L'incroyable sous-exploitation de la richesse forestière en France

La France, troisième pays forestier d'Europe, affiche un solde de sa balance commerciale forestière négatif de 6,6 milliards d'euros. La tempête de 2009 dans le Sud-ouest a « réveillé les consciences ». En Dordogne, troisième département boisé de France, les propriétaires sont enfin sensibilisés à l'intérêt d'exploiter leur patrimoine. Mais, il en faudra bien plus pour changer la donne.
Le bois français se vend désormais en Chine et au Moyen-Orient. « De nouveaux débouchés apparaissent dans l'énergie, comme le bois en plaquettes ou en granulés. Il y a tout à faire. La filière est en train de se construire », affirme Roland De Lary, directeur du Centre régional de la propriété forestière (CRPF) en Aquitaine. © DR

En Dordogne, le premier problème est la dispersion des 400 000 hectares boisés entre 100 000 propriétaires. Beaucoup ignorent même l'emplacement de leur bien. « Dans le Périgord, on sort actuellement 500 000 mètres cubes de bois par an, alors que la forêt s'accroît chaque année d'un million de mètres cubes », déplore Roland De Lary, le directeur du Centre régional de la propriété forestière (CRPF). Pourquoi ? « Peu de propriétaires ont conscience de la valeur économique de leur forêt », explique-t-il. Il faut dire qu'à l'heure actuelle le marché du bois est en difficulté avec la crise économique, qui touche notamment de plein fouet le secteur du bâtiment, un client important. Plus globalement, en France, on récolte 60 millions de mètres cubes par an, alors que la pousse est de 90 millions de mètres cubes. Résultat, aujourd'hui, le déficit annuel de notre pays en bois atteint 6,6 milliards d'euros, essentiellement en bois de pâte à papier et d'ameublement.

De nouveaux débouchés pour la filière bois dans l'énergie

Ceci étant, ce spécialiste du secteur est convaincu que dès 2014, la filière bois sortira de la crise. D'autant, que le bois français se vend désormais en Chine et au Moyen-Orient. « De nouveaux débouchés apparaissent dans l'énergie, comme le bois en plaquettes ou en granulés. Il y a tout à faire. La filière est en train de se construire », précise Roland De Lary. Pour limiter l'ampleur de cette « sous-exploitation », en 2012, l'Aquitaine a lancé un plan pluriannuel régional de développement forestier. Objectif : multiplier la collecte par deux d'ici 2016. Afin de faire évoluer les mentalités, deux nouveaux techniciens forestiers viennent d'être embauchés en Dordogne avec pour mission de sensibiliser les propriétaires. En France, sur une surface totale de 15,3 millions d'hectares, 10,6 ha sont privés. Mais, « la tempête de 2009 a réveillé une conscience forestière dans la région », observe Roland De Lary.
Tout ceci ne pourra cependant se faire sans relancer une véritable politique forestière, à l'image de ce qu'avait fait le général de Gaulle en créant le Fonds national forestier. Jusqu'en 1998, on plantait dans l'Hexagone 120 millions de plants par an. Aujourd'hui, on n'en est qu'à 40 millions, tandis que l'Allemagne atteint les 500 millions et la Pologne le milliard. Actuellement, la filière forêt-bois regroupe 300 000 personnes au sens strict (bûcherons, scieurs, entreprises de transformation du bois), et 450 000 si l'on y ajoute les artisans et entreprises du bâtiment. En Aquitaine, elle pèse 38 000 emplois.

Un enjeu économique et environnemental

L'enjeu est aussi environnemental. A terme, le réchauffement et l'accentuation de la sécheresse estivale conduiront à une réduction des stocks de carbone dans la biomasse et les sols forestiers, estime l'Inra. Pour accroître le stockage du carbone par les forêts, il sera indispensable d'adapter les peuplements aux climats futurs, en reboisant et en accroissant l'exploitation du bois.
France Bois Forêt, association interprofessionnelle, qui regroupe propriétaires et gestionnaires forestiers publics et privés, est convaincue que l'on peut accroître de 13 millions de mètres cubes par an d'ici à 2020 (+32 % par rapport aux prélèvements actuels) la production de bois d'?uvre ou de combustible. Ce qui coûterait 500 millions d'euros par an (replantation, d'ouverture de pistes forestières, adaptation de la filière pour produire des plaquettes, par exemple).

Utiliser les quotas d'émissions de gaz à effet de serre pour replanter

Pour y parvenir, le lobby propose de créer un « fonds forestier stratégique carbone » (FFSC), abondé par le quart du produit des enchères de quotas d'émissions de gaz à effet de serre, soit 250 millions d'euros par an. Avec cette somme, France Bois Forêt promet de planter ou de régénérer 75 000 hectares par an, d'améliorer les peuplements sur 60 000 hectares par an et de créer 25 000 emplois. « Cette idée est crédible. En Aquitaine, nous avons déjà mis en place un fonds Aquitaine carbone », rappelle Roland De Lary. La forêt ne peut pas supporter une politique à court terme. Il faut quinze ans pour récolter un peuplier, de 20 à 40 ans pour un pin, 120 ans pour un chêne... Et, il y a désormais urgence.

 

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Commentaires 5
à écrit le 27/02/2013 à 13:33
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Ce qui fait du bien à la "filière bois" aujourd'hui,c'est ce que le gouvernement Chirac a mis en place pour "rentabiliser la forêt française":privatiser les forêts en vendant des parcelles à moindre prix pour attirer les masses...C'est ce qui a fai...

à écrit le 26/02/2013 à 16:58
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et encore un lobby qui veut toucher des subventions publiques financées par les autres bien entendu au nom du pseudo réchauffement climatique causé par l'activité humaine......va falloir drôlement taxer avec tous les amateurs de merveilleuse fable. ...

à écrit le 21/02/2013 à 18:06
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"D'autant, que le bois français se vend désormais en Chine et au Moyen-Orient." L'article oublie juste de préciser un "détail" (parmi d'autres approximations) : nous leur vendons des grumes qui nous reviennent sous forme transformée... Pas sûr que ç...

le 23/02/2013 à 14:15
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l'article ne va pas au fonds des choses , tout ce que l'on produit ou transforme dans la filiere bois est trop cher cela arrive de l'etranger moitie prix pour certains produits , l'essentiel est la dans cette phrase tant que l'on ne verra pas cela et...

à écrit le 21/02/2013 à 15:22
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merci de vous relire........ "on récolte 60 millions de mètres cubes par hectare et par an, alors que la pousse est de 90 millions de mètres cubes" on récolte 60 millions de m3 par an... pas par hectare et par an....

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