Les investisseurs n'arbitrent pas les États-Unis, mais pour combien de temps encore ?

Par Sandy Campart  |   |  394  mots
Sandy Campart, directeur de l'IUP Banque Finance de Caen (IAE Caen). (Crédits : DR)
[OPINION] Malgré le tumulte mondial provoqué par la politique protectionniste de Donald Trump et son style de présidence brutal sur fond d'enquêtes à haut risque, le dollar continue de s'apprécier et Wall Street de battre des records. Indéfiniment ? Par Sandy Campart, enseignant-chercheur au CNRS (CREM), directeur de l'IUP Banque Finance de Caen (IAE Caen).

La confiance est le bien le plus précieux d'une économie. C'est elle qui projette vers l'avenir, qui fait prendre des risques, qui autorise à consommer et à investir, qui donne envie d'étudier et de s'émanciper, qui est source de compétitivité.

Inutile d'avoir étudié l'économie pour comprendre que les escalades verbales du président Donald Trump et ses répercussions géopolitiques, le slogan simpliste « America First » avec ses déclinaisons protectionnistes et l'ingérence dans les enquêtes dont il est l'objet vont finir par éroder la confiance des Américains.

Un des plus longs cycles de croissance de l'histoire boursière

Pourtant, les investisseurs ne semblent pas vouloir le voir ou le croire. Le dollar continue de s'apprécier et les indices actions franchissent des plus hauts historiques. Pour quelles raisons ?

Parce que leur statut de première économie mondiale leur procure un temps de réaction plus long des investisseurs avant d'arbitrer ?
 
Assurément. Les fondamentaux économiques américains sont en outre toujours robustes et les marchés ne semblent pas croire à l'escalade de la guerre commerciale que menacent de se livrer les États-Unis et la Chine. Selon les différents scénarios aujourd'hui à l'étude, les États-Unis pourraient cependant abandonner dès 2019 entre 0,2 et 0,7 point de croissance.

Parce qu'ils sont, dans la révolution numérique en cours, la locomotive qui abrite les plus grands acteurs ?
 
Évidemment. Parmi les dix meilleures performances boursières de l'année, neuf sont des valeurs technologiques et les deux tiers des entreprises sont américaines. Seulement, depuis l'alerte du 27 mars dernier et la chute de 3% en une seule séance du Nasdaq, les investisseurs semblent douter que l'un des plus longs cycles de croissance de l'histoire boursière puisse se prolonger indéfiniment.
 
Parce que les marchés d'actions sont encore protégés par la faiblesse des rendements obligataires ?
 
Probablement. Mais, nous le savons, la remontée des taux d'intérêt directeurs est entamée outre-Atlantique. Une augmentation de 50 à 100 points de base d'ici à un an rendra les placements obligataires nécessairement plus attractifs. Les économistes tablent pour 2020 sur des taux à 10 ans à 3,6% contre 3,1% en 2018.

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L'AUTEUR

Sandy Campart, est enseignant-chercheur, membre d'un laboratoire de recherche CNRS (CREM), directeur de l'IUP Banque Finance de Caen (IAE Caen) et auteur du livre "Et si on osait investir en Bourse" (publié en 2018 aux éditions EMS).