Le pacte de responsabilité n’est pas un cadeau aux patrons

Par Jacky Bontems, Philippe-Michel Thibault et Dominique Villemot  |   |  927  mots
Le pacte de responsabilité n'est en rien une invention de Pierre Gattaz. C'est une arme contre le chômage. Les entreprises devront prendre des engagements qui seront vérifiés. Par Jacky Bontems, Président du Réseau 812, Philippe-Michel Thibault, écrivain et membre du conseil d'administration de Réseau 812, Dominique Villemot, avocat et Président d'honneur de Démocratie 2012

Une rumeur circule, enfle et dénature l'objectif du pacte de responsabilité. Pierre Gattaz en aurait soufflé l'idée à l'oreille de François Hollande. De là à dire que ce pacte est un cadeau de Noël aux patrons, il n'y a qu'un pas. Allègrement franchi par le Medef, la CGT et FO. Cette rumeur a alimenté le vote sanction des élections municipales. Il faut tordre le coup à ces allégations ridicules et blessantes pour le chef de l'Etat.

 Une réforme inspirée par Hollande

En septembre 2013, François Hollande avait demandé à ses conseillers de travailler sur le concept de « pacte de responsabilité ». Cette formule vient de lui et de lui seul ! Il connaît les forces et les faiblesses de nos entreprises et de notre économie. Il est un homme de chiffres. A partir de là, de multiples réunions de mise au point se sont déroulées. Annoncé, sans entrer dans les détails, lors des vœux aux Français, le pacte de responsabilité est précisé lors de la conférence de presse du 14 janvier. Pierre Gattaz a été consulté comme les autres partenaires sociaux. Il est loin d'en être l'inspirateur.

 Pas un cadeau aux patrons, mais une arme contre le chômage

Il faut se rendre à l'évidence : le pacte de responsabilité n'est pas un cadeau aux patrons. Son objectif central est l'emploi et le recul significatif du chômage. Il met en place un dispositif efficace pour l'emploi des jeunes. Il n'est pas tolérable, dans un pays développé comme le nôtre, que 25% des moins de 25 ans (présents sur le marché du travail) soient au chômage ! Quoique légèrement supérieur en février dernier (+ 1700 inscrits, d'après les récentes statistiques), le nombre de jeunes inscrits à Pôle emploi reste sur une tendance à la baisse depuis plus de neuf mois. Son niveau est revenu à celui de fin 2012. La hausse de 2013 a bien été gommée. Ce n'est pas par l'opération du Saint-Esprit, mais grâce à l'action de Michel Sapin qui a mis en place les emplois d'avenir.

Si le gouvernement a réussi à juguler la progression du chômage et en particulier celui des jeunes, cet effort important n'est pas suffisant pour provoquer un ressaut durable des recrutements. Pour y parvenir, dans un contexte économique difficile, avec une croissance faible, il faut agir sur le coût du travail. Tel est le pivot du pacte de responsabilité.

 Des économies nécessaires

Le pacte ne sera pas financé par de nouveaux prélèvements sur les ménages ou les entreprises. Le Président de la République l'a affirmé le 14 janvier. Dès lors, sa mise en œuvre passe par des économies rendues d'autant plus nécessaires que la France a accumulé un déficit public et une dette considérables depuis 10 ans. Les économies, le Président de la République l'a précisé le 31 mars, ne seront pas le résultat de coupes budgétaires aveugles, « il s'agir de transformer l'Etat ».

François Hollande a souhaité également que les partenaires sociaux s'engagent. C'est le sens du relevé de conclusions, approuvé sur le principe le 5 mars dernier. Il est volontariste, précis et sans ambiguïté. Pour les entreprises, il est prévu une baisse des prélèvements sur le travail de 10 milliards d'euros supplémentaires qui s'ajouteront aux 20 milliards d'euros du CICE, ainsi qu'une simplification des processus administratifs et réglementaires ; pour les salariés, un engagement et des ambitions en termes d'emplois, de qualité de l'emploi, de dialogue social et d'investissement.

Le lancement d'un dialogue économique

Le pacte de responsabilité donne le coup d'envoi, sur des bases saines, à des négociations au niveau des branches, des entreprises et des territoires pour respecter les spécificités de chaque secteur d'activité et de chaque région. Les accords signés sur le terrain fourniront un cadre rigoureux à sa mise en œuvre. Pour la première fois en France, le pacte de responsabilité lance le dialogue économique, entre les parties prenantes, à tous les niveaux.

 Les engagements pris seront vérifiés

Les allègements de charges seront cadencés dans le temps afin de vérifier le respect des engagements pris. Ce ne sont en rien des cadeaux. Et il va de soi que la distribution des dividendes n'en relève pas. La loi le dit déjà expressément pour le CICE. L'Observatoire des contreparties, mis en place par l'Etat, le patronat et les syndicats, y veillera.

De surcroît, comme l'a annoncé le Président de la République le 31 mars, les entreprises ne seront pas les seules à bénéficier d'allègements, puisque le pacte de responsabilité sera accompagné d'un pacte de solidarité prévoyant des allègements de charges pour les salariés, ainsi que des baisses d'impôts pour les ménages.

 Un patronat disparate

Enfin, il est temps de cesser de considérer le « patronat » comme un bloc homogène, alors qu'il est disparate à souhait. Quoi de plus différent d'un patron du CAC 40, qu'un patron de PME, un artisan ou encore un auto-entrepreneur. Jusqu'à preuve du contraire ce sont les entreprises, essentiellement les PME/TPE qui recrutent. C'est pour cette raison sans doute que les Français gardent une bonne opinion de leur entreprise malgré les critiques.

En cette année du centenaire de l'assassinat de Jean Jaurès, citons une affirmation du grand dirigeant socialiste : « Il faut chercher la vérité et la dire ». C'est ce que nous faisons ici… avec modestie.