Trump et Macron devraient décourager les entreprises d'investir en Iran

Par Ivan Sascha Sheehan et François Colcombet  |   |  1050  mots
Emmanuel Macron et Donald Trump aux Musée des Invalides à Paris ce jeudi 13 juillet 2017.
Ce 14 juillet, Donald Trump rencontrera Emmanuel Macron. De nombreux analystes estiment que la visite se concentrera sur les questions commerciales et économiques. Mais il y a des questions urgentes de politique étrangère que les chefs d'Etat devraient également aborder. Par Ivan Sascha Sheehan et François Colcombet*.

Le Président américain Donald Trump devrait rencontrer son homologue français Emmanuel Macron le 14 juillet. Les dirigeants auront à parler de beaucoup de choses. Les deux hommes sont d'anciens dirigeants d'entreprises qui se sont engagés à améliorer les perspectives économiques de leurs pays, tout en renforçant les industries naissantes, et de nombreux analystes estiment que la visite se concentrera sur les questions commerciales et économiques. Mais il y a des questions urgentes de politique étrangère que les chefs d'Etat devraient également aborder.

L'Iran, menace nucléaire

La réunion marque le deuxième anniversaire de l'accord nucléaire entre l'Iran et les cinq membres permanents du Conseil de sécurité de l'ONU et l'Allemagne, conclu le 15 juillet 2015. Et avec l'attitude criminelle flagrante de Téhéran en Syrie, son soutien au terrorisme, la déstabilisation régionale, les tests de missiles balistiques et l'intensification des violations des droits humains en Iran, beaucoup s'attendent à ce que la menace iranienne figure en tête de l'ordre du jour.

Il y a deux ans, l'administration Obama avait promu la proposition naïve selon laquelle l'accord nucléaire annonçait une nouvelle ère dans les relations du monde avec Téhéran. Elle espérait que l'accord freinerait l'extrémisme du régime et stimulerait un bon comportement. Mais l'optimisme était injustifié et les espoirs se sont révélé des illusions.

Les questions non résolues par le Plan global

Au cœur de l'accord nucléaire - connu officiellement comme le Plan global d'action conjoint ou JCPOA - se trouve la question des sanctions imposées par la communauté internationale au régime iranien. Bien que de nombreuses sanctions aient été levées conformément à l'accord nucléaire que les États-Unis et la France ont aidé à négocier, l'accord n'a pas eu de conséquences sur les sanctions visant les violations des droits humains de l'Iran, son soutien au terrorisme et son programme de missiles balistiques. L'Iran n'a également pris aucune mesure identifiable pour atténuer les préoccupations internationales liées aux risques de blanchiment d'argent et d'autres sources d'instabilité.

Si le Président Trump est sérieux sur le renforcement de l'opposition internationale à l'expansion destructrice de l'Iran, il devrait lors de sa rencontre avec le Président Macron obtenir un rapprochement avec le Président Macron et obtenir des contributions françaises afin que les sanctions soient maintenues contre le régime iranien, tant que ce régime ne change pas d'attitudes. Et si le Président Macron est ferme au sujet de la défense des droits internationaux relatifs aux droits humains et à la démocratie, ainsi que des intérêts économiques de son propre pays, il devrait s'allier à Trump sur ce problème.

Les pasdaran contrôlent la moitié du PIB de l'Iran

Ces derniers mois, la coalition de l'opposition iranienne connue sous le nom du Conseil national de la résistance iranienne (CNRI) a tenu des conférences de presse et publié des documents qui mettent en relief la croissance continue d'un empire financier contrôlé par les paramilitaires radicaux de la République islamique, le corps des Gardiens de la révolution iraniens, les pasdaran.

Les activités de soutien au terrorisme des pasdaran et leurs interventions dans les zones de combat étrangères ont considérablement augmenté, en grande partie sous les ordres directs du Guide suprême du régime, l'ayatollah Ali Khamenei. Aujourd'hui, les pasdaran contrôlent au moins la moitié du produit intérieur brut (PIB) iranien et il est donc impossible pour les entreprises occidentales de faire affaire avec l'Iran et de garantir que leur capital d'investissement ne financera pas les terroristes ou les opérations répressives de sécurité du régime contre des étudiants, des journalistes et des militants politiques à l'intérieur de l'Iran.

Isoler les pasdaran du commerce mondial

Le Président Trump semble déjà le comprendre. Au cours des derniers mois, il a signalé son intérêt à isoler les pasdaran de l'économie mondiale en les qualifiant d'organisation terroriste étrangère. Désormais, il a la responsabilité de convaincre le président Macron de se joindre à cet effort. Ensemble, ils peuvent convaincre les entreprises occidentales que l'économie iranienne est loin d'être « l'îlot de stabilité » que l'on dit parfois qu'il représente dans une région très instable.

Il semble bien que la République islamique est de plus en plus vulnérable face à une population combative. En témoignent près de 11.000 manifestations et mouvements sociaux dans tout le pays durant l'année dernière. La question du changement de régime était à l'ordre du jour du rassemblement de l'opposition iranienne, auquel ont participé des dizaines de milliers de personnes et des centaines de personnalités américaines, européennes et du Moyen-Orient, le 1er juillet à Villepinte.

Décourager la collaboration économique, préparer l'avenir démocratique

Tôt ou tard, les aspirations du peuple iranien se concrétiseront et la volonté populaire d'instaurer un gouvernement démocratique dépassera la capacité du régime iranien à réprimer sa population. Ce jour viendra beaucoup plus tôt si des pays comme la France et les États-Unis acceptent de décourager leurs chefs d'entreprise de soutenir et de financer le régime théocratique en Iran.

Quand un Iran stable et démocratique naîtra des ruines de la dictature religieuse actuelle, les entreprises qui auront retenu leurs investissements se retrouveront du bon côté des marchés et de l'histoire. La France et les États-Unis ont toujours été plus forts lorsqu'ils s'allient en solidarité contre les menaces d'ordre international. Messieurs Trump et Macron devraient confirmer ces faits vendredi 14 juillet et les communiquer au reste du monde prochainement.

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(*) Note sur les auteurs :

Ivan Sascha Sheehan est directeur du programme d'études supérieures en affaires internationales et en sécurité humaine à l'École des Affaires publiques et internationales de l'Université de Baltimore, aux Etats-Unis.

Suivez-le sur Twitter @ProfSheehan.

François Colcombet est président de la Fondation d'Etudes pour le Moyen-Orient (FEMO). Sous sa direction un livre collectif vient de paraître : "Où va l'Iran", aux Edition Autrement. Ce magistrat honoraire est un ancien député, un ancien conseiller à la Cour de cassation.

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