Les cinq défis numériques du quinquennat

Par William Martin-Genier  |   |  785  mots
Le président Emmanuel Macron lors de la cérémonie d'investiture. (Crédits : Reuters)
OPINION. Le numérique sera un des enjeux majeurs de ce mandat présidentiel, car il permet de répondre aux préoccupations concrètes et quotidiennes des Français de tous horizons. Par William Martin-Genier, co-fondateur de GIN PROD.

Les Français ont renouvelé leur confiance en Emmanuel Macron le mois dernier, avec plus de 58% des voix. Ce second mandat doit impérativement marquer un tournant dans la stratégie numérique du gouvernement. Si les ambitions de souveraineté numérique et de métavers européen sont des idées utopistes et lointaines, il n'en est pas de même pour de nombreuses démarches du quotidien des Français, qui doivent être des priorités concrètes et immédiates.

1. L'éducation

L'école publique, socle de l'avenir même de notre pays, est encore trop peu préparée : manque de moyens, parc informatique obsolète ou pas toujours au point. Les démarches les plus basiques, comme la demande d'attestation de diplôme ou un simple changement d'adresse en cours de scolarité, en passant par les autorisations de sortie, doivent être rendues possibles en un clic, en ligne, pour simplifier les requêtes et éviter la fraude. Afin de réduire les inégalités de l'accès à l'information et lutter contre l'endoctrinement, chaque élève de l'enseignement public doit recevoir une tablette récente avec l'accès à des applications gratuites : kiosque numérique, bibliothèque en ligne... Et pourquoi pas un abonnement data offert pour les plus défavorisés. La fracture numérique et l'égalité des chances dès le plus jeune âge doivent être la priorité du prochain ministre de l'Éducation nationale, qui devra être un jeune, issu du numérique.

2. La jeunesse

Créer un espace de confiance pour les jeunes, et non d'anxiété sociale ou de cyber-harcèlement, est un véritable défi à relever. 20% des jeunes affirment avoir déjà été confrontés à une situation de cyber-harcèlement (étude e-Enfance). L'interdiction du téléphone à lcole équivaut à mettre un pansement sur une jambe de bois. Car la vie digitale n'est pas compartimentée comme dans un espace tangible. Il est nécessaire de tendre vers la création d'une plateforme d'accompagnement pour les jeunes en difficulté (familiale, scolaire, psychologique, sociale), avec un accès direct à des professionnels, sans besoin de passer par un référent externe (parent ou un médecin traitant, comme c'est le cas actuellement avec MonPsy).

3. La médecine

La crise liée au Covid a irréfutablement accéléré la transition numérique du domaine sanitaire. En 2020, plus de 4,5 millions de télé-consultations ont été effectuées. La plateforme Doctolib enregistre aujourd'hui plus de 60 millions d'utilisateurs. La sécurisation des données sera un enjeu primaire dans le domaine médical : dossier médical partagé conçu par le gouvernement, ordonnances stockées sur Doctolib, logiciels spécialisés pour les hôpitaux; il faudra s'assurer que les informations confidentielles ne deviennent pas la cible de cyber-attaques à différentes fins.

L'investissement dans la prévention est capital : la mise en place de cabines de télé-consultation dans les nombreuses zones de déserts médicaux sera nécessaire. Elles ne remplacent en rien un médecin, mais permettent au minimum de réduire le temps entre deux consultations. Plus de 7 millions de personnes vivent dans une commune où l'accès à un médecin généraliste est limité, soit plus d'un dixième de la population.

4. Le handicap en ligne/accessibilité

Sur les 250 démarches phares de l'État, un peu moins de la moitié est accessible aux personnes handicapées. Le gouvernement devrait développer dans le cadre de sa Charte d'accessibilité de la communication une application mobile globale accessible aux personnes malvoyantes ou sourdes, grâce notamment au retour haptique et la caméra TrueDepth, et ne pas se contenter d'options de contrastes ou de zoom sur certains sites de ministères ou secrétariats.

5. La justice et l'intérieur

Afin d'accélérer la justice et désengorger les services de prise de plainte, il est urgent de rendre possible la saisine des différentes juridictions en ligne.

Le tribunal le plus proche des citoyens, celui de proximité, ne peut toujours pas prendre de plaintes sur le site du ministère. Ce n'est pas digne de la sixième puissance mondiale ! Les demandes d'aides juridictionnelles doivent encore se faire sur un formulaire papier. Les procédures dans leur intégralité, au judiciaire ou au conseil de Prud'hommes, du dét de plainte à l'appel, ne peuvent être réalisées que par courrier...

Le numérique sera un des enjeux majeurs de ce quinquennat. Les préoccupations actuelles des Français ne doivent pas être oubliées, le digital doit être un point d'ancrage et de confiance pour faciliter et non complexifier le quotidien des citoyens de tous horizons.