La France cancre de l'emploi ? C'est faux !

Par Olivier Passet, Xerfi  |   |  585  mots
Olivier Passet, directeur des synthèses économiques de Xerfi. / DR
Ebréchons quelques idées reçues sur l’emploi en France. Plus précisément sur la France, mouton noir des pays développés en matière d’emploi.

Partons de ce que l'on connaît le mieux. La piètre performance française en matière de chômage. Cette piètre performance sur laquelle se bâtit toute la rhétorique de l'échec français. Et qui fait du marché du travail français l'anti modèle de l'OCDE.

La barre des 7% de chômage

Concentrons-nous sur ces pays que nous envions pour leur capacité à naviguer régulièrement sous la barre des 7% de chômage et à rétablir plus rapidement que nous le plein emploi dans la crise. Autrement dit, l'Allemagne, le Royaume-Uni, les Etats-Unis, le Danemark, les Pays-Bas et la Suède, des pays qui s'imposent tour à tour comme modèles de régulation exemplaires. Gardons quand même un autre mouton noir, l'Italie, pour mieux saisir ce qui nous sépare des meilleurs et nous rapproche du pire.

De ces pays, nous envions la régulation, car elle leur permet de créer des emplois quand nos entreprises y rechignent cette fameuse désincitation à l'embauche que produirait notre enfer règlementaire, syndical et jurisprudentiel.

La dynamique d'emploi

Comparons d'abord nos dynamiques d'emploi depuis 2000 pour prendre la mesure du problème. La France se situe sans surprise plutôt en bas de l'échelle concernant sa performance de moyen terme mais elle n'a pas à rougir de sa performance  globale quand elle se compare aux États-Unis, à l'Allemagne ou encore aux Pays-Bas. Ce sur quoi elle pèche en revanche, c'est sur sa capacité à rebondir depuis 2010.

Mais entre les minijobs allemands, les contrats zéro heure en grande Bretagne, la montée du temps partiel, et nos propres emplois dégradés en France quel est le bilan véritable de ces créations d'emploi en termes de volume horaire de travail. Au fond, parmi ces pays, qui a créé le plus d'heures de travail ?

Et là, on peut voir que performance de la plupart des pays s'affaisse, ce qui montre l'incidence forte du partage du travail dans les performances récentes. La France figure plutôt en haut de l'échelle. Elle surclasse nettement l'Allemagne et les Etats-Unis compte tenu de la forte proportion d'emplois de petites durées dans ces deux pays. Bien des performances récentes sont aussi à relativiser au regard des dynamiques de moyen terme. Seuls Le Royaume-Uni et la Suède se démarquent positivement depuis la crise.

Le facteur démographique

Mais chacun de ces pays a des dynamiques démographiques différentes. C'est au fond la capacité à créer des heures de travail par personnes en âge de travailler qui permet de jauger la performance véritable des économies. Et là encore la France fait bonne figure en dépit de sa dynamique démographique. Elle surclasse cette fois ci très nettement les Etats-Unis mais aussi le Royaume-Uni sans parler de l'emblème de la flexi-sécurité qu'incarne le Danemark.

Certains sceptiques soupçonneront l'artifice des emplois administrés ou subventionnés, dans l'administration, l'action sociale, la santé ou l'éducation. Et là encore, il faut abandonner les idées reçues. Non la France est loin d'être la championne de ce type d'emplois. Il faut se tourner vers le Royaume-Uni ou les pays-bas pour trouver les plus fortes croissances dans ces secteurs fortement solvabilisés par la puissance publique.

 Alors, oui, la France est un piètre élève en matière de chômage  mais, paradoxe,  elle est loin d'être le cancre que l'on croit en matière d'emploi.