Alerte au retour de l'euro fort pour l'économie française

La Tribune publie chaque jour des extraits issus des analyses diffusées sur Xerfi Canal. Aujourd'hui, alerte au retour de l'euro fort pour l'économie française

Autour de 1,20 contre le dollar, l'euro est redevenu une monnaie chère, d'autant que la devise européenne s'est aussi renchérie face aux autres monnaies. C'est ce que montre le taux de change effectif revenu à un niveau qui n'avait plus été observé depuis fin 2014.

Marges sous pression

Cela va sérieusement compliquer la tâche des entreprises françaises à l'export, principalement des industriels dont les marges vont être sous pression. Problème de compétitivité-coût, niveau de gamme trop faible, manque d'innovations... Les produits français sont devenus sensibles à l'effet devise. Conséquence, quand l'euro flambe, les entreprises compriment leurs prix et jouent sur leurs marges pour éviter d'être totalement hors concours sur les marchés extérieurs. Et inversement, quand il dégringole.

Il ne faut pas se mentir sur la remontée du taux de marge dans l'industrie : la faiblesse de l'euro y est pour beaucoup. Il suffit pour s'en convaincre de superposer l'évolution du taux de marge des industriels à celle du taux de change effectif réel (celui qui prend en compte et pondère l'ensemble des devises avec lesquelles la France commerce, et les évolutions différenciées d'inflation, puisque moins d'inflation accroît la compétitivité d'une devise). Quand l'euro s'affaiblit, le taux de marge se redresse, et il diminue quand il se renforce : le coefficient de corrélation est impressionnant depuis 2014 : -0,96.

La nouvelle tendance au renchérissement de la devise européenne, va donc se payer cash par des pourcentages de marge en moins. L'enchaînement peut devenir délétère. Pour éviter de sombrer, les exportateurs n'ont plus d'autre choix que de comprimer leur masse salariale (en gelant les salaires et les embauches) et de stopper aussi leurs investissements.

Un effet y compris sur la concurrence intra-européenne

L'euro fort met notamment sous pression les secteurs dont les contrats se signent en dollars. La construction navale, l'aéronautique, le spatial sont des cas d'école. Deuxième bloc, souvent oublié, celui des professions qui pour se développer à l'international sont contraintes de directement s'implanter dans les pays cibles. C'est le cas dans les services collectifs, la gestion des eaux et des déchets, les transports collectifs. Des entreprises comme Veolia et Suez Environnement sont à la tête d'un réseau de filiales directement implanté dans les pays. Dans la restauration collective c'est l'exemple de Sodexo, ou de Publicis dans la publicité. Autant de grands groupes dont les filiales génèrent des revenus en partie libellée en dollars et rapatriés à la maison mère.

Il ne faut en outre pas limiter l'analyse à l'activité de nos entreprises hors zone euro. Avec un euro fort, la concurrence devient également plus virulente en Europe notamment avec les industriels allemands et espagnols. L'industrie allemande a, en effet, beaucoup « outsourcé » les phases de production à moindre valeur ajoutée. Un euro fort limite donc la facture de leurs intrants. Quant aux entreprises espagnoles, elles s'ajusteront, c'est dans leur habitude, par la déflation salariale.

La pression est donc hors et dans la zone euro et il ne faut pas croire que seuls les exportateurs y sont soumis. Leurs fournisseurs aussi, donc les fournisseurs de leurs fournisseurs aussi, et de fil en aiguille c'est tout le tissu productif qui se trouve pris dans le piège des pressions déflationnistes. L'Etat aussi, car cela complique considérablement l'équation budgétaire. Le renforcement de l'euro, si cela continue, c'est le grain de sable qui pourrait bien faire dérailler la reprise. Cela ne serait pas la première fois.

 >> Plus de vidéos sur le site Xerfi Canal, le médiateur du monde économique

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Commentaires 2
à écrit le 11/09/2017 à 8:52
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Ben oui mais les actionnaires milliardaires veulent quand même remonter les taux d'intérêts et l'oligarchie européenne a décidé d'arrêter son plan de rachat de dettes. Autant dire que cela ne s'améliorera pas et avec les idéologues obtus que nous...

à écrit le 11/09/2017 à 8:27
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Ce qui est primordial, c'est la relation entre le cout du travail et le prix de l'énergie, mais les Français sont incapables de le comprendre!

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