La réforme des retraites doit intégrer le travail post-retraite

Par Caroline Young  |   |  667  mots
(Crédits : Reuters)
OPINION. La retraite inactive est plébiscitée dans notre pays. Pourtant, les individus qui poursuivent une activité professionnelle se sentent mieux, vivent plus longtemps et en meilleure forme que les inactifs. Par Caroline Young, présidente d'Experconnect, économiste et démographe.

La France manque cruellement de main d'œuvre qualifiée. Les entreprises peinent à trouver de la main-d'œuvre et le manque de compétitivité du pays s'explique en partie par un taux de participation à l'emploi trop faible. Il existe pourtant une réserve immense et non-exploitée de talents disponibles : les jeunes retraités, désireux de travailler et de transmettre leurs savoir-faire.

Le travail post-retraite est indispensable à l'économie, bon pour les retraités et leur santé. Il est bon pour la gestion des ressources humaines, la sauvegarde et la transmission des compétences... Bon pour la consommation des ménages et l'équilibre des retraites.

Bon pour l'économie

Quand l'économie se prive de ses talents, ce sont nombre de compétences qui ne peuvent bénéficier aux entreprises, former les plus jeunes et être créatrices de richesses. Les pensions de retraite pourront être augmentées du revenu additionnel engendré par le travail post-retraite. Cela augmentera leur pouvoir d'achat.

Bon pour la santé des retraités

La retraite inactive est plébiscitée dans notre pays depuis toujours. Pourtant, on le sait, les individus qui poursuivent une activité professionnelle se sentent mieux, vivent plus longtemps et en meilleure forme que les inactifs.

C'est une réalité : plus longtemps on œuvre, mieux on vieillit. Reculer l'âge de la retraite de 60 à 65 ans équivaut à diminuer le risque de démence de 15 %. Les études médicales le prouvent : plus longtemps on fait « tourner » son cerveau, mieux et plus longtemps on vieillit dans des conditions satisfaisantes. Le travail post-retraite n'est pas une résurgence du bagne mais un outil de lutte contre l'isolement social mortifère.

La France a besoin de tous ses talents. Il est nécessaire de mieux anticiper les fins de carrière. En 2035, un Français sur trois aura plus de 60 ans. Il sera difficile de se passer de leur contribution, sous peine d'un nouveau rétrécissement de l'activité. L'épanouissement professionnel de tous est ainsi la clé de la transmission du savoir.

Bon pour la transmission des savoirs

La métallurgie française aura besoin chaque année de 115.000 nouveaux talents à partir de 2025. D'ores et déjà, les besoins en ressources de l'aéronautique augmentent de façon fulgurante pour répondre aux nouvelles commandes. Si les employeurs s'efforcent d'attirer les jeunes talents prometteurs, ils redoutent de les former pour les voir partir aussitôt. Ce sujet va également toucher les start-ups industrielles françaises, nouveau vivier d'innovation et d'emplois. Le tutorat et la capacité des aînés à transmettre ce qu'ils ont acquis et vécu tout au long de leur carrière représentent une solution. Les seniors permettent la transmission des savoirs, savoir-faire et savoir-être.

Le savoir-être est la clé de la cohérence et de la cohésion des équipes dans un contexte de diversité et de mélange intergénérationnel. Il est nécessaire de maintenir l'employabilité des seniors pour garantir la cohésion de l'entreprise.

Bon pour la consommation

L'âge moyen d'un acheteur de voiture neuve est passé de 49 ans en 2005 à 56 ans en 2020. L'activité industrielle est liée au revenu des retraités. En 2017, leur niveau de vie était supérieur de 5,8 % à celui de la moyenne de la population. Mais sa dégradation annoncée (CSG, absence d'indexation sur l'inflation...) constitue une menace pour la prospérité économique.

Une réforme des retraites doit permettre aux retraités de pouvoir poursuivre une activité en améliorant le niveau de leur pension grâce à leurs cotisations sociales. Le travail post-retraite est l'instrument majeur de la liberté du salarié. Une information claire doit être donnée au senior pour l'éclairer dans son choix de poursuivre ou non au-delà de l'âge légal, une activité à temps choisi.

La France, qui fait face au vieillissement de sa population et à un accroissement de la dépendance, a besoin de tous ses talents pour assurer sa prospérité et l'épanouissement de ces derniers.