Décidément, l’Allemagne ne change pas !

Par Alexandre Mirlicourtois, Xerfi  |   |  529  mots
Alexandre Mirlicourtois, directeur de la conjoncture et de la prévision de Xerfi/ DR
La Tribune publie chaque jour des extraits issus des analyses diffusées sur Xerfi Canal. Aujourd'hui, l’Allemagne ne change pas !

Instauration d'un salaire minimum, politique familiale plus généreuse, abaissement de l'âge du départ à la retraite à 63 ans pour les travailleurs ayant 45 ans de cotisations derrière eux.

L'Allemagne semble depuis peu jouer une partition plus coopérative de relance de sa demande intérieure et vouloir prendre sa part dans la nécessaire convergence européenne. En apparence du moins, car les derniers chiffres allemands nous renvoient une toute autre image. Celle d'un pays égal à lui-même qui tire sa force de son industrie grâce à des entreprises ultra-compétitives.

D'un pays qui continue d'accumuler des excédents extérieurs massifs. Des excédents d'autant plus importants que la demande domestique est atrophiée en raison du contrôle très strict des salaires, condition sine qua non pour rester compétitif. L'Allemagne reste aussi un pays vieillissant avec un déficit démographique naturel à peine compensé par les flux migratoires. Le changement de cap annoncé fait figure de concession formelle, à replacer dans le contexte politique de la coalition. Sans prise sur la réalité à brève échéance.

Il suffit pour s'en convaincre de scruter de près la portée véritable des réformes en cours

Comme toujours, le diable se cache dans les détails. Oui, la création d'un salaire minimum est une révolution en Allemagne, l'Etat s'interdisant généralement d'intervenir dans les négociations entre les partenaires sociaux.

Mais à 8,50 euros de l'heure (il est actuellement de 9,53 euros en France), il mord sur très peu de secteurs. Surtout il va entrer en application très lentement.

La date officielle fixée au 1er janvier 2015 est en partie factice, de nombreuses branches pouvant bénéficier d'exemptions jusqu'au 1er janvier 2017. Enfin aucune revalorisation n'est prévue avant janvier 2018.

L'impact du salaire minimum sur la compétitivité allemande et la demande intérieure se fera donc sentir très progressivement. Si jamais il se fait sentir. Sur les retraites, les « gestes » ont aussi des allures de simples corrections.

L'épreuve des faits maintenant. Et d'abord, l'évolution des salaires

Selon les premières estimations de l'Office fédéral des statistiques les salaires réels allemands, c'est-à-dire corrigés de l'évolution des prix, ont reculé en 2013. Le recul est certes minime (0,2% seulement) mais c'est une première depuis 2009 et c'est aussi la confirmation de la nette tendance au ralentissement observé depuis 2011.

Le détail de la composition du PIB au 4ème trimestre révèle ensuite que sur le fond rien ne bouge. L'impulsion fin 2013 a été donnée par le commerce extérieur qui a apporté une contribution positive de 1,1 point.

Et si les stocks ont lourdement pesé pour ramener la croissance d'ensemble à 0,4% seulement, la consommation y participe également en diminuant de 0,1% sur le trimestre.

L'Allemagne est un pays mercantiliste et un pays vieillisant qui doit accumuler les excédents commerciaux, pour financer ses retraités d'aujourd'hui et de demain. Quant à ses performances actuelles, elles s'inscrivent bien plus dans le maintien de son modèle que dans sa transformation radicale.

 

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