Europe sociale : année zéro

Le libéralisme a fait des ravages en Europe. Il est temps de mettre en œuvre l'Europe sociale, via des investissements et un renforcement du dialogue social. Par Jacky Bontems, Président de Réseau 812, Philippe-Michel Thibault, écrivain et membre du conseil d’administration du Réseau 812 et Dominique Villemot, avocat et Président d’honneur de Démocratie 2012

 L'Europe est en cours de décomposition. Cette situation est le résultat d'une gouvernance désastreuse des libéraux et des conservateurs depuis une décennie que ce soit à Bruxelles ou à Strasbourg, ou encore dans la plupart des pays membres. Aujourd'hui, leur politique a conduit à l'irrésistible montée des nationalismes, du racisme et de la xénophobie. Le spectre qui hante l'Europe ce n'est plus le communisme, pour reprendre la célèbre formule de Marx, mais celui du populisme , avec son cortège de destruction de la solidarité, des libertés publiques et des grandes avancées sociales.

 L'enjeu de ces élections: la relance de l'Europe sociale

L'enjeu des élections européennes est la relance de l'Europe sociale alors que l'Union Européenne traverse une des plus graves crises économique et sociale de son histoire. Elle enregistre 27 millions de chômeurs et une augmentation exponentielle de la pauvreté et de l'exclusion. La refondation de l'Europe doit donc passer par une politique sociale ambitieuse. C'est une condition essentielle pour regagner la confiance des citoyens de l'Union. Le bilan social de l'Europe n'est pas nul. Elle a permis de nombreuses avancées notamment pour la santé et la sécurité au travail ou la formation professionnelle. Mais c'est insuffisant au regard des acquis de l'Europe dans d'autres domaines.

Trois exemples des ravages de la politique libérale

Trois exemples récents montrent les ravages de la politique libérale.

D'abord, la révision de la directive européenne de 2003 sur le temps de travail est au point mort. Pourtant, le nouveau texte n'est guère révolutionnaire. Il prévoit un repos quotidien de 11 heures, un repos de 24 heures par semaine, un plafond hebdomadaire de 48 heures, des congés annuels de quatre semaines, etc. C'est déjà trop pour M. Barroso.

Ensuite, « l'opt-out », obtenu en 2009 par les Britanniques, a mis en place un système scandaleux qui contraint chaque salarié à renoncer, dans son contrat de travail ou par un avenant, au plafond de 48 heures hebdomadaires. C'est la porte ouverte à tous les abus possibles des chefs d'entreprise. Bonjour, l'esclavage ! Malgré l'action permanente de la Confédération Européenne des Syndicats (CES) pour obtenir la suppression de « l'opt-out », 16 pays utilisent ce mécanisme de régression sociale absolue.

Enfin, pointons le dumping social et les dérives du détachement temporaire de travailleurs, générateurs d'inégalités et de distorsions de concurrence. La France a remporté sur ce plan une importante victoire fin 2013 en obtenant un encadrement beaucoup plus strict et notamment la possibilité de faire jouer la responsabilité des donneurs d'ordre.

 Investir à hauteur de 2% du PIB européen

Si le traité de Maastricht a jeté les bases, en 1992, de négociations entre partenaires sociaux au niveau européen, les accords ont porté sur des sujets consensuels comme le congé parental, le télétravail, le stress, ou encore le harcèlement et la violence au travail. Le traité de Lisbonne a prévu que la négociation collective puisse être source de droit au niveau européen, mais aucune directive n'a pu être adoptée. Dans le contexte de crise actuel, l'Union européenne doit plus que jamais apparaître comme un moteur de croissance et de progrès social.

La CES, relayant un projet élaboré par le DGB allemand et d'autres syndicats, propose par exemple de mettre en œuvre un plan d'investissements complémentaires de 2% du PIB européen pendant dix ans. Ces investissements pourraient porter sur la transition énergétique, les infrastructures de transport, l'éducation et la formation, les équipements pour les personnes âgées, la gestion durable de l'eau.

La gestion de ce plan pourrait être confiée à la Banque européenne d'investissement, ou à une institution ad hoc, et s'appuierait sur des fonds propres financés par les recettes de la taxe sur les transactions financières. Le financement des investissements serait ainsi assuré.

 Renforcer le dialogue social européen

Par ailleurs, l'harmonisation sociale par le haut doit être au cœur de l'action européenne pour supprimer les distorsions de concurrence nées des différences entre réglementations sociales. Dans cette perspective, le rôle du dialogue social européen doit être renforcé. Si la fixation des salaires reste une compétence nationale, le droit européen devrait cadrer l'instauration d'un salaire minimum légal décent et équitable. Aujourd'hui, les traités européens donnent toujours la primauté aux règles de concurrence sur les dispositions sociales, qu'elles soient européennes ou nationales. Nous reprenons la proposition de la CES d'intégrer dans les traités une clause de progrès social affirmant que le marché unique n'est pas une fin en soi mais qu'il doit être un moyen de réaliser des progrès sociaux. En effet, les libertés économiques ne doivent plus prévaloir sur les droits sociaux fondamentaux.

 Il est temps qu'une Europe véritablement sociale inverse le cours des choses.

 Jacky Bontems, Président de Réseau 812

Philippe-Michel Thibault, écrivain et membre du conseil d'administration du Réseau 812

Dominique Villemot, avocat et Président d'honneur de Démocratie 2012

 

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 4
à écrit le 23/05/2014 à 16:12
Signaler
L'europe social ca n'existe pas et ca n'existera jamais elle est pas faite pour ca c'est un truc pour faire voter les gogos qui votent encore socialiste ou vert .

le 23/05/2014 à 19:35
Signaler
les 27 % de chomeurs en grece, les 25% en espagne et tous les autres vous remercie pour votre commentaire...

à écrit le 23/05/2014 à 13:23
Signaler
a oui l europe social , sa commence bien on va expatrier une production de voiture dans un des pays de l est impec...., ca commence bien l Europe sociale bin c est pas pour demain peut etre dans 50 ans . l Europe c est pire qu un pampers . il faudra...

à écrit le 23/05/2014 à 12:57
Signaler
Quand le social sera au minima partout, il sera pris comme référence car il n'y aurai pas mieux ailleurs pour ce plaindre!

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.