Un souffle d'optimisme venu d'Afrique

L'Afrique se développe, et ce développement repose notamment sur sur un secteur financier en voie de rationalisation. Par Alexandre Kateb, directeur de Compétence Finance

Avec un taux de croissance projeté de 5% par an en moyenne au cours des dix prochaines années, le continent africain continue à attirer les investisseurs du monde entier. Le potentiel du continent ne se dément pas à l'heure où d'autres zones émergentes comme l'Inde ou le Brésil traversent quelques difficultés. La réduction de la conflictualité politique et des crises ouvertes, tant en Afrique de l'Ouest, au Sahel, que dans la région des grands lacs, ou en Afrique australe, participe aussi à cette dynamique positive.

Des technologies innovantes

En outre, l'utilisation de technologies innovantes (internet, smart phones) permet de contourner certains goulots d'étranglement bien connus: insuffisance des infrastructures (routes, électricité, logements), bureaucratie, corruption et mauvaise gouvernance. Le succès fulgurant du service de banque mobile M-PESA au Kenya, et de la monnaie virtuelle qui y est associée, est là pour en témoigner.

Une nouvelle génération de managers

 Une nouvelle génération de managers africains émerge aussi, formée dans les plus prestigieuses universités américaines et européennes, mais aussi de plus en plus en Asie, à Singapour et en Chine notamment, et de manière croissance sur le continent africain lui-même, au sein de pôles d'excellence, grandes écoles de commerce et instituts technologiques de haut niveau qui fleurissent un peu partout. Un certain nombre de ces écoles « made in Africa » ont déjà conclu des partenariats et des alliances avec des institutions universitaires occidentales ou asiatiques et ont obtenu - ou travaillent d'arrache-pied pour les obtenir - les fameux labels d'accréditation AACSB, AMBA et EQUIS qui leur permettront de se hisser dans le top mondial.

Le secteur financier se développe

 Le développement du secteur financier reflète ce dynamisme. Il est indispensable pour accélérer la croissance du continent et pour répondre aux besoins considérables des classes moyennes émergentes, de Lagos à Addis Abeba en passant par Abidjan, Luanda, Kinshasa, Johannesburg et Nairobi. Là aussi les choses changent à une vitesse stupéfiante. Il y a une quinzaine d'année, à l'exception des banques sud-africaines, la plupart des banques africaines étaient dans un état de déliquescence avancé.

Les deux décennies perdues des années 1980 et 1990 les avaient vidé de leur substance et les dévaluations successives les avaient acculé à une banqueroute qui ne disait pas son nom. Mais l'expansion engagée par les institutions sud-africaines, à l'instar de Standard Bank, à partir de la seconde moitié des années 1990 en Afrique de l'Est et en Afrique australe, et celle non moins impressionnante des grandes banques marocaines, Attijariwafa et BMCE, en Afrique de l'Ouest et du centre, conjuguée au redressement du secteur bancaire nigérian dans les années 2000, ont profondément transformé le paysage.

  Des initiatives pionnières

A cet égard, il faut souligner le rôle de catalyseur joué par des initiatives pionnières comme celle de Casablanca Finance City (CFC) visant à faire de la capitale économique et financière marocaine un hub et un centre d'expertise pour faciliter l'investissement dans la grande région qui va de l'Afrique du Nord (voire des pétromonarchies du Golfe) jusqu'à l'Afrique centrale, en passant par l'Afrique de l'Ouest.

Ce projet; initié par des acteurs privés avec la bénédiction des pouvoirs publics, pourrait à terme susciter une consolidation des différentes places boursières locales, et accroître de manière significative la liquidité et le pool de capital financier et humain nécessaires à l'émergence d'un secteur financier africain intégré à l'échelle continentale, autour de deux ou trois grands pôles régionaux.

Comme le dit Saïd Ibrahmi, ancien trésorier général du royaume du Maroc et actuel directeur général de CFC Authority : « Nous ne craignons pas la concurrence d'autres centres financiers. Nous souhaitons au contraire qu'il y en ait plus pour que cela crée une saine émulation. Il y a de la place pour tout le monde sur le continent africain et chacun trouvera son compte si la taille du marché s'accroît».

Les Africains de plus en plus confiants

 On appelle cela, « l'effet club » en économie des réseaux, et qu'est ce que la finance moderne sinon un réseau porté par des technologies sophistiquées qui transportent des informations à la nanoseconde ? Cette dimension technologique est fondamentale bien sûr et l'investissement à y consacrer est conséquent. Mais la finance, c'est aussi des hommes et des femmes talentueux qui croient au développement de l'Afrique et à son potentiel d'émergence.

C'est ce qui frappe le plus aujourd'hui, cette confiance en soi et cette volonté d'affirmation que les Africains n'ont jamais possédé autant qu'aujourd'hui, au point de dire leurs quatre vérités à un géant économique comme la Chine, comme en témoigne la tribune parue il y a quelques mois dans le Financial Times du très respecté gouverneur de la banque centrale nigériane, le Dr. Sanusi Lamido Sanusi, classé par Time Magazine parmi les 100 personnes les plus influentes au monde en 2011.

A l'époque des grands leaders charismatiques de l'indépendance succède aujourd'hui celle des grands entrepreneurs et des grands gestionnaires. Oui, l'Afrique émerge bien et les opportunités y sont nombreuses, mais les Africains entendent bien être les premiers acteurs et les premiers bénéficiaires du développement de leur continent. 


 

 

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