Quand les députés PS dérapent sur les congés payés

Par François Taquet  |   |  503  mots
Les députés PS ont décidé de légiférer sur les congés payés. Mais leur proposition de loi oublie l'essentiel, et risque de complexifier encore la règlementation. par François Taquet, professeur de droit social, avocat

Il paraît qu'en 1789, Marie-Antoinette était plus préoccupée des serrures de son palais que de la révolution qui grondait. C'est dire que certains peuvent parfois ne pas être conscients de la réalité et se réfugier dans des détails sans importance !
Fin juillet, l'ensemble du groupe socialiste de l'Assemblée Nationale (soit 287 députés) a déposé une proposition de loi (n° 3029) relative aux droits à congés.

Des mesurettes pour une proposition de loi

On se dit décidément que le sujet devait être de grande importance. D'ailleurs, le président du groupe à l'assemblée s'est auto congratulé de cette initiative contribuant à simplifier le droit du travail et à garantir les droits des salariés. Pourtant, la lecture de ce texte, rédigé dans un style purement technocratique laisse le lecteur pantois ! Certes, il y est question de faire coïncider la période de référence des congés payés sur l'année civile ou de permettre aux nouveaux embauchés de pouvoir prendre de suite des congés ou encore aux salariés licenciés pour faute lourde (rarissime) de pouvoir bénéficier d'une indemnité compensatrice de congés payés (ce que prévoit déjà la directive européenne du 4 novembre 2003).... Autant de mesurettes dont on perçoit mal l'impact dans le cadre d'une proposition de loi !

Des élus qui oublient l'essentiel

Pire, il est intéressant de relever dans les premiers commentaires le fait que ce texte ne simplifie rien du tout et risque de rendre la gestion des congés payés plus compliquée encore. Comme si les services RH confrontés aux changements constants de loi, à la DSN, au compte pénibilité, n'avaient que cela à faire ! D'aucuns sont allés plus loin encore en relevant que cette proposition se gardait bien de traiter du délicat problème de la maladie et des congés payés (sujet sur lequel l'Europe a pourtant demandé à la France de modifier sa législation)
Décidément, on a du mal à comprendre comment 287 députés pourront accepter de traiter de sujets aussi dérisoires et en étant aussi désinformés.

Et puis, au risque de troubler ces derniers instants de paix estivale, un tel texte constitue t-il la préoccupation du moment, tant des chefs d'entreprise que des salariés ou encore des 3,5 millions de chômeurs qui de toutes les manières ne bénéficient pas de congés payés ? Faut-il être à ce point éloigné de la réalité pour proposer des textes aussi creux ? Victor Hugo aimait dire que « l'essentiel est sans cesse menacé par l'insignifiant ». Une phrase qui trouve son sens à la lecture de la proposition de loi socialiste !

François Taquet, Professeur de Droit social, avocat, spécialiste en Droit du travail et protection sociale, Directeur scientifique du réseau d'avocats GESICA (premier réseau international d'avocats comptant aujourd'hui 2200 avocats répartis au sein de 250 cabinets en France et à l'étranger)