Il est l'or mon Sénior  !

Par Corinne Imbert et René-Paul Savary  |   |  620  mots
Corinne Imbert et René-Paul Savary (Crédits : DR)
TRIBUNE. L'allongement de la durée de travail oblige les séniors à travailler plus longtemps. Or en France, depuis les années 1970, les politiques en entreprise favorisaient les départs des plus âgés pour laisser la place aux plus jeunes. C'est ce schéma qu'il faut changer, notamment au sein des entreprises qui doivent prendre davantage en compte cette place des séniors. Par Corinne Imbert, sénatrice de Charente Maritime, et René-Paul Savary, sénateur de la Marne.

La France est aujourd'hui confrontée à un mouvement social d'ampleur contre la future réforme des retraites. Historiquement, ce sujet épineux a toujours suscité des réactions enflammées de la part du monde syndical. En raison des évolutions démographiques, l'allongement de la durée de travail apparaît aujourd'hui comme nécessaire et impératif. L'un des sujets annexes à cette question de l'âge de départ en retraite demeure la thématique de l'emploi des seniors.

Premiers sacrifiés

En effet, il apparaît difficile de combiner un allongement de la durée de travail alors que dans le même temps les séniors peinent à trouver du travail et sont régulièrement les premiers sacrifiés lors des réorganisations d'effectifs dans les entreprises. Il convient tout d'abord de lever toute ambiguïté sur l'idée selon laquelle l'emploi des seniors empêcherait l'emploi des nouvelles générations. Au contraire, la présence de séniors dans une entreprise participe à son développement, en complémentarité des compétences apportées par les nouvelles générations. Cette idée qui émerge actuellement a été bafouée à partir des années 1970. Durant les 30 années qui suivirent, les pouvoirs publics et les partenaires sociaux ont privilégié le retrait des seniors du marché du travail, afin de favoriser l'emploi des autres tranches d'âges. Toutefois, à la fin du XXe siècle et face au phénomène de vieillissement de la population, l'objectif de maintien et de retour à l'emploi des seniors a été mis en place et perdure jusqu'à aujourd'hui dans l'ensemble des politiques gouvernementales du XXIe siècle. Malgré cette volonté politique, certains préjugés perdurent : difficultés à manager les seniors, coûts, temps restant à travailler dans l'entreprise... Or, selon des enquêtes récentes, une grande majorité des seniors se dit prête à revoir leurs rémunérations à la baisse et à changer de fonction.

Plusieurs dispositifs

Il existe actuellement des dispositifs visant à maintenir les seniors sur le marché du travail : CDD senior, parcours emploi compétences, contrat de professionnalisation. De la même manière, des dispositifs de formation ont été mis en place ces dernières années afin de faciliter l'adaptation aux évolutions du marché du travail : reconversion ou promotion par l'alternance, validation des acquis de l'expérience, bilan de compétences. Enfin, plusieurs mesures ont été décidées afin d'inciter le travail des seniors chez certaines catégories socio-professionnelles : cumul emploi-retraites, surcote, retraite progressive. Malgré l'ensemble de ces dispositifs, le taux d'activité des 60-64 ans se situe en dessous la moyenne européenne. Aussi, il conviendrait d'encourager les entreprises ayant développé de bonnes pratiques en matière d'emploi des seniors en créant un label destiné à récompenser ces initiatives. De plus, les seniors sont les grands oubliés du plan d'investissement dans les compétences (PIC). Il est nécessaire de corriger cette situation. De la même manière, il serait judicieux de créer un abondement spécifique du compte personnel de formation pour les salariés perdant leur emploi après 45 ans. Enfin, et on ne le redira jamais assez, il est fondamental de développer un accompagnement spécifique vers l'emploi des demandeurs d'emploi âgés.

Changer de paradigme

Au delà des diverses mesures d'ordre législatif qui pourraient être mises en place par le politique, ce changement nécessaire de paradigme ne se fera qu'avec un changement de regard sur les séniors. Aussi, gardons toujours en mémoire les mots d'Albert Einstein qui nous rappellent l'importance du temps qui passe pour le développement des individus : « La connaissance s'acquiert par l'expérience, tout le reste n'est que de l'information ».