La revanche des pays avancés se confirme

Par Alexandre Mirlicourtois, Xerfi  |   |  600  mots
Alexandre Mirlicourtois, directeur de la conjoncture et de la prévision de Xerfi./ DR
La Tribune publie chaque jour des extraits issus des analyses diffusées sur Xerfi Canal. Aujourd'hui, la revanche des pays avancés se confirme face aux émergents

Coup de frein des pays émergents, reprise dans les pays avancés, mouvement de reflux des capitaux du sud vers le nord, tous ces signaux ne reflètent pas un simple déphasage conjoncturel mais consacre le retour des pays avancés.

Que voit-on aujourd'hui ?

D'abord la réaffirmation du leadership américain sur l'économie mondiale. Une Amérique qui a mis de façon déterminée le cap sur la restauration de sa compétitivité industrielle en jouant sur tous les leviers à sa disposition : exploitation des gaz de schiste pour faire baisser le coût de l'énergie et abaisser les coûts de production ; relocalisation dans les Etats du sud pour bénéficier des bas salaires ce qui va de pair avec la volonté d'un nombre croissant de multinationales de raccourcir leurs chaines de valeur, sans oublier l'arme du change pour renforcer ses positions.

Et le bilan est là :

  • 1. la croissance s'est renforcée et le PIB évolue désormais sur un rythme annualisé proche voire supérieur à 3% selon les trimestres.
  • 2. ce retour de la croissance, fait remarquable, va de pair avec l'allègement du déficit courant : un déficit courant qui représente désormais moins de 2% du PIB, ce n'était plus arrivé depuis le 3ème trimestre 1997.

Ceux qui ont cru que l'empire américain était voué à devenir un jouet entre les mains de la Chine, sous dépendance des colossales réserves de change accumulées par ce pays, sont contredits par l'histoire.

L'offensive est américaine et c'est bien une stratégie de containment de la Chine qui est mise en place. Cela explique aussi pourquoi le jeu d'alliance s'est déplacé en direction du Japon. Japon qui a eu les mains libre pour laisser filer sa monnaie : son taux de change réel effectif (c'est à dire celui qui intègre la structure des échanges et l'inflation) a glissé de 26% depuis son dernier point haut, de quoi repartir à l'offensive sur les marchés asiatiques.

A l'intérieur, la croissance est poussée par l'activisme de l'exécutif avec la mise en place des « abenomics » qui mêlent un plan de relance, une politique monétaire très agressive mais aussi des réformes structurelles. La hausse de la TVA au 1er avril dernier risque néanmoins de contrarier un temps la reprise qui se dessine.

Et puis il y a l'Europe qui entre en convalescence

Il est certes difficile d'en parler comme une entité tant la diversité prévaudra dans la reprise. Le pôle germanique s'est déjà largement redressé, exploitant toujours plus les faibles coûts de son hinterland à l'est de l'Europe et en étendant maintenant son économie de bazar au sud de l'Europe : le PIB allemand a désormais dépassé son dernier pic de 3% et le gouvernement Merkel prévoit 1,8% de croissance cette année et 2% en 2015.

Quant à l'Europe du Sud, elle a touché le fond et commence maintenant à toucher les dividendes de la restauration de sa compétitivité. A cela s'ajoute le Royaume-Uni en plein renouveau. L'Europe, cet homme malade de l'Occident, demeure malgré tout une zone de richesse, de production et de consommation de premier plan. Les pays avancés abordent une nouvelle phase de la mondialisation en rangs plus serrés autour d'un triptyque emmené par les Etats-Unis et leurs alliés européens et japonais. Face à cette nouvelle donne, les grands émergents sont logiquement à la peine et leurs ratés confirment trimestre après trimestre le rééquilibrage durable de la croissance mondiale que nous annonçons depuis près d'un an.