Que la BCE cesse de craindre les critiques allemandes !

La BCE doit cesser d'avoir peur des critiques venant d'Allemagne, et lutter franchement contre la déflation. Par Joachim Fels, chef économiste, Morgan Stanley

Toute promesse se doit d'être tenue. Une personne qui tient ses promesses est une personne qui inspire confiance. Et la confiance est un bien précieux. Elle favorise le vivre ensemble, tant dans la sphère privée que dans les sphères politique et économique.

Il y a longtemps de cela, la Banque centrale européenne a fait la promesse de veiller à la stabilité des prix. Elle y est tenue par les traités européens. Pour respecter cette promesse, elle s'est fixée pour objectif de maintenir l'Indice des Prix à la Consommation Harmonisé (IPCH) à un niveau « inférieur à 2 %, mais proche de ce chiffre ». Plusieurs raisons plaident en faveur d'un faible taux d'inflation positif comme marge de sécurité, notamment le fait que les indices de prix officiels surestiment la véritable augmentation des prix.

En 15 ans d'existence, la BCE s'est acquittée de son mandat avec efficacité. Malgré des débuts difficiles marqués par la défiance et des conditions peu favorables, la Banque centrale européenne a su tenir sa promesse et instaurer la confiance. Elle peut en être fière et nous devrions lui en être reconnaissants.

Les mesures officielles surestiment la hausse des prix: la déflation est proche

Mais un danger se profile. Depuis un certain temps, les prix de la zone euro ont augmenté beaucoup moins vite que l'objectif fixé. Plus récemment, le taux annuel était de seulement 0,7 %. Naturellement, les écarts par rapport à l'objectif de 2 % sont inévitables à court ou moyen terme, la politique monétaire n'étant pas en mesure d'influencer le taux d'inflation à court terme. Néanmoins, les économistes de la BCE prévoient que l'inflation restera inférieure à l'objectif pendant encore au moins trois ans. Sachant que les mesures officielles de l'inflation surestiment l'augmentation réelle des prix, on peut alors en conclure que la zone euro devrait flirter avec la déflation dans un avenir proche.

Une préférence pour l'épargne explique le faibles taux d'intérêt

La déflation est tout aussi préjudiciable que l'inflation. Il est par conséquent étonnant de constater que les autorités monétaires se sont récemment prononcées contre une nouvelle baisse des taux ou contre de nouvelles mesures d'assouplissement monétaire. Il est difficile de ne pas suspecter la BCE d'être influencée par les critiques que lui ont valu sa politique de taux extrêmement bas de la part de pays tels que l'Allemagne, où la faiblesse des taux est considérée comme préjudiciable aux épargnants. Cependant, ces critiques ne sont pas fondées d'un point de vue économique. Si les taux d'intérêt observés à travers le monde sont si faibles, c'est parce que les gens préfèrent épargner plutôt qu'investir.

Ne pas avoir peur de l'Allemagne

D'autre part, l'argument qui consiste à dire que la politique monétaire est à cours d'options pour lutter contre la déflation n'apparaît pas très convaincant. La BCE pourrait, parallèlement à une baisse des taux, acheter des obligations publiques et privées sur le marché afin de stabiliser les anticipations d'inflation autour du taux cible.

Cependant, une fois de plus, la BCE appréhende les critiques venant d'Allemagne où il existe une peur irrationnelle et profondément ancrée face à ce type de «création monétaire ». La BCE ne devrait pas laisser ces critiques lui dicter sa conduite. Elle nous a promis la stabilité des prix. Quant à l'Allemagne, elle ne devrait pas critiquer la banque centrale qui fait tout ce qui est en son pouvoir pour tenir sa promesse.

 

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