Et si 2021 était une chance pour la France ?

Par Laurence Daziano (*)  |   |  706  mots
Laurence Daziano.
OPINION. Les bouleversements entraînés par la pandémie ont réinterrogé notre manière de vivre. Si nous savons en tirer les enseignements, ils nous permettront de mieux préparer notre avenir. (*) Par Laurence Daziano, maître de conférences en économie à Sciences Po, est membre du Conseil scientifique de la Fondapol.

L'année 2020 a remis en question un certain nombre de certitudes des Français : nous croyions notre système de santé efficace. Il se révèle incapable de gérer une épidémie et en manque de biens élémentaires, des masques au printemps aux vaccins cet hiver, sans parler du paracétamol rationné. Nous croyions qu'il n'était possible de travailler qu'au bureau, nous découvrons que beaucoup, dans une économie fortement tertiarisée, peuvent également travailler de leur domicile. Nous ne voyions pas un certain nombre d'emplois mal considérés et mal rémunérés. Ils se sont révélés essentiels dans la crise que nous traversons, à l'image des infirmières, des énergéticiens, des salariés des secteurs de l'eau et des déchets, des livreurs...

Déclassement de l'Occident

Mais la pandémie de la Covid-19 a aussi eu un autre effet. Elle a révélé le déclassement relatif de l'Occident par rapport à l'Asie, y compris la Chine, sans même évoquer les multiples fronts militaires ouverts par les « compétiteurs » des Occidentaux, de la Libye au Haut-Karabakh, qui ont vu le recul permanent des démocraties. 

Pourtant, si nous réussissons à ne pas regarder uniquement dans notre passé, les leçons de l'année 2020 peuvent être immenses pour lancer une décennie de croissance et bénéficier de toutes les potentialités offertes par la crise. Cette pandémie est en effet l'occasion de réinterroger notre manière de vivre et de préparer notre avenir. Les plans de relance, aux Etats-Unis et en Europe, sont une formidable occasion d'investir dans des secteurs qui portent les infrastructures de long terme : l'énergie, les transports, le numérique, l'éducation et la santé. Pour préparer l'avenir, il ne s'agit pas, pour la France, d'investir dans la vieille économie de rente ou dans les entreprises zombies, mais d'anticiper les secteurs de transformation de notre économie.

La transition écologique est le second défi majeur de la prochaine décennie. Le confinement a entrainé au niveau mondial une baisse de 7% de l'émission de gaz à effet de serre. Désormais, il faut pouvoir conjuguer un cycle de croissance avec une décarbonation de l'économie qui va investir tous les secteurs productifs. Le défi énergétique est évidement au premier rang des préoccupations, notamment en France avec le développement des énergies renouvelables mais également les nécessaires investissements dans la filière nucléaire.

La centralité du secteur numérique

Le secteur numérique a également montré son caractère central dans nos sociétés : télétravail, téléconsultation avec le médecin généraliste, télé-enseignement pour les élèves du primaire aux étudiants de l'université, loisirs avec les plateformes de jeux et de streaming, développement du commerce en ligne et des livraisons à domicile... Pour répondre à ce besoin, deux défis se posent en 2021 : les infrastructures de communication, avec le déploiement de la 5G, et le contrôle des géants du numérique. Et ces deux défis sont mondiaux. Le déploiement de la 5G est l'otage de la guerre commerciale entre les Etats-Unis et la Chine, avec les sanctions imposées par Washington sur certaines entreprises, notamment Huawei. Quant au contrôle des GAFA en Occident ou des BATX en Chine, les moyens diffèrent, mais le tournant semble pris avec des offensives multiples des autorités de régulation, voire des plaintes de certains États fédérés aux Etats-Unis.

Alors que l'année 2019 s'achevait, le débat tournait autour de la fin de la mondialisation, de l'échec de l'OMC, de Donald Trump et du déclin du commerce international. En 2020, après l'élection de Joe Biden à la Maison Blanche et la pandémie de Covid-19, le monde s'est transformé. 2021 est l'occasion de tirer le meilleur parti de ces transformations, en permettant à la France de s'insérer pleinement dans la mondialisation, tout en défendant ses intérêts et ses frontières. C'est dans ce double équilibre que le destin français pourra à nouveau se réaliser pour créer de la valeur « durable ».