La politique économique gouvernementale est (de plus en plus) illisible

Le gouvernement Valls soutient-il massivement l’offre à travers le pacte de responsabilité ? Appuie-t-il en même temps sur l’accélérateur de la consommation et de l’investissement résidentiel ? Met-t-il au contraire le cap sur la résorption du déficit au détriment des producteurs et des consommateurs ?
Olivier Passet, directeur des synthèses économiques de Xerfi. / DR

En affirmant courir tous les lièvres à la fois, c'est bien la lisibilité et la cohérence de la politique gouvernementale qui en fait les frais.

30 milliards de baisse de charges sur le travail

Soutient-il tout d'abord l'offre ? Oui si l'on prend les masses en jeu du CICE et du pacte de responsabilité. 30 milliards de baisse de charges sur le travail. Mais en privilégiant plutôt le bas de la distribution des salaires, les secteurs moteurs de la croissance de l'emploi et de la productivité que sont les services BtoB à forte intensité intellectuelle sont pour l'essentiel en dehors de la cible.

Seule la baisse de 1,8 point des cotisations familiales pour tous les salariés gagnant jusqu'à 3,5 fois le SMIC mordra réellement sur les secteurs intensifs en emploi qualifié. Cette mesure est évaluée à 4,5 milliards d'euros, mais elle ne sera mise en œuvre qu'à partir de 2016. Il faut y ajouter la suppression de la surtaxe sur l'IS toujours pour 2016 et un début de réforme de l'IS promis pour 2017.

10 milliards de prélèvements supplémentaires sur les ménages

Soutient-t-il la demande maintenant ? Oui si l'on en croît la communication du gouvernement. Mais là encore les effets d'annonce sont démentis par les faits. Car 2014 constitue une année de forte hausse de la fiscalité des ménages, entre la majoration de la TVA en début d'année, l'abaissement du quotient familial, et la montée en puissance de la fiscalité écologique. En tout 10 milliards de prélèvements supplémentaires sur les ménages.

Les économies budgétaires de 15 milliards en 2014 et de 21 milliards supplémentaires en 2015 affectent de leur côté directement le pouvoir d'achat des fonctionnaires et des inactifs et entament directement la composante socialisée de la consommation. La ponction de ces mesures sur le potentiel de consommation des ménages est au total de 1,7% en 2014 puis de 1,4% supplémentaire en 2015.

Face à cela, le récent milliard de réduction d'impôts à destination des ménages les plus modestes ne représente que + 0,07% des dépenses privées et socialisées des ménages, une goutte d'eau. Pour être juste, il faut ajouter qu'en concentrant les baisses de charges sur les bas salaires, le gouvernement soutient aussi la consommation. Encore faut-il que les créations de petits jobs promises par les économistes dans le commerce, la restauration, la construction, les services à la personne soient à la hauteur des attentes.

Le non-encouragement de la construction

Sa politique de soutien à l'investissement logement est à nouveau emblématique de la confusion gouvernementale. L'essentiel a été axé sur le soutien à la demande, notamment à travers le contrôle des loyers de la loi ALUR. Idem pour le dispositif Duflot même s'il est un peu moins avantageux que le Scellier. Sauf que ces deux dispositifs découragent dans le même temps la construction et que du côté des mises en chantier, c'est la dégringolade : casser l'offre en soutenant la demande, c'est pour l'heure le bilan le plus tangible de la politique gouvernementale, derrière laquelle on peut craindre une grave erreur de diagnostic.

En jouant à la fois offre et demande, au détriment de la cohérence c'est finalement la croissance qui en pâtit et l'objectif de déficit qui devient hors de portée.

A la décharge du gouvernement néanmoins, si les pays européens les mieux portant appuyaient sur l'accélérateur de la demande pour offrir une bouffée d'oxygène à ceux qui sont au prise avec les besoin d'ajustement structurel les plus aigus, peut-être le gouvernement serait-il moins enclin à appuyer sur toutes les manettes à la fois.

>> Plus de vidéo sur le site Xerfi Canal, le médiateur du monde économique

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Commentaires 9
à écrit le 25/06/2014 à 17:00
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Comment peut on espérer des résultats intelligents alors que tout est géré selon les principes du clientélisme, du corporatisme et du réseautage de grandes écoles ? A aucun moment les décisions ne sont prises de manière pragmatique sur des critères r...

à écrit le 25/06/2014 à 16:34
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- 30 milliards sur les impots aux entreprises Et + 10 milliards sur les menages.. Et c'est un gouvernement socialiste ? Bizzare quand je demande autour de moi.. personne a voté PS mais ils ont tous vote Melenchon... Tiens ? Quand je vois le r...

à écrit le 25/06/2014 à 14:36
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Le gouvernement est en pleine panique...ils ne savent plus où donner de la tête. Le seul moyen de calmer les choses et de stabiliser la situation pour obtenir une nette amélioration serait de soutenir la demande par des augmentations de salaires (tou...

le 25/06/2014 à 14:50
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N'importe quoi. Pour augmenter les importations de produits chinois et augmenter encore en peu plus le ôût de la main d'oeuvre? C'est du chômage en plus. Chaque fois qu'on augmente les salaires, on augmente nos importations.

à écrit le 25/06/2014 à 13:59
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TOUT se dégrade. Il serait peut être temps pour l'UMP et le PS de rebalancer un peu sur les scandales en cours comme ils sont aussi nuls l'un comme l'autre.

à écrit le 25/06/2014 à 13:23
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la croissance reste le Graal de tous les gouvernants . Il veulent la croissance sans fumées , sans carbone ! Des illuminés . L avenir c' est de limiter les habitants au km² sur la planète et c'est très mal engagé .Puisque la mode est à la prospectiv...

à écrit le 25/06/2014 à 13:18
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Nous sommes en chute libre et on ne sait pas comment ouvrir le parachute; et pourtant, c'est écrit dans la notice; Cette notice c'est la note n°6 du conseil d'analyse économique. Vite.

à écrit le 25/06/2014 à 13:04
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Il faut agir progressivement car il faut atteindre un point d'équilibre entre offre et demande.

à écrit le 25/06/2014 à 12:58
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Si on veut favoriser l'offre, il faut défavoriser la demande à niveau constant, autrement dit, basculer la fiscalité du travail sur la fiscalité énergétique.

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