Valls, l'ultime esquive de François Hollande

En nommant Manuel Valls sous la pression, François Hollande fait là un aveu de faiblesse. Et il agit comme s'il n'avait pas écouté les électeurs, encore moins ceux de gauche. par Jean-Christophe Gallien Professeur associé à l'Université de Paris 1 la Sorbonne

Discret durant la semaine de l'entre deux tours, François Hollande avait juste évoqué le caractère « injuste » du vote des français. Une incroyable réaction de déni d'un Président de la République en exercice face à un premier tour des municipales qui traduisait comme l'a confirmé le second : un cri de rage silencieux de nos concitoyens. François Hollande semblait dire à demi mot : « Elisons un autre peuple » !

Tout a changé le soir du second tour. La déflagration de la dissolution du « socialisme municipal » a comme réveillé l'Elysée et arraché François Hollande à sa douce fiction. En moins de 24 heures Il a limogé Jean-Marc Ayrault et annoncé, une première, à la France des journaux télévisés de 20 heures, qu'il désignait Manuel Valls pour lui succéder.

Quel scénario à l'œuvre?

François Hollande réagit dans la crise. Moins de deux ans après son élection, il engage dans l'urgence un épisode dit de « combat » qui s'ajoute, succède, on ne sait pas très bien à la très récente séquence sociale libérale. Le tacticien politique, héritier des habiletés mitterrandiennes, semble subitement avoir perdu le contrôle du tempo et de la narration de son mandat. Un scénario est-il à l'œuvre ?

Le feu populaire qui brûle et se rapproche chaque jour davantage de l'Elysée ne pourra être arrêté, encore moins éteint par un changement de Premier ministre même accéléré et même avec le choix, tellement attendu, de Manuel Valls, personnage favori des sondages. Dans la tourmente, on attend un guide, un chef.

Pas un message d'autorité, plutôt un geste d'esquive

Avec cette décision, il ne s'agit pas d'un message d'autorité. Bien au contraire, geste d'esquive, c'est presqu'un aveu de faiblesse qui nourrit, à nouveau, l'enchainement terrible de cette présidence : crédibilité disputée, légitimité contestée, … confiance ajournée. François Hollande aurait dû et pu résister. Se montrer fort dans la tempête. Il se serait grandi dans le maintien de Jean Marc Ayrault. Au moins jusqu'à l'été prochain ! Certes, il n'y a pas de gouvernement sans crise, et on gouverne désormais dans la crise, mais là, l'erreur est grande. La suite immédiate avec l'effacement intercommunal programmé des socialistes puis la future percée du FN aux prochaines européennes va largement miner les premiers pas du nouveau locataire de Matignon. Et que dire des autres élections de mi mandat, celles de 2015 avec des régionales désormais à plus que haut risque pour le parti socialiste et ses alliés !

Présidentiable

Pour sortir de l'impasse, autour du plus populaire de ses ministres, il annonce un gouvernement de combat, enfin resserré, enfin dirigé, enfin discipliné. Il promet des ministres qui agissent, concentrés sur leur tache propre et qui gouvernent leurs administrations, au service du seul intérêt général du pays.

Il l'affirme, il a entendu les français mais on hésite à le croire. François Hollande n'a pas réellement écouté le peuple, encore moins le peuple de gauche. En nommant Manuel Valls, il agit comme s'il ne voulait pas renouer personnellement avec les français. François Hollande doit pourtant très vite se relier au pays réel. En finir avec une Présidence effacée, à distance, face à une France en tranchée qui gronde et qui rejette sans cesse les offres politiques depuis 2008. Il doit présidentialiser. Il doit s'engager, guider, s'exprimer, dresser la perspective et le tempo des séquences et incarner une seule direction en laissant le reste au gouvernement. Il doit surtout d'urgence obtenir, enfin, des résultats tangibles, faute de quoi, même les plus créatifs des narrateurs ne pourront plus rien pour sauver sa série et son personnage.

 

 *Président de j c g a

Membre de la SEAP, Society of European Affairs Professionals

 

 

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 25
à écrit le 01/04/2014 à 21:10
Signaler
Francois HOLLANDE 2006 Extrait de devoirs de vérité stock "je préconise un exercice de vérification démocratique au milieu de la législature... Si d'aventure, à l'occasion de cette vérification, une crise profonde se produisait ou des élections lé...

le 01/04/2014 à 22:15
Signaler
Après leur avoir menti, il ne les écoute pas ? La belle affaire : il a été élu pour cela...

à écrit le 01/04/2014 à 16:44
Signaler
Quant il va parler au peuple, il va falloir qu' il s' y prenne tôt !!!! Moi 1 er ....euh....ministre je vais....euh....règler les ...euh....problèmes de....euh......sécurité dans ....euh..... les ....euh....banlieues....euh.......etc..etc..., alors l...

à écrit le 01/04/2014 à 13:54
Signaler
Cet article est incroyable : pensez-vous qu'il soit possible d'obtenir des résultats économiques en quelques mois, surtout avec une BCE qui ne fait pas son travail ? D'autant plus que les résultats, si ils ne sont pas bons dans l'absolu, ne sont pas...

le 01/04/2014 à 14:20
Signaler
Bien sur qu'il est possible d'obtenir des résultats en quelques mois. Tiens 2 idées qui ne coûtent rien et qui ont un effet immédiat sur le chômage : 1°) Le code du travail ne s'applique qu'aux entreprises de plus de 10 salariés 2°) Tous les seu...

