Le Grand Est renoue avec les grands investissements

La région issue de la fusion de l'Alsace, de la Lorraine et de Champagne-Ardenne se projette dans l'avenir en valorisant ses atouts industriels et internationaux. L'investissement des entreprises repart à la hausse. Mais en Alsace, on continue de protester contre le Grand Est.
Le PIB de l'agriculture caracole à la deuxième place en France.
Le PIB de l'agriculture caracole à la deuxième place en France. (Crédits : iStock)

Pas moins de 500 millions d'euros d'investissements chez Mercedes à Hambach (Moselle), 100 millions d'euros chez Kronenbourg à Obernai (Bas-Rhin), 150 millions chez le logisticien Delticom à Ensisheim (Haut-Rhin). Dans le Grand Est, les annonces de projets de développement des entreprises, en croissance endogène ou en création d'activités, se succèdent en 2018 à un rythme et à un niveau inédits. Qui parle encore de désindustrialisation ? Dans son enquête périodique de conjoncture, la Banque de France pointe cette année « un climat des affaires à son niveau le plus élevé depuis 2011 » dans la région. Selon la Banque de France, les entreprises industrielles du Grand Est ont connu en 2017 une progression de leur chiffre d'affaires de 3,6%. Un résultat supérieur aux prévisions formulées un an plus tôt.

La phase d'assainissement des activités industrielles héritées des Trente Glorieuses semble être terminée, soldée en 2012 avec la fermeture des derniers hauts-fourneaux en Lorraine. L'industrie lourde n'a pas pour autant quitté la région. ArcelorMittal a même renforcé, en Moselle, ses capacités de production d'acier à haute résistance et ses activités de recherche. « Les investissements dans l'industrie resteront à un niveau élevé en 2018 », prévient la Banque de France.

« Nous avons établi notre schéma de développement économique, d'innovation et d'internationalisation sur deux piliers facilement identifiables : la bio-économie et l'industrie du futur », rappelle Jean Rottner, président du conseil régional du Grand Est. La bio-économie englobe l'agriculture, l'alimentaire et la transition énergétique, trois points forts pour le territoire.

Le projet de requalification du territoire de Fessenheim, où la fermeture de la centrale nucléaire est attendue en 2021, est bâti sur des activités liées à la transition énergétique. Dans ses documents institutionnels, le Grand Est revendique la deuxième place en France pour le PIB de son agriculture (5 milliards d'euros de valeur ajoutée). Cette statistique n'a rien de surprenant si l'on considère la production céréalière, les oléoprotéagineux et la viticulture.

Un soutien économique "sur mesure"

Rejetée dès le départ par une partie de la population alsacienne, qui craignait de voir sa culture diluée dans un ensemble hétérogène, la fusion avec la Lorraine et Champagne-Ardenne commence à porter ses fruits.

« Nous sommes plus crédibles quand nous allons négocier chez de grands industriels qui, comme PSA, exploitent plusieurs sites sur notre territoire », plaide Jean Rottner.

Les critiques des régionalistes et de certains élus issus des conseils départementaux portent sur la question du développement économique. Frédéric Bierry (Bas-Rhin) et Brigitte Klinkert (Haut-Rhin) ont proposé la création d'une collectivité fusionnée dotée d'outils de développement économique. L'Alsace se souvient du début des années 2000, quand sa richesse surpassait celle des voisins lorrains, et quand son taux de chômage se situait à 3 points en dessous de la moyenne nationale.

Dans son rapport remis cet été au Premier ministre, le préfet de région Jean-Luc Marx n'a pas fermé la porte aux demandes spécifiques des Alsaciens.

« Nous aurons avec le Bas-Rhin et le Haut-Rhin la même attitude que dans les autres départements : le soutien économique s'applique sur mesure dans chacun des territoires », prévient Jean Rottner.

Promotion en ordre dispersé

Le Grand Est a initié une première démarche collective liée au tourisme. Pour permettre la fusion sans heurts des trois comités régionaux du tourisme, prévue en 2019, il a été permis aux comités locaux de poursuivre des stratégies de promotion engagées autour des « marques mondiales » Champagne et Alsace. D'autres territoires, comme la Moselle ou le massif forestier vosgien, travaillent sur des zones de chalandise plus locales. Résultat : la participation en mars 2018 du Grand Est à l'ITB, le salon mondial du tourisme à Berlin, a engendré un malaise chez les visiteurs : le Grand Est n'avait à vendre aucun produit unifié, chaque territoire restant en solo sous sa bannière.

La stratégie régionale de développement économique a été baptisée Be Est. Un premier pas vers le marketing territorial ? Pour démultiplier son action à l'international, la collectivité entend renforcer ses démarches proactives de recherche d'investisseurs directs étrangers. Elle tentera de ne pas répéter certaines erreurs du passé : fin 2015, Patrick Weiten, l'éphémère vice-président de la Région, était revenu sur sa promesse d'installer Terra Lorraine, un gigantesque centre d'affaires sino-européen à Illange (Moselle), avec 3.000 salariés dans l'immédiat et 30.000 emplois en 2025. Des chiffres à faire tourner la tête. Finalement, la plateforme logistique de plus de 130 hectares aménagée pour les Chinois n'accueillera que 120 salariés de l'entreprise allemande de matériaux de construction Knauf. À voir trop grand, on en perd la raison.

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Par Olivier Mirguet,
correspondant pour La Tribune dans le Grand-Est

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Grand Est : les données clés

  • Population totale : 5.548.090 habitants
  • PIB par habitant : 27.378 euros (2015)
  • Taux de chômage : 8,6% (4e trimestre 2017)
  • Présidente du conseil régional : Jean Rottner (LR)

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Commentaire 1
à écrit le 10/10/2018 à 20:35
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Le GE est rejeté par "une partie de sa population" aux alentours de 82%. Aucun élu alsacien (vraiment aucun) n'a voulu de cette fusion forcée. Source: https://france3-regions.francetvinfo.fr/grand-est/sondage-82-alsaciens-favorables-referendum-...

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