Une pharmacie ferme tous les deux jours, à qui la faute ?

A continuer à vouloir simplement vendre des boîtes de médicament, sans service à valeur ajoutée, la profession accélère la disparition ds pharmacies. Par Xavier Pavie, professeur, ESSEC business school

Plus d'un millier de pharmacies ont disparu ces dix dernières années et l'Ordre national des pharmaciens a annoncé l'accélération de ce mouvement en 2015. C'est désormais une pharmacie qui ferme tous les deux jours. Faut-il s'en étonner ? Le pharmacien n'a t-il pas abandonné de lui-même son métier ?

 Lorsque l'on sait que la plupart du temps, un patient choisit son officine en fonction de son lieu d'habitation ou de son travail - ce qui n'est pas le cas des autres commerces de proximité comme le boucher, le boulanger ou le poissonnier -, il n'est pas très surprenant que les pharmacies soient sur le déclin.

 Quelle valeur ajoutée?

C'est tout bonnement parce qu'elle ne fait pratiquement que distribuer des boites que la disparition de la pharmacie est inéluctable, et il y a fort à parier que d'ici 10 ans nous n'en n'aurons plus qu'une dizaine de milliers dans notre pays. La question de la différenciation des officines, de leur valeur ajoutée est absente des débats et la question des services est des plus mal posée.

 Il n'y a pas l'ombre d'une différence entre les 22 000 pharmacies encore présentes en France, ce qui contribue à leur disparition. La segmentation est un terme qui leur est étranger, tout autant que le marketing des services. Toutes les officines ont la même configuration physique, elles recrutent les mêmes adjoints, les mêmes préparateurs, et usent des mêmes processus de délivrance de médicaments.

 Un choix par la proximité

Comment les pharmacies sont-elles capables d'adresser par jour entre 150 et 300 clients avec des pathologies, des besoins extrêmement variés ? Il n'y a qu'une seule explication : elles se concentrent sur la prescription et délivrent les boites réclamées. Or aucun service à valeur ajoutée réelle ne se dégage lors d'une délivrance. Rien ne différenciant les pharmacies les unes des autres, le choix se fait dès lors par la proximité.

 Concernant les services : certes, réclamer la possibilité de vaccination est une demande légitime mais elle n'est qu'un détail qui ne fera certainement pas les beaux jours des officines en perte de vitesse. C'est une politique de services qu'il faut désormais promouvoir plus que la vente de produits. Ce n'est pas pour cela aujourd'hui que nous nous rendons dans une officine !

 Valoriser la compétence des pharmaciens

La seule raison de se rendre dans une officine, c'est pour y trouver la santé, le bien-être et des conseils. Si une officine prétend aider au sevrage tabagique, ce n'est certainement pas en vendant des boites de patchs, mais plutôt en organisant un véritable coaching de celui qui est dépendant. Elle ne propose pas un bilan dermatologique pour écouler des crèmes de soin dont l'efficacité est très discutable mais parce que seul un rapport physique avec l'épiderme permet une véritable évaluation des besoins.

 Les pharmacies peuvent continuer à vendre des produits pour retarder leur disparition certaine, mais le seul moyen de leur dessiner un avenir est de valoriser la compétence des pharmaciens, c'est là que réside leur véritable valeur ajoutée.

 Les pharmaciens ont pour eux trois avantages indéniables : l'expérience, la crédibilité et la proximité. Le pharmacien est en effet le seul professionnel de santé disponible quasiment 7 jours sur 7, doté d'une formation et d'un savoir crédible et solide.

 Or à être obsédé par la protection de son monopole, le pharmacien en oublie les opportunités qui s'offrent à lui : la livraison à domicile des médicaments est proposée par La Poste, le suivi de santé par les applications Apple, l'amélioration de la condition physique par Nike ou Runstatic, les commandes via internet par Leclerc, bref aucun pharmacien !

 Une santé ubérisée

Tout comme Uber ne vient pas des taxis, AirBnB n'est pas issu du monde hôtelier et Blablacar n'est pas l'idée d'un loueur de véhicule. La santé est en train de se faire ubériser par des acteurs étrangers au domaine de la santé mais qui, viennent prendre les voies de croissances fondées sur les services que les officines devraient s'accaparer. Seul le pharmacien nous connaît. Nous accepterions volontiers de lui confier nos données de santé, nous savons où il se trouve et quand aller le voir. Au lieu de s'adresser aux gouvernements successifs pour l'aider à le protéger davantage c'est peut-être à ceux qui ont besoin de lui, à ses clients qu'il devrait de s'adresser...

