Compétitivité de l'aérien : le gouvernement sur la mauvaise piste

En mettant l'accent sur les correspondances au départ de Roissy, le gouvernement se trompe dans son approche de la compétitivité du transport aérien. Mieux vaudrait revoir le système de taxe, en imposant les avions plutôt que les passagers. Par François Bacchetta, directeur Général d'easyJet pour la France

Le modèle low-cost sur le segment du court courrier aérien a fait irruption il y a 20 ans en France. Il est aujourd'hui plébiscité par les consommateurs et reconnu par les décideurs politiques comme une innovation économique remarquable. Suscitant dans un premier temps des craintes essentiellement psychologiques dans un pays qui redoute les changements radicaux, le transport low-cost a depuis gagné ses galons de respectabilité et représente désormais le seul segment dynamique dans le transport aérien qui pourrait permettre d'atteindre l'objectif d'accueillir 100 millions de touristes en France en 2020.

Le trafic point à point beaucoup plus créateur de valeur que les correspondances

Pour y parvenir, il faut toutefois sortir du penchant actuel qui consiste à concentrer l'ensemble de l'énergie réformatrice sur la compétitivité des vols long courrier avec correspondance et du hub parisien. Créer les condition d'une pénétration plus rapide en France du trafic point à point, dont la contribution à la création de richesse globale est largement sous estimée, est indispensable pour le développement du trafic.
Sur le segment des vols intra européen, les vols directs représentent en effet 45% de la contribution du transport aérien au PIB européen, contre seulement 0,4% pour un vol indirect avec correspondance. De même, si l'on regarde les mouvements entre l'Union Européenne et les autres pays, les vols directs contribuent à hauteur de 40% contre 15% pour les vols indirects

Le gouvernement veut seulement alléger la taxe des passagers en transfert à Roissy


Et pourtant, parmi les différentes pistes proposées par Bruno Le Roux dans son rapport sur la compétitivité du secteur aérien, une seule a été retenue par le gouvernement : celle d'alléger la taxe pour les passagers en transfert à Roissy CDG. C'est à la fois symptomatique du "hubtropisme" décrit plus haut et surtout insuffisant pour véritablement dynamiser le trafic, soulager les compagnies et améliorer l'attractivité de nos destinations. Un paradoxe, quand on sait que 70% du trafic est constitué par des vols directs essentiellement européens.

Faire payer les avions plutôt que les passagers


Si certaines solutions, comme le transfert de la taxe d'aéroport au budget général, ont été écartées pour des raisons évidentes de déséquilibre budgétaire, il existe un consensus sur des mesures finançables et de bon sens. Faire basculer la taxe de l'aviation civile perçue par la DGAC, et une partie de celle finançant la sécurité, sur les avions plutôt que sur les passagers, permettrait une stimulation mécanique du trafic et la possibilité de développer à terme un outil fiscal plus vert.
Une telle mesure stimulerait mécaniquement la compétitivité des compagnies puisque celles ayant les taux de remplissage les plus élevés paieraient moins de taxe par passagers que les autres. En y ajoutant ensuite une modulation des taxes selon l'âge et le type d'avion, l'Etat inciterait les compagnies à se doter d'appareils modernes, plus silencieux et moins polluants, permettant à terme de préserver les conditions de vie des riverains tout en conciliant le développement économique et touristique des aéroports.
À la clé, c'est l'essor de véritables aéroports d'intérêt général, vecteurs de croissance, et la création d'emplois, au service du rayonnement des territoires, que nous pouvons espérer.

François Bacchetta
Directeur Général d'easyJet pour la France

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Commentaires 2
à écrit le 11/06/2015 à 16:59
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Avant, on avait O'Leary dans le rôle du "je dis n'importe quoi, et la presse reprend"; maintenant, lui s'y met. C'est une compétition ?

le 11/06/2015 à 19:16
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Il faut vivre avec son temps pour comprendre !

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