Et pourtant la France ne coule pas !

Par Olivier Passet, Xerfi  |   |  615  mots
Olivier Passet, directeur des synthèses économiques de Xerfi / DR
La Tribune publie chaque jour des extraits issus des analyses diffusées sur Xerfi Canal. Aujourd'hui, pourtant la France ne coule pas !

2003, c'était le célèbre essai de Nicolas Baverez sur « la France qui tombe », qui constatait la faillite économique de notre « modèle social-étatiste ».

En 2004, c'était l'époque du rapport Camdessus, qui appelait à un sursaut, stigmatisant notre préférence pour le loisir et devait servir de livre de chevet au Président Sarkozy. Puis ce fut le rapport alarmant de Michel Pébereau en 2005 qui pointait notre dynamique explosive d'endettement public.

A en croire ces avis très autorisés, c'est donc un modèle moribond et proche de la désintégration qui abordait la plus grave crise de l'après-guerre. Et pourtant, l'économie française ne s'est pas effondrée.

Tous ces ouvrages furent en leur temps surmédiatisés et abondamment critiqués aussi. Ils ont forgé ce qui constitue encore aujourd'hui l'ossature du discours « décliniste » et du bashing national et international qui envahie les médias chaque jour.

Des analyses prophétiques ?

Chacun de ces auteurs pourrait s'enorgueillir d'avoir été prophétique face aux difficultés qui ont explosées par la suite. Mais la relecture a distance de ces ouvrages est intéressante, que constate-t-on ?

  • Premièrement qu'ils appartiennent à une posture, plus morale qu'économique, récurrente au cours de l'histoire, à une longue tradition judéo-chrétienne de culpabilité face aux crises, dont l'issue ne peut être trouvée que dans le rachat par nos concitoyens de leurs fautes passées ;
  • Deuxièmement, que l'on ne trouve dans ces ouvrages aucune grille d'analyse pertinente de la crise qui allait suivre. Jamais les dérèglements de la finance et des comportements bancaires ne sont pointés du doigt. Jamais le surendettement privé n'est perçu comme un problème alors qu'il allait être le vrai ferment de la crise de solvabilité des États par la suite. Pour Camdessus, la non-tarification des chéquiers est pointée comme le problème numéro 1 de la finance. Michel Pébereau, lui, page 52 de son rapport, loue la vertu Espagnole dans la gestion de ses finances publiques. A aucun moment, l'idée d'une dette collective cachée, liée aux dérives des comportements privés n'est touchée du doigt. Jamais n'est effleurée l'idée que derrière le désendettement public apparent de certains pays, se profilent une dégradation de l'assurance des personnes, des bulles d'actif et d'activité non soutenables. En gros, l'essentiel n'est pas là.
  • Troisièmement et surtout, la focalisation exclusive sur nos faiblesses, rend a posteriori incompréhensible la relative résistance de l'économie française face à la crise.

Encore une fois, il ne s'agit pas de dénier nos problèmes

Mais les chiffres sont éloquents. Non l'économie française n'a pas eu le comportement d'un modèle au bout du rouleau. Il suffit pour s'en convaincre de regarder les évolutions cumulées de la France depuis 2008. Que voit-on ?

  • Premièrement, que le décrochage de l'activité est bien moindre que dans grands nombre d'économies. Non la France, n'est pas complètement assimilable à une économie du Sud.
  • Deuxièmement, que l'emploi a relativement bien résisté à la crise. La casse en termes de capacités humaines est moindre que dans la majorité des économies partenaires. 
  • Troisièmement, le chômage français est revenu sous la moyenne européenne. Il n'y a pas là de titre de gloire. Mais, la France faisait figure au milieu des années 2000 de cancre européen. On voit aujourd'hui que les bulles chez les autres embellissaient le tableau. Tout cela s'est normalisé aujourd'hui.


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