Manuel Valls, vigile de l'été ministériel

Par Jean-Christophe Gallien*  |   |  686  mots
Manuel Valls le sait, le mois d'août est propice aux dérapages politiques. D'où un contrôle étroit des ministres… Par Jean-Christophe Gallien, professeur associé à Paris Sorbonne*

 Les vacances des ministres sont décidemment très contrôlées par le couple François Hollande Manuel Valls.

C'est d'abord l'Elysée qui s'occupe de leur liberté de mouvement. Le Président de la République a décidé bien avant l'été que les ministres ne pouvaient couper avec leurs bureaux que deux semaines entre le 4 et le 18 août et qu'ils devaient s'en tenir à une destination à moins de 2h30 de Paris ! Et de son côté Manuel Valls s'occupe de leur liberté de parole voire d'activité ! Le Premier ministre communique officiellement qu'il a demandé à ses ministres, en vacances dans le Sud de la France, de ne pas participer aux spectacles de tauromachie.

Eviter toute dissonance

Manuel Valls ne veut prendre le risque d'aucune dissonance encore moins de polémique ni avec les défenseurs des animaux ni avec quelle corporation ou groupe de pression que ce soit à quelques semaines d'une rentrée politique qu'il annonce lui même comme très difficile. Des dernières semaines agitées et surtout, sa propre cote de popularité en baisse, peut-être même demain sa capacité d'autorité ? Et François Hollande qui ne remonte pas dans les sondages alors qu'un nouvel épisode UMP et Nicolas Sarkozy est attendu et que Marine Le Pen poursuit la croissance de son rassemblement.

Cette dimension très contrôlée du management de la narration et de l'action gouvernementale, c'est la signature de Manuel Valls. Rappelons nous que le soir même de l'annonce par François Hollande de sa nomination, toute trace de son prédécesseur avait disparu du site de Matignon laissant place au futur locataire et à une très présidentielle une de Manuel Valls.

Eviter la vacance du pouvoir de l'été 2012

Il semble recevoir le soutien du Président de la République qui recherchait dans son changement de chef du gouvernement l'autorité sur les ministres qui manquait cruellement à Jean-Marc Ayrault. En particulier, le chef de l'État conserve un souvenir cuisant de l'été 2012, durant lequel une forme de vacance du pouvoir lui avait été reprochée par l'opposition.

Pendant les vacances les ministres s'éloignent de leur bureaux et donc de leurs hiérarchie, de leurs équipes et collaborateurs ou conseillers extérieurs. Ils sont normalement plus libres de leurs mouvements, de leurs paroles et de leurs actes. Comme nous tous !

Le moment de tous les dangers

C'est ainsi que l'été est un moment de tous les dangers et août encore davantage. Voilà une période propice aux dérapages contrôlés ou non. Tout ce que ne peut supporter Manuel Valls adepte d'un strict contrôle de l'activité ministérielle. On découvre qu'il poursuit dans l'autorité même en période estivale ! Il ne s'agit pas seulement de la forme, du style ou du lieu des vacances, il s'agit aussi du contenu de la parole éventuelle et évidemment des actes.

Il est vrai que la course du Monde ne s'arrête pas, la et les crises non plus.

Plus de temps de "cerveau" disponible

Et contrairement aux croyances établies, au delà des premiers jours de distraction totale, nous avons plus de temps de « cerveau » disponible comme disait l'autre. Nous sommes nombreux à davantage consommer de l'information et surtout plus encore dans la dimension de l'échange et du débat avec les autres. Souvent nous sommes assemblés en famille ou entre amis. Nous sommes dans un temps du réel plus seulement du virtuel. Pas moins de twitter, ou de Facebook mais plus de temps pour des conversation réelles, autour de tables souvent festives. Plus de temps pour l'écoute ou la lecture de médias, de livres aussi et donc plus de temps pour approfondir et éprouver notre compétence politique, plus de vigilance aussi ? Un vrai terreau pour nourrir les exigences et donc les risques d'une rentrée difficile. Manuel Valls le sait et le craint.

*Professeur associé à l'Université de Paris 1 la Sorbonne, Président de j c g a, jcg@jcga.eu

Membre de la SEAP, Society of European Affairs Professionals