer d'interet les premières années ou il sera au pouvoir. Cherchez l'erreur !! => et bien nous ...

à écrit le 24/09/2013 à 15:51
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"Faut-il blâmer les élus locaux ? Naturellement non. Les collectivités locales, non familières des risques inhérents à ces produits financiers, ont fait confiance..." Là on frise l'indécence !!! Je suis élu local, je suis incompétent, je fais confian...

à écrit le 24/09/2013 à 15:46
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Ah, la la. Les collectivités locales, c'est tout un poème. J'habite à Montpellier et pas plus tard qu'il y a quelques jours, le conseil général inaugurait encore un nouveau théâtre parmi les nombreux que compte déjà la ville. Un lieu contemporain sub...

à écrit le 24/09/2013 à 15:46
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Il faudra des taux a 6 % sur la dettes pour qu on bouge et on frisera la révolution J espère que quelques ancien ministres finiront a l échafaud

à écrit le 24/09/2013 à 15:16
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arrêtez de nous faire pleurer les élus ont succombé à la tentation de taux très bas pour financer des dépenses inutiles ou somptuaires. les collectivités sont équipées pour comprendre les risques pris. les contribuables vont malheureusement payer mai...

à écrit le 24/09/2013 à 13:49
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Pas étonnent ! Hollande comme Sarkozy privilégie la monarchie parlementaires et fonctionnaires de la fonction d'état, publique, territoriale, chu, entreprises publiques (sncf, ratp, edf, etc) avec leurs salaires surpayés, semaines à moins 32 heures, ...

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