Professeur Xavier Pavie

ESSEC Business School

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Commentaires 13
à écrit le 14/06/2016 à 22:41
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Xavier Pavie ou l'art d'écrire un article sur un sujet méconnu... J'ai eu l'impression de lire l'article d'un journaliste pseudo-spécialisé dans la santé ou alors l'interview d'un politicien qui a un avis sur tout, sans rien connaître... Manque de cr...

à écrit le 11/06/2016 à 10:10
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Ce "spécialiste" de la pharmacie ayant fait de grandes écoles ......est un âne ! Je l'invite a passé une journée dans une officine comme par exemple une des nombreuses officines de l'Ariège qui exercent dans un milieu rural pour voir si on ne fait q...

à écrit le 09/06/2016 à 13:21
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Bla-bla-bla ...trop de titulaires nourris à la rentabilité ...mal de ce siècle ,très loin de ce que vivent mes confrères .Je suis diplomee de pharmacie ,avec une éthique ,comme les pharmaciens chez qui j accepte de travailler.N oubliez pas les VRAIS ...

à écrit le 09/06/2016 à 12:57
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Le pharmacien n'arrive pas à mettre en avant les services qu'il peut rendre et de plus, il s'enferme ou se fait enfermer par les media dans une communication basée sur les prix. C'est un véritable paradoxe. En direct avec le patient, sa communicati...

à écrit le 09/06/2016 à 8:12
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qu'il vienne sur le terrain qq heures et il comprendra qu'il ne dit que des imbécilités... On fait annuellement des sondages sur ce que les gens veulent dans notre pharmacie, qu'importe ce qu'on propose, le principal, c'est que les gens veulent l...

à écrit le 08/06/2016 à 18:47
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Ces articles sont affligeants, ces professeurs de ESSECS business school, qui sont des économistes, connaissent les contraintes du métier de pharmacien. Non en réalité des lobyistes chargés de détruire le système de santé jugé trop couteux . Si ...

à écrit le 08/06/2016 à 14:58
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Monsieur Pavie , arretons nous des votre introduction ; vous correlez la disparition de plus de 1000 pharmacies ces dernieres années à l'évolution ou plutot l'absence d'évolution du metier . Or ne savez vous pas Monsieur Pavie que la création ...

à écrit le 08/06/2016 à 14:13
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Il est étonnant que les gens de l'ESSEC mentent en donnant de faux chiffres. Il n'est pas étonnant par contre qu'ils prennent les patins des lobbies. L'important est tout de même d'en parler ... non des pharmacie de de la visions globale du soin et d...

à écrit le 08/06/2016 à 13:29
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Sauf que la réglementation ne permet pas aux pharmaciens de faire ce qu'ils veulent. S'ils donnaient par exemple des conseils, ils auraient probablement les toubibs sur le dos pour exercice illégal de la médecine ou seraient traînés en justice en cas...

à écrit le 08/06/2016 à 12:47
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Je suis pharmacien d'officine, nous pratiquons depuis toujours les service à valeur ajoutée, qui demandent du personnel compétent et/ou du temps de disponibilité. Et qui nous paye pour ça ? Personne... Donc cela n'améliore pas la situation de l'entre...

à écrit le 08/06/2016 à 12:32
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Mes objections : la culture française du "tout remboursé" n aide pas a developper des conseils ou consultation payante en matiere de santé. Le principal client de l officine est la personne agée, peu mobile et (tres) peu a l aise avec les solutio...

à écrit le 08/06/2016 à 8:29
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La faute aux médecins qui prescrivent bien trop, plus personne ne vit sans médicaments de nos jours !

le 08/06/2016 à 10:38
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vu que les pharmacies ne vendent que des boîtes, comme dit l'article, c'est pour les maintenir en vie que les médecins prescrivent trop ? Modération pharmaceutique = disparition accélérée de vendeurs de médicaments, mais vu qu'il parait que l'offici...

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