Le mythe de la baisse massive du nombre de fonctionnaires

La Tribune publie chaque jour des extraits issus des analyses diffusées sur Xerfi Canal. Aujourd'hui, le grand mythe de la baisse massive du nombre de fonctionnaires.

À l'origine, il y a ce constat, 5,4 millions d'emplois dans la fonction publique en France. C'est un record en Europe. C'est un cinquième de l'emploi total. Un chiffre qui donne le vertige à certains. Et qui se traduit par le fait que le poids des rémunérations publiques rapporté au PIB fait partie des plus élevées du monde développé. Alors, couper 300.000 emplois publics en 5 ans, autrement dit 5,5%, de l'emploi peut sembler non seulement nécessaire, mais qui plus est facile.

Pourquoi l'objectif est presque intenable ?

Parce qu'on se leurre d'abord sur le sureffectif public. Certes le poids de nos rémunérations publiques est important. Mais lorsqu'il ne l'est pas chez les autres, il faut alors s'interroger sur le poids de la sous-traitance, qui n'est rien moins qu'une embauche indirecte, comptabilisée en consommation intermédiaire, dont on aurait tort de penser qu'elle est systématiquement plus efficace et moins coûteuse pour le citoyen. D'emblée, la position française paraît bien moins atypique. Cela n'interdit pas de s'interroger sur l'écart considérable qui nous distingue de l'Allemagne, par exemple.

Ensuite, il faut rapporter le nombre d'agents à la population. Ce que l'on ne sait pas bien faire, car les statuts sont très variables d'un pays  à l'autre. Néanmoins l'extravagance française paraît bien moins extravagante. Surtout si au lieu de se centrer sur les fonctionnaires, on se focalise sur l'emploi que mobilisent les différents pays sur les grandes fonctions de l'État, indépendamment de du statut privé ou public : dans l'administration, la santé, l'éducation, l'action sociale notamment, il apparaît immédiatement que la France n'est pas mieux dotée  en ressources humaines que les autres, et même plutôt moins bien loties que beaucoup d'autres grands pays.

On voit notamment que l'écart avec l'Allemagne, qui ne compte pas ses agents hospitaliers dans la sphère de l'État, disparaît. Cela explique le paradoxe français d'un nombre élevé de fonctionnaires, avec simultanément moins de professeurs rapporté au nombre d'étudiants, pas plus de médecins, etc. Et même si l'on se borne à la pure bureaucratie, où l'on peut supposer que le mille-feuille français produit des sureffectifs à foison force est de constater que la bureaucratie hexagonale n'est pas de loin la plus coûteuse en termes de rémunérations.

Ce qui explique aussi que lorsque l'on veut couper dans les effectifs il est difficile de trouver la fonction superfétatoire et que même assez souvent on crée une pénurie, voire des déserts administratifs qui ne sont ni souhaités, ni souhaitables. Cela explique aussi que beaucoup d'élus de droites sont les premiers à monter au créneau lorsque la dotation de l'état aux collectivités territoriales est très légèrement rabotée, alors même qu'ils se fédèrent derrière le chiffre de 300.000 postes en moins.

Le paradoxe est facile à expliquer...

Il suffit de regarder comment se répartissent les moyens humains de l'État. Les agents de l'Etat, c'est d'abord plus d'un million 15 agents dans la fonction publique hospitalière. Et ni les niveaux d'encadrement, ni la montée croissante des besoins n'en font un secteur facile d'économie. C'est ensuite l'éducation, avec près d'un million d'agents dans l'enseignement auxquels il faut ajouter les 311.000 agents qui exercent dans les établissements publics à vocation universitaire. Là encore le secteur est quasi intouchable pour les mêmes raisons que la santé. C'est encore 633.000 agents dans la sécurité intérieure, extérieure et la justice. Là encore zone intouchable et sous pression haussière. À lui seul, cet ensemble d'emplois sous pression haussière représente 57 % de l'emploi public.

Reste alors 2,3 millions d'agents, dont 81% se concentrent dans les collectivités territoriales. Supprimer 300.000 postes, c'est concentrer la baisse sur cet ensemble, soit 16% de baisse des effectifs, voire plus si l'on veut compenser la montée des besoins du premier bloc. Pas si facile en effet. Et entre la crânerie des programmes et la réalisation, il ne faut pas être devin pour parier que les cibles ne seront pas tenues.

>> Plus de vidéos sur le site Xerfi Canal, le médiateur du monde économique

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Commentaires 24
à écrit le 24/10/2016 à 21:31
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Attention nous nous orientons vers une privatisation des services publics qui deviennent payants : service des cartes grises ( moins 25 agents de la fonction publique ) certaines interventions des pompiers ( désinsectisation ) . Au final le nombre d...

à écrit le 24/10/2016 à 17:51
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Les fonctionnaires avec la sécurité de l'emploi à vie ne pouvant être licencié en profite pour le pantouflage. Absentéisme élevés ex: enseignants publics 7% contre 3% dans le privé. Faible productivité semaine à 32h contre 39h en moyenne dans le p...

le 24/10/2016 à 19:01
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Argumentation de comptoir! Vous n'avez donc rien compris à la vidéo?

le 25/10/2016 à 11:33
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Vous ne savez probablement pas de quoi vous parlez. Je suis fonctionnaire en administration centrale, et comme tous mes semblables, je fais bien 43h / semaine. Pas de 13e mois, pas d'intéressement, pas de participation et un comité d'entreprise inex...

le 23/03/2017 à 17:01
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On se tait ! PS : fonctionnaire d'état, 39h minimum par semaine et bien souvent plus... Pour 1650 € nets par mois !

