D'Isaac Asimov au web 4.0

Par Anne-Tania Desmettre  |   |  874  mots
Pour appréhender l'avenir de la relation entre les marques et ses clients, il faut se pencher sur l'évolution des technologies, de la naissance du web jusqu'à nos jours, et garder en mémoire les écrits de certains auteurs visionnaires. Par Anne-Tania Desmettre, Président de Bisnode France - www.bisnode.fr

Enfants, les quadras et quinquas d'aujourd'hui projetaient sur l'an 2000 des innovations qui, pour leurs parents, étaient pure science-fiction : les voitures voleraient, la lune serait à portée de main pour tout un chacun et la nourriture serait lyophilisée. Sur les tables de chevet trônait  Asimov, visionnaire, futuriste, et néanmoins tellement humain voire humanitaire, car il n'envisageait pas autrement la technologie qu'au service de l'humanité.

L'appréhension du bug de l'an 2000 une fois passée, la technologie maitrisée et les process sécurisés, le 1er janvier 2000 ressemble trait pour trait au 31 décembre 1999.

L'an 2000 n'a donc pas répondu à ces rêves d'enfants ? La vision d'Asimov était-elle si erronée que cela ? Pas tellement, finalement... L'avènement des premiers browsers grand publics et la multiplication des sites internet ouvrent bien la porte d'une nouvelle ère : celle du CRM... Le Customer Relationship Management, ou comment la marque va appréhender et apprendre à connaître ses consommateurs.

Asimov ne s'est pas trompé

Asimov ne s'est donc pas trompé, elle est bien en construction cette Encyclopédie qui rassemble le savoir de l'humanité. Son héros, Hari Seldon, quant à lui, en élaborant la psycho histoire, n'a-t-il pas préempté les neurosciences, le datamining et autres statistiques qui, du cœur de notre tant mentionné Big Data, permettent de faire émerger la lumière, pour nous marketeurs, la connaissance client.

14 ans plus tard, sous l'influence du web 1.0, puis 2.0 et 3.0, les actions marketing, d'abord centrées produit, se sont ancrées sur le client puis sur la valeur.

Cependant, récemment, une évolution s'est faite en parallèle. C'est l'émergence du  web 4.0. Ce que Joël de Rosnay, conseiller de la présidente d'Universcience, qualifie comme synonyme du « cloud computing » ou informatique en nuages. D'ailleurs, Wikipédia définit le cloud computing comme '(...) la mise en communication des différentes technologies telles que l'internet mobile, les environnements intelligents au service de l'être humain. Ce dernier est considéré comme l'acteur central dans tout ce maillage ou réseau de communication.'

L'être humain est l'acteur central, celui  qui décide

2015 voit donc naître le marketing 4.1, 1 pour individu sous toutes ses facettes. Qu'il soit chef d'entreprise ou non, homme ou femme, consommateur, célibataire, donateur, abonné multi-marques, ou encore multi-secteurs, son besoin est de gagner du temps, de l'efficacité, de la qualité.

La rupture du marketing est donc enfin là. C'est l'ère du consommateur, du V de Vendor Relationship Management* qui prend le prend le pas sur le C de Customer Relationship Management*. Peut-être un V de victoire pour le consommateur qui va reprendre le pouvoir. Car on peut raconter toujours la même histoire : « nous,  sociétés de marketing, sommes là pour aider les marques à véhiculer le bon message, à la bonne personne, au bon moment et de la bonne manière. »

Or, sincèrement, c'est du marketing cette phrase. Car, au final, seul le consommateur sait ce qu'il veut. Et comme, nous le savons parce que nous sommes tous des consommateurs, parfois nous faisons le contraire de  ce que nous voulions faire, nous achetons autre chose que ce que nous avions prévu. Nous achetons par nécessité, mais aussi par plaisir, par envie. Bref, l'achat est définitivement une pulsion, même pour une maison. Faisant fi des algorithmes prédictifs ou des analyses des historiques de navigation,  l'intention d'achat est et restera le puissant secret du consommateur... Et ce n'est pas Doc Searls** qui nous dira le contraire.

 Appréhender le consommateur dans toute sa complexité

Alors, non, notre alimentation n'est pas lyophilisée, mais personne ne le déplorera. Grâce à l'information et l'engagement de certains elle devient plus équitable, respectueuse de l'environnement et nous redécouvrons, si nous le choisissons, le goût. Alors non, les voitures ne volent pas mais, bijoux de technologie et de R&D, s'autonomisent, deviennent électriques et, pour certaines, en libre accès quand nous le souhaitons. Non, la lune n'est pas devenue une destination de voyage commune, mais le monde dans tous ses recoins est à portée de click. Quand, où et si nous le voulons.

Aussi, pour tirer le meilleur profit du marketing 4.1, la marque doit enfin appréhender le consommateur dans toute sa complexité et surtout accepter de lui rendre définitivement le pouvoir.

Du BigData découlera naturellement le ClevernessData

L'avenir de l'histoire entre la marque et son consommateur dépend alors de la capacité de celle-ci à comprendre qu'il achète de l'eau, des vivres, des vêtements, des livres, des bijoux. Finalement, l'univers du consommateur est l'univers de sa vie. Les marques qui auront franchi ce cap, traiteront alors intelligemment - Cleverness - la masse - Big - de données et informations  - Data - que le consommateur lui confie.

L'an 2000 n'est peut-être pas vraiment comme nous nous l'étions imaginés.  Mais le 3éme millénaire porte promesses, progrès et créativité avec l'enjeu majeur de garder l'individu au cœur cette nouvelle réalité. Clairement, 2015  sera VRM et ClevernessData pour les marques qui sont prêtes.

 *Berkman Center for Internet and Society - Project VRM

**Intention Economy, When Customers take Charge, Doc Searls, Harvard Business Review Press