Charlie-Hebdo : le storytelling de la terreur

Les professionnels de la terreur savent exploiter l'extrême sensibilité, voire la fragilité de nos sociétés, face aux images de l'horreur diffusées par tout un chacun. Jean Christophe Gallien, professeur associé à l'Université de Paris 1 la Sorbonne, Président de j c g a

Préparation méticuleuse, détermination habitée, ceux qui se sont attaqués à Charlie-Hebdo planifient toutes les dimensions narratives de leur acte. Il y a là un véritable storytelling de la terreur, une écriture médiatique précise et une mise en scène implacable.

Une fin de matinée, un mercredi, au cœur de la capitale de notre pays, des hommes frappent, à découvert, un média libre, un média symbole. Ils tuent des journalistes et des dessinateurs et aussi leurs protecteurs, des membres de nos forces de police.

Des spectateurs inconsciemment complices de la performance médiatique

Nos sociétés ultra-connectées, super équipées et à l'affut voyeuriste individuel et collectif fournissent un cadre prosélyte et viral mécanique aux acteurs de la violence scénarisée. Les auteurs savent qu'ils vont être filmés et diffusés instantanément. Ils jouent avec la désintermédiation digitale qui fait de chacun d'entre nous à la fois une caméra, un micro, un véritable correspondant d'opportunité, relayé, décuplé par des spectateurs inconsciemment complices de la performance médiatique, de l'audience de l'horreur.

Ils savent aussi qu'en cette fin de matinée, leur acte terrible va recevoir une couverture médiatique cette fois télévisuelle et radiophonique nationale, européenne et globale et marquer tous les esprits de Pékin à Los Angeles, de Londres à Johannesburg. Nos médias et leurs écrans démultipliés sont disponibles pour ces images et eux aussi en attente et avides d'un contenu spectaculaire et de ses suites potentielles.

La fragilité de nos sociétés face à ces images

Les professionnels de la terreur connaissent aussi le paradoxe de l'extrême sensibilité de nos sociétés, on devrait même utiliser le terme fragilité face à ces images et ces sons. Nous redoutons, régulièrement alertés par nos élites et gouvernements, des actions de cette nature. Cette fois, plus d'incertitude, pas de protection, nous sommes bien reliés au réel de ce Monde et nous sommes aussi vulnérables que les autres.

Coïncidence, ce matin même était enfin libéré le nouvel opus de Michel Houellebecq, Soumission. Une sortie elle-même ultra teasée et médiatisée par un marketing éditorial implacable, balayant tout sur son passage. Un roman qui provoquait jusqu'à l'attentat un raz de marée médiatique sur fond majoritaire de rejet.

Simple hasard ou encore une fois planning médiatique opportuniste d'une terreur à la narration précise et ultra contemporaine ? On se relie à un phénomène médiatique que l'on a anticipé pour augmenter sa propre performance, pour la dramatiser encore davantage. On lève une vague face à une autre vague. Une vague scélérate.

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 15
à écrit le 13/01/2015 à 17:12
Signaler
Peut-on dire que "storytelling"est la manière dont chacun parle d'un événement, le vie, Par rapport à l'histoire de l'événement? j'aicompri l'inquiétude de mr Hollande quand il a averti la presse , du danger de leurs déplacements en pays en guerr...

à écrit le 08/01/2015 à 20:13
Signaler
Ne vous en déplaise, l'affaire Charlie Hebdo relève de l'assassinat et non du terrorisme (dixit Prouteau ex-commandant du GIGN et plus simplement l'étymologie du terorisme). Les auteurs sont et ne sont QUE des assasins !

à écrit le 08/01/2015 à 16:46
Signaler
Le bon doc Gallien marque encore des points ! Notre équilibre voyeurisme exhibitionisme créé les conditions de l'audience permanente pour la terreur. Un livre doc !!!

à écrit le 08/01/2015 à 13:00
Signaler
Sentiment de malaise, et dégoût de moi-même, lorsque j'ai éteint la tv vers 2 heures du mat, zappant entre bfm et itélé qui repassaient en boucle les mêmes images de la mise en scène de"l'opération de police en cours à Reims" où intervenants et journ...

à écrit le 08/01/2015 à 11:41
Signaler
En particulier ceux qui jour après jour veulent installer le nouvel ordre mondial, cher, si cher à M. Attali.

le 08/01/2015 à 11:56
Signaler
lui ,il s'en fout, avec son passeport israelien, il a un plan B, nous, non....

à écrit le 08/01/2015 à 11:19
Signaler
Il s'agit ici d'une terreur à trois temps : 1. massacrer des innocents au nom de l'islam 2. demander pour les communautés musulmanes le statut de victime de l'islamophobie qui en résulte 3. renforcer ainsi le sentiment d'injustice des jeunes musu...

à écrit le 08/01/2015 à 11:19
Signaler
Non,notre société n'est pas fragile.Elle a plus d'espérance de vie que celle de l 'EI en Irak qui ne fera pas long feu.Il ne faut pas inverser la réalité

à écrit le 08/01/2015 à 10:03
Signaler
çà fonctionne bien en tout cas.. regarder monter les extremismes partout prouve l' efficience de la méthode. Cela à toujours fonctionné ainsi. le bon et seul ressort pour que les peuples sortent du pacifisme ordinaire et de l' antimilitarisme c' est ...

à écrit le 08/01/2015 à 9:55
Signaler
des hommes d' influence ... un grand film us décrit ceci cela..

à écrit le 08/01/2015 à 8:43
Signaler
On est bien d'accord la dessus, les médias sont, peut-être à leur corps défendant, les meilleurs alliés du terrorisme : ce sont les médias qui répandent la terreur. Et le terrorisme gagne quand les sociétés qu'il cible, les démocraties, se radicalis...

le 08/01/2015 à 8:57
Signaler
++++++++++++ ---------- tout à fait !

à écrit le 08/01/2015 à 7:53
Signaler
Que vont donc dire maintenant les bobos antiracistes antiislamophobes pilliers des émissions télé parisianistes ?Qui vont ils donc accuser pour dédouaner leurs alliés "modérés " auto proclamés ? Et la classe politique bien veule va- t-elle s'autocens...

à écrit le 08/01/2015 à 5:35
Signaler
L'appel au meurtre est interdit, et c'est juste. Quand une religion promet, à celui qui tue un infidèle ou un mécréant, sa place auprès de son dieu quoi qu'il ait fait auparavant n'est ce pas un appel au meurtre sous entendu ?

le 08/01/2015 à 8:37
Signaler
"Quand une religion promet, à celui qui tue un infidèle ou un mécréant, sa place auprès de son dieu " Vous parlez de la secte des Djihadistes ? Si vous nommez ça religion, il faudrait un peu nuancer, plutôt sectaire comme fonctionnement. Ils me font ...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.