Mondialisation : la France a 10 ans pour garder sa place dans les services

La France fait partie des pays les mieux placés pour les échanges internationaux de services. Mais la concurrence étrangère arrive. Il est temps de réagir. Par Bruno Despujol, consultant chez Oliver Wyman et Christian Nibourel, Président du Groupement des Professions de Services et d’Accenture France
Le commerce international des services est fortement sous-estimé par les statistiques officielles, soulignent Bruno Despoujol et Christian Nibourel

Connaissez-vous le « paradoxe des services » ? Alors qu'ils représentent plus de 50 % de l'activité économique dans le monde (PIB), voire même plus de 70 % dans les pays développés, les services sont « censés » ne représenter que 20 % du commerce mondial. Etrange décalage que certains experts évacuent un peu vite en affirmant que les services sont avant tout des activités locales.

Des statistiques publiques obsolètes

A leur décharge, les statistiques publiques alimentent cette idée reçue. Établies à l'ère industrielle, elles ne répertorient tout simplement pas la réalité des flux de services immatériels et multiformes. De là découle rapidement une autre idée tout aussi inexacte : seule l'industrie est à même de générer des excédents, de la richesse, d'innover et donc d'assurer aux pays une place de choix dans le peloton de la mondialisation.

 Un volume d'échange de services deux fois supérieur aux estimations officielles

La réalité est tout autre : selon les estimations d'une récente étude Oliver Wyman (1), le volume réel des échanges de services serait deux fois supérieur aux estimations officielles. Et leur mondialisation se développe à grande vitesse (+ 8,7% par an en valeur prévus pour 2012 à 2022) sous l'effet de trois grandes ruptures : la « digitalisation » des modèles économiques, la croissance de la demande des pays émergents et la déréglementation des marchés nationaux. Un exemple ? Le chiffre d'affaires et les marges des services informatiques dans le monde sont supérieurs à ceux de l'aéronautique. La croissance vient de ces « services globaux » (médias, logiciels, services professionnels) qui peuvent être délivrés à distance, mais aussi de services dits de « proximité» (hôtellerie, nettoyage, distribution d'énergie) dont l'internationalisation passe par d'autres biais : franchises, plateformes de relation client mondiales, commercialisation de redevances de marque, de savoir-faire, etc.

 Les pays occidentaux en pole position

La bonne nouvelle c'est que dans cette course les pays occidentaux sont en pole position. Compte-tenu de la forte «tertiarisation » de leurs économies, ils disposent de marchés intérieurs matures, de centres d'excellence et d'une main d'œuvre qualifiée. La mondialisation des services est donc une opportunité unique d'exporter leurs savoir-faire, de réduire leurs déficits commerciaux et de rééquilibrer le commerce mondial.

 La concurrence étrangère s'aiguise

Mais la fenêtre d'opportunité sera courte. La France n'a que 10 ans devant elle pour conserver sa place mondiale estiment Oliver Wyman et le Groupement des Professions de Services. Les « consolidateurs » étrangers ont déjà largement pénétré les segments à plus forte valeur ajoutée. Le marché français des services professionnels, SSII et logiciels est desservi à 65% par des leaders étrangers (IBM, Google, Oracle, KPMG) et celui des services de proximité est très compétitif (McDonalds, Intercontinental Hotels, HSBC etc.).

Dans les segments B2C ; les médias ou les activités liées au tourisme et aux loisirs doivent se réinventer confrontés à des acteurs disposant de plateformes de distribution globales : Google, Amazon et Apple pour les uns, Booking.com ou Expedia pour les autres…

 Des acteurs leaders sur 90% des marchés de services

La France, qui n'a pas réussi à trouver un positionnement fort dans la mondialisation industrielle - contrairement à l'Allemagne - peut et doit relever ce nouveau défi en mesurant bien ses forces et ses faiblesses. Coté pile, nous sommes la deuxième économie de services d'Europe (PIB) et notre pays dispose d'acteurs leaders sur 90% des segments de marchés des services (Vinci, Vivendi, Accor, Veolia, Orange etc.). Côté face, notre positionnement est fragile sur les services « globaux » et numériques.

 Se renforcer dans les services globaux (banque, médias, informatique...)

Pour rester dans la course de la mondialisation des services, la France doit donc sans tarder se renforcer dans les « services globaux » (banque/finance, médias, informatique…) qui ne représentent pour le moment que 15% du PIB des services contre 20% en Allemagne ou au Royaume-Uni. Ce qui passe par un renforcement de nos acteurs nationaux sur leur marché.

 Développer des franchises à l'étranger

Nous devons aussi nous doter de filières d'excellence dans quelques domaines comme l'ont fait les Etats-Unis (propriété intellectuelle et services B2B), le Royaume-Uni (services financiers) ou l'Inde (informatique). Enfin il faut aussi encourager l'internationalisation de nos services de proximité (tourisme, services à la personne, restauration) et de nos savoir-faire via des franchises par exemple. En effet la mondialisation des services implique une réduction des barrières à l'entrée. Elle augure d'un monde plus turbulent, dans lequel les relais de croissance sont importants, mais les positions des acteurs seront aussi plus vulnérables.

 

 

(*) « Mondialisation des services : 10 années qui vont tout changer » étude Oliver Wyman, en collaboration avec le Groupement des Professions de Services (GPS).

 

 

 

 

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Commentaires 7
à écrit le 24/01/2014 à 17:12
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On donne vraiment de la visibilité à n'importe quoi! Un ancien ministre se réveille à 80 ans et trouve un plateau repas immangeable... il devrait faire profil bas et éviter de nous rappeler qu'il a pris la first toute sa vie à nos frais!

à écrit le 06/12/2013 à 10:01
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La "dérèglementation" quel beau mot pour dire de mettre le souk et réglementer derrière pour rajouter de l'obligation a suivre pour remettre de l'ordre!

à écrit le 06/12/2013 à 2:48
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C'est fini la France.

le 06/12/2013 à 3:44
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Avec des gens comme toi, c'est certain !

à écrit le 06/12/2013 à 0:43
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Est-ce un véritable travail de journaliste que de donner la parole à un associé d'Oliver Wyman et à un autre d'Accenture pour parler du développement de l'industrie des services française ??? Il est des choix éditoriaux qui me laissent pantois ...

à écrit le 06/12/2013 à 0:43
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Est-ce un véritable travail de journaliste que de donner la parole à un associé d'Oliver Wyman et à un autre d'Accenture pour parler du développement de l'industrie des services française ??? Il est des choix éditoriaux qui me laissent pantois ...

à écrit le 05/12/2013 à 23:37
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Il faudrait avoir certains politiciens actuellement étouffes par les incapables de ces quinze dernières années pour relancer l'économie française et non pas le ´vol dictatorial" des revenus des français. Que ces nouveaux politiciens soient de droite...

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