Aujourd'hui, toutes les enquêtes montrent que les salariés sont en quête de sens et de bien-être au travail. Face à ces demandes, comment doivent agir les managers ?

Dorothée Metta : Il leur faut aller jusqu'au bout des six dimensions du sens* que l'on travaille chez Kronos. Quatre sont déjà mises en œuvre. Il s'agit de l'autonomie, de la qualité de la relation, des occasions de développement et d'apprentissage, et de la reconnaissance. Mais le regard miroir collaborateurs/managers sur ces quatre premiers leviers n'est pas le même. Quand les premiers affirment être efficaces à 75/80 %, les collaborateurs estiment que la réalité est plus proche des 40/50 %. Il y a donc un gros écart de perception qu'il faut s'efforcer de réduire. Ce que nous faisons chez Kronos par le biais de formations miroir qui permettent aux managers et aux salariés de monter en compétences au même rythme sur les mêmes sujets.

Quelles sont les deux dernières dimensions ?

D.M : Les deux autres données qui font sens dans le travail sont l'utilité pour les autres et la société (ce qu'on appelle la survaleur en termes extra-financier) et la rectitude morale (un travail effectué de façon responsable dans sa réalisation et ses impacts). Les managers doivent donc aujourd'hui pousser au quotidien ces six dimensions du sens.

Pierre Egido : Cela se travaille, s'acquiert, s'apprend. La complexité en management est que l'organisation (structure, système de gouvernance, politique salariale, etc.) peut influencer de façon positive ou négative sur ces 6 dimensions. Dit autrement, une femme ou un homme seul ne peut faire vivre cela si le système n'encourage ou ne soutient. C'est comme cela que l'on se retrouve avec des salariés-citoyens qui vivent des conflits de valeur forts et sont en rupture avec leur entreprise. Renaud Sainsaulieu expliquait très bien cela il y a plus de 20 ans en disant qu'une entreprise était poreuse de la société dans laquelle elle vit. La société civile est plus puissante que l'entreprise, et cette dernière doit en tenir compte dans le contrat social qu'elle pense et propose à ses salariés, et à ses parties prenantes.

Kronos met particulièrement en avant la notion de « management responsable ». Est-ce celui qui permet d'enclencher le travail sur ces six dimensions ?

D.M : Le « management responsable » permet de viser une performance globale (en termes de valeur et de survaleur) en impliquant l'ensemble des parties prenantes. Chez Kronos, nous focalisons notre travail sur le développement de la compétence, de la proximité, de la coopération, de l'intelligence collective et qualité de vie au travail. Aujourd'hui, les managers doivent au quotidien apporter autant d'importance à ces survaleurs que les biens et services produits ou les heures facturables engrangées. C'est pourquoi, il faut créer des modèles économiques qui mesurent ces survaleurs.

Comment faire concrètement pour maximiser cette prise de conscience ?

D.M : Il faut créer des modèles économiques qui mesurent ces survaleurs. Toute l'idée est de parvenir à mesurer régulièrement l'ensemble de ces points et les inclure dans des tableaux de bord. Il faut également accepter que cette valeur ne soit pas forcément mesurée en termes de chiffres, mais fasse l'objet d'un récit. Coopérer, cela a de la valeur, comme c'est le cas d'une montée en compétences, ou d'une prise de risque, etc. Tout cela fait également partie de la richesse de l'entreprise et doit être inclus dans le bilan et le compte de résultat. Les travaux de l'économie de la fonctionnalité et de la coopération œuvrent en ce sens.

Quels types d'entreprises accompagnez-vous ?

D.M : Historiquement, il s'agit majoritairement d'ETI. Kronos a une histoire de plus de 35 ans d'interventions dans le management afin d'aider ses clients à répondre aux enjeux du moment.

P.E : Aujourd'hui, ce sont plus 60 entreprises et organisations qui ont toutes en commun d'être en mouvement, en transformation. En réalité, je crois qu'on se choisit mutuellement. Notre Raison d'être « Faire Progresser l'Homme et l'Entreprise », donne une inclinaison, une perspective, un souffle particulier à notre projet et cela se ressent dans notre approche. Nous attirons des entreprises qui veulent faire bouger les lignes durablement, en profondeur.

* Estelle Morin HEC Montréal