Elections françaises  : la compétitivité des entreprises suffisamment prise en compte  ?

Par Clémentine Gallès  |   |  474  mots
(Crédits : DR)
OPINION. La poursuite du creusement du déficit commercial est - avec celle du déficit public - une des conséquences de la bonne résilience de l'économie française de ces dernières années. La hausse récente des prix de l'énergie ne fera qu'alourdir la facture et rend d'autant plus crucial d'aborder cet enjeu économique dans les débats électoraux. Par Clémentine Gallès, Cheffe Économiste et Stratégiste de Société Générale Private Banking

A moins de 10 jours du premier tour des élections présidentielles, les débats entre candidats auront été largement évincés par l'actualité de la guerre en Ukraine et par une entrée en campagne tardive du Président sortant dont la réélection au dire des sondages semble acquise. Pour autant, les enjeux économiques auxquels devront faire face la nouvelle majorité sont bien présents et mériteraient d'être abordés dans le nouveau contexte géopolitique. La question de la compétitivité des entreprises françaises est emblématique de ces enjeux.

Une tendance de long terme de dégradation du déficit commercial français

Si la France reste une importante puissance exportatrice (au 5ème rang mondial sur l'ensemble des biens et services), son solde commercial se creuse progressivement depuis plus de 20 ans.

Cette dégradation reflète plusieurs phénomènes : une consommation française particulièrement dynamique, une forte dépendance aux importations d'hydrocarbures (cf. graphique 1), mais aussi une perte de compétitivité des entreprises françaises par rapport à celles des partenaires commerciaux de la France. Cette perte de compétitivité est particulièrement visible du côté de la production des biens et s'est accompagnée d'une baisse importante de la taille de l'industrie française.

Pendant longtemps, l'explication principale était un coût du travail plus élevé en France, mais ce n'est plus le cas depuis déjà quelques années. En effet, au cours des années 2000-2010, la perte de compétitivité de l'industrie française s'expliquait par un coût du travail particulièrement élevé du fait de l'importance de son système social (retraites et sécurité sociale).

Différentes réformes ont été mises en place depuis, dont le CICE (Crédit d'Impôt pour la Compétitivité et l'Emploi) entré en vigueur en 2013, et ont permis d'inverser cette tendance. Pour autant l'affaiblissement de l'industrie française a généré une perte de compétitivité au-delà des coûts. En effet, la réduction des investissements en R&D et en formation a progressivement créé un déficit de compétitivité hors coûts.

En quoi la guerre en Ukraine change la donne ?

La crise sanitaire prolongée a été particulièrement sévère pour l'industrie française compte tenu la spécialisation de celle-ci (aviation, armateurs, tourisme). Aujourd'hui, la hausse des coûts de l'énergie affecte en premier plan les entreprises industrielles européennes, davantage dépendantes de l'énergie russe (cf. graphique 2).

Au sein de l'Europe, les entreprises françaises s'avèrent un peu moins affectées par cette hausse des coûts. Le mix énergétique de la France les rend en effet moins dépendantes du gaz russe. Par ailleurs elles bénéficient de soutiens publics conséquents pour amortir le choc.