à écrit le 01/04/2014 à 13:41
Signaler
Ne pourrait-on pas imaginer qu'il vaux mieux perdre toutes les élections locales (municipales aujourd'hui et régionales dans quelques temps) lorsqu'il faudra sabrer dans les dotations de l'Etat aux collectivités? Ou trouve t-on ces 50Mds€? Il est pl...

à écrit le 01/04/2014 à 13:14
Signaler
Hollande n'a pas écouté le peuple de gauche, certes. De là à dire qu'il n'a pas écouté le peuple est un raccourci osé. Le peuple dans sa globalité souhaite-t-il une politique de gauche ? On peut en douter. La seule issue pour Mr Hollande est de r...

à écrit le 01/04/2014 à 12:54
Signaler
Bon article,mais je crois qu'il y a eu rebellion d'une partie des socialistes.Il n'est pas sur que Hollande controle encore grand chose.Vals était probablement la seule solution de sauver la face pour un temps

à écrit le 01/04/2014 à 12:39
Signaler
aveu de faiblesse ? on ne le croit pas ; plutôt un moyen de s'en débarrasser pour 2017 ! Hollande rêve de se représenter sans doute et de casser un éventuel adversaire de qualité à suivre donc ....

le 01/04/2014 à 22:18
Signaler
Qui ça ? Où ça ? Quand ça ? Si c'est de la qualité, ça doit dater des hommes des cavernes...

à écrit le 01/04/2014 à 12:34
Signaler
Hollande n'a pas supprimé les règles scandaleuses de l'élection municipale. Qu'il applique la proportionnelle à un seul tour, sans magouille de 50% + le résultat dans les 50 % restants, comme on voit pour les élus du premier tour. Qu'il arrête ça tou...

à écrit le 01/04/2014 à 12:32
Signaler
Pour répondre à "lrugence, 12:24" : Cette non urgence répète bien le début de mandat de Hollande qui a pris des vacances pour commencer. Là pareil, week-end prolongé, enfin, 1 semaine de vacances.

à écrit le 01/04/2014 à 12:30
Signaler
Comment Hollande peut-il parler d'injustice pour les maires PS non réélus ? Les ex-maires PS appartenaient, soutenaient, appliquaient une idéologie malheureusement majoritaire au scrutin présidentiel. Qu'ils le fassent sur un plan local les sauvegard...

à écrit le 01/04/2014 à 12:26
Signaler
Hollande n'a aucun charisme, aucun professionnalisme, aucune passion, aucun goût, il a juste fait un régime et changé de costume pour être dans le paraître, paraître bien, mais au fond, il n'y a rien dans le fond... le fond est creux. DEMISSION !

le 01/04/2014 à 12:39
Signaler
Et maintenant, il n' aplus : de pognon de cap de majorité (sur sa gauche) de vraie politique C'est devenu un "fantoche" !!

le 01/04/2014 à 12:52
Signaler
Il n'a meme pas fait un régime,il a maigri parce qu'il avait un cancer.Meme pas foutu de manger moins!

le 01/04/2014 à 14:23
Signaler
qui vous a dit qu'il avait eu cette maladie?? ce n'est pas parce que l'on se fait opérer de la prostate, que c'est malin "...on a vite fait de raconter des blablas!

le 01/04/2014 à 15:40
Signaler
et encore..! connaissez vous la blague de F Raynaud et le costume...on en dira pas plus.....

à écrit le 01/04/2014 à 12:24
Signaler
Dans quelle urgence est le président, aucune. Il a déjà mis 24 heures pour nommer un premier ministre. Le mardi, car 1er avril, rien. Le mercredi, donc 72 h après, nomination des ministres. Le jeudi, donc 96 h après, premier conseil des ministres...

à écrit le 01/04/2014 à 12:21
Signaler
le seul remaniement qui tienne, c'est qu'Hollande démissionne après avoir dissous l'assemblée nationale, là, on aura une représentation actualisée des Français. Nommer Valls, mimant une droite ringarde, et pour le reste, des ministres socialocommunis...

le 01/04/2014 à 12:43
Signaler
ce que les politiques ne comprennent pas : le peuple est las des décisions ultra libérales de Bruxelles ! attendons une nouvelle abstention aux européennes ! aucun choix à ces élections puisque tout est déjà imposé au peuple : rigueur et récession...

à écrit le 01/04/2014 à 12:20
Signaler
Vals le coléreux!....et les résultats, ils sont où jusqu'à présent?!

à écrit le 01/04/2014 à 12:19
Signaler
Entre 30000 et 45000 chômeurs de plus par mois. Et Hollande parle d'injustice pour les maires, qui se reposant sur les autres se voient privés de mandats. C'est bien un socialiste, toujours dépendant des autres.

le 01/04/2014 à 12:45
Signaler
le flot des nouveaux chomeurs est aussi le résultat d'une décennie perdue donc avant qu'hollande ne prenne la place .....

à écrit le 01/04/2014 à 11:44
Signaler
y'a t'il un pilote à bord ?!

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.