L'Etat obèse : les vrais gisements d'économies

Par Olivier Passet, Xerfi  |   |  759  mots
La Tribune publie chaque jour des extraits issus des analyses diffusées sur Xerfi Canal. Aujourd'hui, les vrais gisements d'économies pour les dépenses publiques.

La France a un état corpulent. C'est un constat. Il pèse lourd dans le PIB. Mais est-ce du muscle ou de la graisse ? A l'heure de la cure d'amaigrissement, il est important de bien identifier les vraies zones d'inefficacité de la sphère publique.

Le surpoids de la France, manifeste lorsque l'on compare les dépenses françaises à celles de la zone euro ou des États-Unis, est d'abord une question de périmètre, liée au fait que nos modes de gestion et nos circuits de financements sont publics. Ce n'est pas gage d'inefficacité a priori.

Prenons les choses par grandes masses et par grandes fonctions. La comptabilité nationale nous permet de comparer les moyens financiers mobilisés par les différents États.

Administration centrale : peut mieux faire, mais

D'abord dans la fonction d'administration, au niveau central et local - disons la bureaucratie au sens pur -, la France figure plutôt en haut de l'échelle. Mais loin de l'enfer kafkaïen si souvent décrié et proche de la moyenne européenne. Car les pays d'Europe du Nord (Danemark, Suède, Finlande, notamment) aiment l'administration à visage humain. Ils mettent notamment le paquet sur les services publics de l'emploi. Et ceux du Sud nous surpassent nettement en termes de suradministration. Il y a là, c'est probable, des marges de progrès. Et c'est clairement un domaine où le numérique peut aider à l'effort de rationalisation.

Sur les fonctions régaliennes d'ordre, de sécurité, de justice ou de défense, rien à signaler. Si ce n'est que nous appartenons au club fermé des pays ayant une dissuasion nucléaire et des moyens de projection. C'est un choix stratégique.

Education, santé : avant tout une question d'organisation et d'allocation

Prenons maintenant les deux grandes fonctions stratégiques poids-lourds que sont l'éducation et la santé. Clairement, nous surplombons ici la moyenne européenne. Mais nos choix de modes de gestion jouent ici un rôle décisif. Nos choix institutionnels allègent-ils globalement la facture ? Ce n'est pas probant. La santé coute globalement assez cher en France, rapportée au PIB. C'est moins vrai pour l'éducation. Et ce que montrent aussi les chiffres, c'est que les moyens humains mobilisés dans ces grandes fonctions, quels que soient leur mode de financement, ne sont pas particulièrement élevés en France, c'est un euphémisme. L'emploi dans la santé et dans l'éducation confirme ce que nous disent les statistiques de nombre de médecins hospitaliers par habitant ou de nombre de profs par classe. Les effectifs ne sont pas pléthoriques et ces professions sont plutôt sous tension, et parfois en sous-effectif.

L'efficacité dans ce domaine, ce n'est pas de couper les moyens, de rationner l'emploi, mais de mieux le répartir, mieux le former, mieux l'organiser. Et si ces fonctions coutent cher, c'est aussi qu'elles sont ankylosées par une couche d'administration et de bureaucratie, de métiers périphériques de soutien, restauration, etc. Bref, il n'y a pas d'économies à faire dans ces deux grands domaines stratégiques. Ce qui ne dispense pas d'améliorer l'organisation et l'allocation des moyens.

Transferts sociaux et aux entreprises : la vraie source d'économies

En fin de compte, ce sont bien sur les postes de transfert que l'Etat a le plus à gagner en termes d'efficacité. Mais la tâche doit être menée avec discernement. Dans la fonction affaires économiques notamment, qui comprend les charges d'intérêt, les subventions et le crédit d'impôt. La transformation du CICE (comptabilisé en dépense fiscale) en baisse de charges va déjà réduire mécaniquement de un point l'écart avec les autres pays. Mais il est clair que nos niches et subventions sont bien la contrepartie d'une fiscalité inefficace, dont on répare les excès à coup de subventions et aides diverses.

Il y aussi la question du soutien et de l'aide au logement, qui fait débat depuis longtemps, et est suspecté de favoriser la hausse des prix...

Reste enfin le principal, la protection sociale : de loin le plus gros poste en fonction du PIB (24,6%). Qualifier ces dépenses d'inefficaces est une question de dogme. Ce qui est certain en revanche, c'est que la France a fait le choix de l'assurance et de la sécurité. Et qu'à l'heure de la flexisécurité revendiquée, ce n'est pas là que se situe le principal gisement d'économies.

 >> Plus de vidéos sur le site Xerfi Canal, le médiateur du monde économique