à écrit le 24/10/2016 à 16:24
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Ok, mais ça manque de chiffres quand même... Certains préconisent supprimer 500 000 postes de fonctionnaires. Très drôle ! Et comment on supprime 500 000 postes de fonctionnaire ? En remplaçant aucun fonctionnaire partant à la retraite, on supprime ...

le 25/10/2016 à 0:11
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C'est en effet tres simple: changer le statut et mettre tout le monde au CDI. Apres tout devient possible.

à écrit le 24/10/2016 à 15:15
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Attention, faute de reformes ou de réorganisation, ça pourrait devenir le tonneau des danaïdes. Pour quel service rendu ? Alors que les besoins des concitoyens évoluent, aussi rapidement que les technologies et l'économie, on ne voit pas les cha...

à écrit le 24/10/2016 à 13:48
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Moins de fonctionnaires plus de chomeurs, il y a trop d'infirmières de policiers de gendarmes de profs d'instits et de bureau de postes de pompiers de mairies d'écoles a la campagne, il faudra fermer tout ça pour diminuer le nombre de fonctionnaires ...

le 24/10/2016 à 15:19
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Choquant ! Abandonner une partie de la population à son sort parce qu'elle habite dans des milieux ruraux... Vous voulez peut être dire que la France n'a pas a avoir de vie Rurale (Pas de culture, d'élevage, de pèche, de pisciculture, de vignoble...)...

à écrit le 24/10/2016 à 13:32
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Payer des fonctionnaires ou des chomeurs, quelle différence? Ce qui compte, c'est la provenance du financement, l'impot ou les entreprises. Si on finance le chomage par une taxe sur la consommation d'énergie, tout s'arrange. Essayez de comprendre ce ...

le 25/10/2016 à 7:57
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suite. Les fonctionnaires sont financés par des impots sur la consommation, TVA, revenu, CSG, et un peu sur les entreprises, c'est à dire inclus dans les prix. Les chomeurs sont indemnisés par les cotisations des entreprises et cela est néfaste à la ...

le 25/10/2016 à 8:15
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suite 2. d'abord financer le chomage par une contribution de la consommation pour réduire les prélèvements sur la production, et réduire les prix de la production des entreprises; ensuite sur la consommation d'énergie parce que cela serait favorable ...

le 25/10/2016 à 20:41
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Encore une taxe??? Ça s'appelle régler un problème à la française!

à écrit le 24/10/2016 à 13:10
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On les supprime dans les États pour mieux les créer au niveau de l'UE de Bruxelles afin les mettre au service des multinationales!

à écrit le 24/10/2016 à 13:06
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Bien entendu que le service public et les fonctionnaire sont indispensables dans un état organisé. Il faut toutefois qu'ils soient efficaces, loyaux et dénués de pouvoirs staliniens sous prétexte qu'ils ont le tampon :-)

à écrit le 24/10/2016 à 12:28
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"Mais lorsqu'il ne l'est pas chez les autres, il faut alors s'interroger sur le poids de la sous-traitance, qui n'est rien moins qu'une embauche indirecte, comptabilisée en consommation intermédiaire, dont on aurait tort de penser qu'elle est systéma...

le 25/10/2016 à 20:50
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La sous traitance n'est pas assimilable à un emploi de fonctionnaire déguisé! Il répond à un besoin ponctuel! Le fonctionnaire bénéficie d'un emploi à vie justifié ou pas( dans certain cas).il ne faut pas tout mélanger. De toute façon, plus rien ne j...

à écrit le 24/10/2016 à 12:20
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Il y en a pour proposer des coupes à 500 000 fonctionnaires. En général, ils sont incapables de préciser lesquels, donc ils pointent du doigts les collectivités territoriales. Sauf que nonobstant la vulgate à la mode les agents même territoriaux f...

à écrit le 24/10/2016 à 12:05
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Les candidats parlent tous de 300.000 fonctionnaires et rien qu'à ce stade je crains de l'enfumage de première car des postes en nombre équivalent seront créés avec des statuts de contractuels , de vacataires ou même d'emplois aidés et au final la ...

à écrit le 24/10/2016 à 12:03
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dans son livre de 2013 sur les mythes du modèle allemand, Guillaume Duval disait il me semble que l'essentiel de l'austérité de nos voisins avait été mise à la charge des communes. chez nous, on a vu comment le gouvernement a faibli face à la bronca ...

à écrit le 24/10/2016 à 11:46
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Excellent article. Dommage que les sources statistiques ne soient pas indiquées.

le 25/10/2016 à 6:15
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Il y a une chose que je ne comprend pas vraiment. Peut être même 2 ou 3. Entre 1993 et 1998 on a embauché 1 million de fonctionnaire très facilement. Aujourd'hui on doit être à 1.5 millions de fonctionnaire de plus. 1ere question est.....avant 93...

le 22/06/2017 à 10:18
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A CFOUTUCHUISPARTI Pour répondre à votre 1ère question: entre 1993 et 2017, la population française est passée de 58 milllions d'habitants à 66.7 millions soit +14%. QUi dit augmentation de population dit augmentation des besoins en crèches, éco...

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