Pacte de responsabilité : à la recherche des contreparties...

Par Gilbert Cette, Pauline Gonthier et Martin Richer  |   |  627  mots
François Hollande et Pierre Gattaz, président du Medef
Alors que s'ouvre la conférence sociale, l'idée de contreparties aux allègements de charges accordés aux entreprises n'est guère débattue. Elle est pourtant essentielle. par Gilbert Cette, professeur d'économie à l'Université d'Aix- Marseille, Pauline Gonthier, rapporteure du groupe de travail 'Pacte de responsabilité' de Terra Nova et Martin Richer, coordonnateur du pôle "Affaires sociales" de Terra Nova

La réussite du pacte de responsabilité repose sur l'équilibre des engagements. C'est cet équilibre qui permet l'acceptation des efforts sans précédent demandés à tous dans la perspective de l'intérêt général, celui du redressement de notre pays. Or nous sommes frappés de constater que dans ses interventions publiques, Manuel Valls met à raison l'accent sur la nécessité des économies budgétaires et de l'allègement du coût du travail mais omet d'expliquer les mécanismes qui permettront d'en obtenir un impact positif sur le front de l'emploi. De ce fait, l'économie du pacte se résume à un allègement de charges de 30 milliards pour les entreprises «contre » des économies de 50 milliards pour l'Etat, les collectivités et les ménages ! Amputé d'une partie intégrante essentielle, le pacte apparaît ainsi comme un marché de dupes et prête le flanc aux critiques de tous bords...

Hollande avait proposé des contreparties: plus d'embauches, plus de dialogue social

Il est donc urgent de rappeler la formalisation du pacte, telle qu'elle a été énoncée initialement par François Hollande à l'occasion de ses vœux aux Français le 31 décembre 2013 : « Je propose un pacte de responsabilité aux entreprises, fondé sur un principe simple : moins de charges sur le travail, moins de contraintes sur leurs activités et, en contrepartie, plus d'embauches et plus de dialogue social ».

Dans une note intitulée « Réussir le pacte de responsabilité : pour une culture du dialogue économique et social », Terra Nova a formalisé quelques principes d'action simples permettant d'aboutir à la définition de contreparties « claires, précises, mesurables et vérifiables », quatre critères posés par le président de la République lors de ses vœux aux acteurs de l'économie et de l'emploi, le 21 janvier 2014.

Négocier au niveau des entreprises et des branches

Nous suggérons que les entreprises (et les branches pour les TPE et les PME de taille modeste) négocient la nature et le rythme des contreparties par un accord d'entreprise avec les représentants du personnel. Cet accord leur permet de devenir éligible aux allègements de cotisations sociales et pour ce faire, de déterminer les actions les plus pertinentes et adaptées à leur problématique : embauche, apprentissage, formation professionnelle, investissements productifs. Il met en place une commission de suivi, chargée d'analyser les réalisations au regard des engagements concertés. Dans chaque entreprise éligible, ce suivi s'appuie sur la base de données unique mise en place par l'ANI du 11 janvier 2013, utilisée comme tableau de bord des engagements. Une autre piste que nous proposons consiste à mettre à jour un site internet, à disposition des entreprises et de l'Etat, pour organiser la remontée des informations par branches et par territoires et formaliser le suivi national des résultats.

Consolider progressivement une culture du compromis

L'exigence dans la formalisation des contreparties est essentielle car au-delà de ses objectifs économiques, ce pacte est porteur d'une forte ambition sociale. Il doit être vu comme « un grand compromis social, peut-être le plus grand proposé depuis des décennies » (François Hollande, 14 janvier 2014). Au travers du processus de négociation des contreparties et de leur suivi, il vise à consolider progressivement une culture de la négociation et du compromis, de nature à favoriser un climat de confiance entre les acteurs économiques. Ce processus permettra d'évaluer le pacte de responsabilité à l'aune de ses résultats économiques tangibles. Mais c'est aussi l'énergie de mobilisation et de transformation des acteurs qui fera la différence.

Gilbert Cette, professeur d'économie à l'Université d'Aix- Marseille
Pauline Gonthier, rapporteure du groupe de travail 'Pacte de responsabilité' de Terra Nova
Martin Richer, coordonnateur du pôle "Affaires sociales" de Terra Nova