Le Brexit, c'est la démocratie

Par Michel Santi  |   |  614  mots
Le Brexit serait une véritable remise en cause du pouvoir économique de la finance en Europe. Par Michel Santi, économiste

Le Brexit n'est pas qu'une consultation électorale qui décidera d'une éventuelle sortie britannique de l'Union. Les enjeux sont autrement plus sérieux - et critiques pour certains - que l'aspect relativement anecdotique d'un pays qui n'avait jamais réellement intégré l'Europe. En dépit de ce qui est stigmatisé par les « remainer » - le Brexit n'est pas non plus un référendum pour ou contre l'immigration et assurément contre les étrangers. Non, le Brexit est fondamentalement un vote pour ou contre la technocratie bruxelloise néolibérale ayant progressivement transformé l'Europe en une citadelle du mercantilisme.

Face aux abus des multinationales

En effet, le 23 juin prochain, les citoyens britanniques s'exprimeront démocratiquement pour remettre au pas ces élites économico-financières qui s'accommodent parfaitement bien d'un chômage des jeunes cataclysmique, mais qui réagissent de manière offusquée et effarouchée dès lors que leurs privilèges sont questionnés. Le débat - le vrai - n'est effectivement pas tant de savoir si l'ilot britannique va se déconnecter du continent que si les citoyens de ce pays - et par delà les européens - vont enfin décider de recouvrer leurs droits face aux abus des multinationales, de l'hégémonie des banques et des accords secrets négociés hors de tout cadre démocratique. Le résultat de ce scrutin du 23 juin dépasse donc très largement le cadre britannique et même européen car il s'agira - à travers ce vote de défiance -  de rejeter sans équivoque cette globalisation qui devient malsaine car elle ne profite qu'aux plus nantis. Honnir ce transfert de richesses institutionnalisé et pérennisé par l'Europe telle que constituée depuis Maastricht.

 Le chantage des banquiers

Rétablir l'équilibre démocratique honteusement confisqué par des élites peu scrupuleuses après des votes de défiance successifs de la France et des Pays-Bas en 2005 et de l'Irlande en 2008. Déposséder les méga-banques de leurs pouvoirs contre-nature. Voilà les authentiques enjeux de ce référendum qui fait trembler - on le comprend bien - l'intelligentsia globale sur le point de se liquéfier à la menace de ce Brexit qui signera le véritable chant du cygne de sa domination. Pourquoi croyez-vous que Jamie Dimon, grand patron de JPMorgan, se soit donné la peine de visiter sa succursale londonienne pour menacer ses salariés de perte de leur emploi en cas de Brexit, après celui de Citigroup ayant lui aussi proféré un tel ignoble chantage ?

 D'ores et déjà, ces colosses tremblent sur leurs fondements subitement hyper fragilisés par la perspective du Brexit. L'action de Deutsche Bank n'est-elle pas à son plus bas historique et les capitalisations des banques occidentales n'ont-elles pas perdu près de 50% depuis que cette menace frontale adressée au néolibéralisme qu'est le Brexit semble envisageable et palpable à un univers habitué à régner sans partage et sans remise en question ? Avec le Brexit et grâce à lui, les peuples reprendront la main sur leur destinée politique et économique.

 Espérons que, par son vote, le peuple de Grande Bretagne mette fin au déni de démocratie, marque de fabrique de l'Europe depuis une vingtaine d'années.

 Michel Santi est macro économiste, spécialiste des marchés financiers et des banques centrales. Il est fondateur et Directeur Général d'Art Trading & Finance.

Il est également l'auteur de : "Splendeurs et misères du libéralisme", "Capitalism without conscience", "L'Europe, chroniques d'un fiasco économique et politique" et de "Misère et opulence", préface rédigée par Romaric Godin.

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