Changement de nom : le brief caché de l'UMP

Par Alexandre Hurel  |   |  528  mots
Nicolas Sarkozy l'avait promis : l'UMP changera de nom en 2015. Selon les murmures médiatiques et compte tenu de son récent dépôt à l'INPI ('Institut national de la propriété industrielle), « Les Républicains » serait le nouveau nom du parti de l'opposition. Si l'adoption définitive de cette identité n'est à ce stade que conjecture, son passage en shortlist révèle de précieuses informations sur le repositionnement voulu par le chef du parti.Alexandre Hurel, spécialiste du naming chez Creads

Rappelez-vous. C'était il y a 2 mois. Des millions de français descendaient dans les rues pour parler d'une seule voix et clamer haut et fort les valeurs de la République.

En somme, l'union de millions de Républicains, dont chaque parti sera tenté de tirer la couverture à lui. Alors si l'on en croit les spéculations actuelles, l'UMP va-t-elle finalement devenir le parti de tous en opérant une stratégie de rebranding ?
Nous avons imaginé pour vous les trois directives données à une agence de communication pour la création cette nouvelle identité.

- Directive #1 « Réenchanter les fondamentaux »

Si d'un point de vue juridique on peut douter de l'exclusivité d'une appellation aussi générique, la droite semble bien décidée - du moins sur le plan symbolique - à s'approprier le monopole de la vertu républicaine. Car s'auto-proclamer républicain c'est aussi postuler que les autres ne le sont pas, ou le sont moins bien.

Mais plus qu'une audacieuse tentative d'association positive, "Les Républicains" marquent une réaction, une stratégie électorale face à la crise : c'est le retour aux valeurs fondamentales qui fera la différence, voter pour "Les Républicains", ce sera faire le choix de la stabilité des institutions, de l'intérêt général, du bien commun.

- Directive #2 « Ratisser large »

Plus moderne, "Les Républicains" est un nom qui sait flatter une génération de digital native habituée à se rassembler sous l'égide des réseaux sociaux ; et pour qui les individualités du groupe prévalent sur l'impersonnalité de l'organisation.

Mais encore ? En choisissant de désigner et nommer les membres d'un parti (et non le parti lui-même), la droite ne s'intéresse plus à la droite, mais à la cohésion, au rassemblement qui transcende la politique partisane, et pour ce faire cherche sa légitimité non plus par le leader, mais par les adeptes.

Il n'est plus ici question de parti, d'union ou de mouvement, mais d'une tribu ouverte qui se définit avant tout par ses membres et ce qu'ils partagent : une certaine idée de la République.

- Directive #3 « Donner le sentiment du pouvoir »

Qu'on ne s'y trompe pas, sous une apparence conservatrice "Les Républicains" a une longueur d'avance : l'heure est au collaboratif, le pouvoir métaphoriquement rendu à l'individu. On ne traite plus avec un parti "monolithe impersonnel" mais d'une somme d'individualités qui co-construisent.

L'engagement n'en est que plus fort puisque donner son suffrage aux Républicains, c'est voter pour une idée que l'on a soi-même conçue. On n'adhère pas à un programme, on le crée à plusieurs, et de là les victoires comme les échecs seront collectifs, l'électeur est responsabilisé et la part du décideur minimisée.

Alors les électeurs seront-ils sensibles à ce nouveau souffle voulu par la droite ? "Amalgamer pour mieux régner" sera-t-il le slogan politiquement incorrect de cette nouvelle dénomination UMP ? Reste donc à savoir quel sera le contrat républicain proposé par ce nouveau parti s'il voit le jour, car s'il est une idée qui admet plusieurs degrés de lecture, c'est indubitablement la République.