Faut-il craindre une hausse des taux pour l’immobilier ?

Par Alexandre Mirlicourtois, Xerfi  |   |  607  mots
Alexandre Mirlicourtois, directeur de la conjoncture et de la prévision de Xerfi./ DR
La Tribune publie chaque jour des extraits issus des analyses diffusées sur Xerfi Canal. Aujourd'hui, faut-il craindre une hausse des taux pour l’immobilier ?

Les meilleures histoires ont toujours une fin. Celle de la baisse des taux immobiliers semble à son épilogue. Dans les faits pourtant, les taux proposés sont toujours au plus bas. Selon la Banque de France, le taux effectif des crédits immobiliers, soit le taux moyen qui donne une vision d'ensemble du marché, est tombé à 2,33% en avril. C'est son plus bas niveau depuis la création de cette statistique en janvier 2003.

Un taux divisé par 2,5 quasiment depuis décembre 2008

Les premières informations en provenance du baromètre Crédit logement/CSA montrent que la baisse des taux a joué les prolongations jusqu'en mai. Depuis, les annonces de LCL, puis emboitant le pas, d'autres réseaux bancaires nationaux ou régionaux, montrent bien que la vague de baisse se termine.

Ce changement de tendance n'a rien d'anormal car les banques doivent composer avec le renchérissement de leur matière première qui est le coût de l'argent sur les marchés. Pour faire bref, il existe un lien très direct entre les taux d'emprunt d'Etat à 10 ans (c'est à dire les taux avec lesquels la France emprunte) et le barème appliqué par les établissements financiers sur le crédit immobilier.

Le passage brutal de l'OAT à 10 ans de moins de 0,4 à près de 1,4% entre la mi-avril et la mi-juin peut donc inquiéter. Faut-il pour autant tirer le signal d'alarme ? Il faut d'abord prendre un peu de hauteur.

Une vision trop microscopique masque la tendance de fond

Même en hausse, l'OAT à 10 ans reste exceptionnellement bas. Quant au risque d'un scénario noir d'un krach obligataire nous le rejetons à Xerfi : parce que les Banques centrales sont prudentes, parce que les émissions totales d'obligations diminuent aux Etats-Unis comme dans la zone euro alors que la demande d'actifs sans risque reste importante, parce que les liquidités restent abondantes avec le quantitative easing au Japon et dans la zone euro.

Alors oui les taux peuvent « se hausser » jusqu'à 1,5%, maximum 2%, d'ici six mois à 1 an avec des perspectives de croissance en hausse en France et dans la zone euro et des anticipations d'inflation qui se normalisent peu à peu.

Les taux reviendraient à leurs niveaux de la mi-2014

On parlait alors de niveau historiquement bas. Surtout, il faut se méfier des effets d'annonce. Sur un marché du crédit extrêmement concurrentiel où les courtiers et les sites de comparaison jouent un rôle central, et mettent sous pression les établissements bancaires, remonter brutalement ses tarifs serait un jeu très dangereux. La demande de crédit à l'habitat est forte et les chiffres de production sont sans appel : avec 15,2 milliards d'euros distribués en avril les montants accordés grimpent à plus de 55 milliards sur les 4 premiers mois de l'année,  en hausse de 36% sur les 4 derniers mois de 2014 et de 47% sur le 1er quadrimestre de l'année dernière.

Et cette déferlante n'a visiblement pas fait de pause en mai comme le montre l'enquête de la Banque de France.

La demande de crédits à l'habitat est toujours perçue en hausse par les banques et elle retrouve des niveaux comparables à ceux d'avant crise. Dans cette même enquête, les banques déclarent même ne pas durcir leurs condition d'octroi et réduire leur marge Non les taux ne vont pas remonter en flèche, la hausse sera limitée et même profitable aux marchés de l'immobilier car elle va paradoxalement précipiter les futurs accédants à accélérer le mouvement pour profiter des dernières bonnes affaires.

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