Hollande et la réforme : l'arroseur arrosé

Par Marc Guyot et Radu Vranceanu  |   |  587  mots
La gauche et la droite ne doivent s'en prendre qu'à elles mêmes si les Français refusent le libéralisme. Par Marc Guyot et Radu Vranceanu, professeurs à l'ESSEC

Manifestations de rue, violences urbaines, destructions d'infrastructures publiques, vandalismes des vitrines de magasins et de banques, piquets de grèves, et enfin blocages des raffineries et assèchement des stations d'essence, voici l'image de la France que découvre - mais est-ce une découverte - le reste du monde. Outre ce déchaînement d'émotions et de violences, ce qui est également sidérant est la cause avancée par les auteurs de ces troubles à l'ordre public. En effet, la réforme initiale du droit du travail a été largement vidée de son contenu. Dans sa version actuelle telle qu'adoptée par le parlement, la nouvelle loi introduit des mesures limitées qui autorisent les entreprises en situation difficile à procéder à des ajustements négociés des effectifs, des horaires et de salaires.

Empêcher le « monstre libéral » de passer

En réalité, les protagonistes réagissent au principe même d'une telle réforme, indépendamment de son contenu effectif, car elle viole un tabou ancré depuis plus de 50 ans dans les mentalités politiques et populaires, selon lequel la flexibilité du marché du travail élimine à terme le chômage. Le refus de cette idée s'inscrivant au niveau émotionnel et identitaire, le fait que le chômage de masse persiste en France alors qu'il diminue dans les pays qui se sont réformés, ne pèse rien. Faut-il encore une fois rappeler que notre taux de chômage est le double de celui des Etats-Unis ou de l'Allemagne et que le chômage qui était élevé en Italie et en Espagne est en baisse depuis l'adoption des réformes du marché du travail?

Il y a un déni total, qui fait que la cause du chômage massif et de l'exclusion provient non plus de réalités structurelles et économiques, mais des émotions infantiles de leaders syndicaux prêts à tout brûler et tout détruire pour empêcher le « monstre libéral » de passer. Le seul aspect pragmatique que l'on pourrait trouver est la défense de rente de situation de travailleurs surprotégés et qui entendent le rester. Mais cela ne concerne pas la meute d'étudiants endoctrinés qui détruisent ou incendient des voitures de police, ni le rejet populaire apparent de la réforme.

Une conversion difficile au libéralisme

Le parti socialiste au pouvoir qui voit ses permanences attaquées et sa parole tomber dans le vide ne peut s'en prendre qu'à lui-même. En effet, il a trop longtemps prospéré sur ce fond idéologique anti-libéral pour escompter que son virage vers l'économie de marché soit suivi comme un seul homme par son électorat et celui de ses alliés d'extrême gauche.

L'opposition de droite qui a pris le même virage et qui campe actuellement sur une position ouvertement libérale tombe sous la même critique. Ses sympathisants ne vont pas se convertir du jour au lendemain à quelque chose que la droite et l'ancien Président de la République a longtemps présenté comme étranger à la France.

Le gouvernement actuel, arroseur arrosé, n'a pas d'autres choix, que de faire respecter la loi et restaurer l'ordre républicain, garantir la liberté de mouvement et de travail, et persister dans sa volonté timide de réformer le marché du travail. Ce premier pas est vital pour commencer à inverser l'endoctrinement collectiviste et donner un espoir d'intégration à la société aux exclus du monde du travail.