Chine-Covid-19 : nous n’oublierons pas

Par Michel Santi  |   |  605  mots
Michel Santi. (Crédits : DR)
OPINION. La Chine a bénéficié durant ces dernières décennies des apports des pays occidentaux qui l'ont aidée à se développer. Mais aujourd'hui après les mensonges sur les débuts de la pandémie du coronavirus, la confiance est brisée. Par Michel Santi, économiste(*).

C'est l'engagement envers la Chine de ce qu'il est convenu d'appeler la
communauté mondiale qui lui permit, au fil des décennies, de réussir ses
réformes. La normalisation des relations entre les Etats-Unis et la Chine,
inaugurée en 1979 par le Président Carter, fut en effet le point de départ
d'une dynamique d'ouverture et d'initiatives réformatrices initiées dès lors
par Deng Xiaoping. La montée en puissance, ces 40 dernières années, de cette
nation a été entièrement redevable aux transferts de technologie, aux
échanges commerciaux, aux investissements massifs  - et pas seulement
financiers mais également éducatifs - consentis par l'Ouest. Cet édifice,
cet enchevêtrement de relations et d'intérêts, fut construit année après
année, quasiment à la force des poignées des diplomates, des politiques, des
universitaires et des financiers.

Intégration au sein de l'OMC

Moins d'une décennie après la tragédie de la Place Tiananmen, le Président
Clinton prit néanmoins sur lui d'intégrer la Chine dans le club de
l'Organisation mondiale du commerce (OMC), voie royale qui l'autorisera une
quinzaine d'années plus tard à se hisser au rang de seconde économie
mondiale. Les dirigeants chinois successifs, emmenés par Deng, prirent les
décisions qui s'imposaient, non seulement pour tirer des centaines de
millions de leurs citoyens de la misère, mais également pour rendre à leur
pays la place de premier plan qu'il mérite au sein du concert des nations.
Les fondations étaient effectivement bien établies, car le préalable crucial
à toute intégration dans le système international est un ingrédient vital
qui s'appelle la confiance, en l'absence de laquelle la Chine n'aurait
jamais pu parcourir tout ce chemin.

Les lanceurs d'alerte châtiés

Aujourd'hui, cette confiance est brisée - ou à tout le moins très
sérieusement remise en question - par la pandémie du coronavirus. Et le
point de départ de ce virus importe peu, car c'est bien le secret voire les
mensonges des autorités chinoises qui ont compromis la santé (physique et
mentale), la sécurité, la stabilité économique et des citoyens chinois et du
monde entier. Soucieux uniquement de paraître toujours en contrôle, le
pouvoir chinois n'hésita pas en effet  - dès le tout premier jour de l'année
2020 - à châtier les lanceurs d'alerte ayant eu à cœur de prévenir le monde
sur la dangerosité de ce virus, qui furent accusés de «répandre de fausses
rumeurs» et de «gravement perturber l'ordre public». La Chine aurait ainsi
pu s'éviter et nous éviter 95% des infections liées au coronavirus si elle
avait reconnu publiquement l'épidémie et réagi trois semaines plus tôt,
selon les conclusions d'une étude menée par l'Université de Southampton.

Lourd passif en matière de transparence

Mais pourquoi en être surpris ? Les dirigeants de ce pays n'ont-ils pas un
lourd passif en matière de transparence, n'ont-ils pas l'habitude de «tuer
le messager» ? Le SARS-CoV - qui a fait plus de 8.000 morts dans une
trentaine de pays - n'avait-il pas été tenu secret pendant plus d'un mois et
n'avait-il pas valu près de deux mois de prison aux médecins chinois qui
avaient alors tenté d'en informer le monde ? Rien ne sera - rien ne pourra -
plus être comme avant avec la Chine, lorsque cette pandémie aura été
domptée, car ce pays ne s'est pas montré à la hauteur de ses responsabilités
de puissance mondiale.

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(*) Michel Santi est macro économiste, spécialiste des marchés financiers et des banques centrales. Il est fondateur et directeur général d'Art Trading & Finance.

Il vient de publier «Fauteuil 37» préfacé par Edgar Morin

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