Un étudiant, combien ça coûte ? Des inégalités dans l’enseignement supérieur

Par François Métivier et Olivier Berné  |   |  576  mots
(Crédits : Reuters)
Depuis 10 ans, les réformes de l’enseignement supérieur se succèdent. Mais la différence de traitement entre étudiants des universités et des grandes écoles est stable. Au profit de ces derniers. Par François Métivier, Institut de physique du globe de Paris (IPGP) – USPC et Olivier Berné, Centre national de la recherche scientifique (CNRS)

Nous présentons ici une data visualisation tirée de notre travail, Inégalités de traitement des étudiants suivant les filières en France publié en 2015 dans le cadre de Sciences en marche.

Les données existantes montrent sans ambiguïté que le financement par l'État des étudiants à l'université est largement inférieur à celui consenti aux élèves des CPGE (classes préparatoires aux grandes écoles) et des écoles d'ingénieurs. Cette analyse confirme les résultats obtenus il y a plus de dix ans par S. Zuber. Il faut de plus mettre ces inégalités de financement en regard des inégalités sociales : près de 50% des étudiants des filières sélectives sont issus de milieux socialement favorisés et un étudiant issu des milieux favorisés a 20 fois plus de chance d'intégrer une grande école qu'un étudiant issu de milieux populaires.

En conclusion, l'État finance bien mieux les études des plus aisés, et les politiques universitaires poursuivies depuis des années n'ont en rien résolu ces inégalités sociales.

Cette infographie repose sur trois sources de données.

  • Pour les universités, le nombre d'étudiants provient des données mises en ligne par le Ministère de l'Enseignement supérieur et de la Recherche (MESR).

  • En ce qui concerne le budget, en l'absence de données disponibles sur le site du MESR, nous avons utilisé les dotations 2014 publiées par l'Étudiant. Nous avons dû chercher sur Internet et pour chaque université son budget consolidé. L'essentiel des données provient des rapports du HCERES. Suivant l'université, l'année pour laquelle nous avons trouvé un chiffre « officiel » varie entre 2011 et 2015 (budgets prévisionnels). Ces budgets varient de façon relativement marginale d'une année sur l'autre. Étant donné que les effectifs étudiants sont en croissance rapide, la dépense par étudiant à l'université est probablement inférieure à ce que nous rapportons. Enfin, la dépense par étudiant calculée ici est une valeur maximale car une part du budget, qui peut être importante pour certaines universités scientifiques, est consacrée au financement d'activités de recherche. Le budget rapporté au nombre d'étudiants des l'université est aujourd'hui très probablement inférieur à ce que nous rapportons.

  • Enfin, pour les écoles, les chiffres proviennent du classement 2013 de l'Usine Nouvelle et représentent un échantillon de 126 écoles d'ingénieurs dans lequel nous n'avons conservé que les écoles de statut public ou possédant un contrat quadriennal ou quinquennal avec l'État.

En conclusion de cette note méthodologique, les chiffres indiqués ne sont donc pas à prendre au pied de la lettre et encore moins à l'euro prêt. La situation de certaines écoles ou universités a pu évoluer, leur place aussi. Ils constituent néanmoins une estimation viable de l'état des dépenses par étudiants dans un ensemble significatif d'établissements du supérieur financés par l'État. Ils traduisent enfin une situation étonnamment stable alors que des réformes profondes de l'enseignement supérieur et de la recherche se succèdent depuis plus de dix ans.

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 Par François MétivierGéophysicien, Dynamique des fluides géologiques , Institut de physique du globe de Paris (IPGP) - USPC et Olivier BernéAstrophysicien, Institut de Recherche en Astrophysique et Planétologie , Centre national de la recherche scientifique (CNRS)

 La version originale de cet article a été publiée sur The Conversation