Innovation et biomimétisme : quand les entreprises bretonnes s'inspirent de la nature

Des entreprises étudient les ressources de la faune et de la flore pour faire avancer leurs solutions technologiques et leurs projets scientifiques. Soutenues par Bretagne Développement Innovation et la SATT Ouest Valorisation, ces initiatives au service de la santé, de l'habitat ou de l'alimentation constituent une filière balbutiante.
Hemarina a mis au point un additif né des propriétés du ver arénicole, contribuant à préserver les greffons des transplantations rénales.
Hemarina a mis au point un additif né des propriétés du ver arénicole, contribuant à préserver les greffons des transplantations rénales. (Crédits : Claude Prigent)

L'étude de la pomme de pin pour améliorer la régulation de la température et de l'humidité dans un bâtiment, les maisons du futur influencées par les termitières, la biodiversité marine au service de l'innovation... En Bretagne, l'observation de la nature porte en elle diverses avancées technologiques au service de la santé, de l'habitat du futur ou de l'alimentation. Entre le monde de la recherche et celui des entreprises, le biomimétisme croise, entre autres, la croissance bleue et l'économie circulaire et ouvre des perspectives économiques.

Franck Zal fait partie de ces pionniers, convaincu que la mer est source d'inventivité. Ce docteur en biologie marine, qui aime citer la phrase de Léonard de Vinci : « Scrute la nature, c'est là qu'est ton futur », a concentré ses travaux de recherche sur les vertus des propriétés des hémoglobines extra-cellulaires du ver arénicole, repérable aux tortillons qu'il laisse sur les plages bretonnes. Ses recherches ont débouché sur une innovation médicale bio-inspirée et développée au sein de sa société de biotechnologies basée à Morlaix, Hemarina.

Spécialisée dans la mise au point de transporteurs d'oxygène d'origine marine, Hemarina utilise les molécules de cet invertébré marin pour les substituer aux globules rouges comme transporteur d'oxygène universel (O négatif) voire comme substitut sanguin. L'additif Hemo2life contribue à une meilleure préservation des greffons pour les transplantations rénales. Cette technologie a aussi été utilisée lors de la seconde greffe totale du visage et trouve des applications dans les domaines de la cicatrisation et de la médecine d'urgence.

« Avec le biomimétisme, c'est l'étude des comportements végétaux ou animaux qui nous permet d'innover, confiait Franck Zal lors de l'événement 360 Possibles, à Rennes en novembre dernier. Et la nature possède des ressources innovantes encore inconnues des hommes. »

Basée à Roscoff, ManRos Therapeutics puise aussi ses innovations de l'océan. Cette biotech développe des molécules pour le traitement de la mucoviscidose, des maladies neuro-dégénératives et de la polykystose rénale, inspirées de celles de l'étoile de mer (la roscovitine) et de l'éponge de mer (la leucettamine). Des essais chez des patients atteints de trisomie 21 démarreront en 2020, a indiqué le Pr Laurent Meijer lors de la Sea Tech Week, à Brest en octobre.

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EN CHIFFRES

22 millions d'euros, c'est la somme totale levée par Hemarina auprès de fonds d'investissements pour financer ses recherches.

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Des projets labellisés par le Pôle Mer

Les bio-ressources marines sont aussi à l'origine de projets alimentaires labellisés par le Pôle Mer Bretagne-Atlantique. Portée par Agrival avec GlobeXplore et Olmix, la technologie VB2 visant à potentialiser, grâce à l'association argiles-algues, les actifs (sucres, lipides, protéines...) issus d'algues invasives proliférantes, a permis la mise au point d'une gamme de boissons à base d'algues (ulve, dulse, spiruline) et d'un procédé de fabrication de spaghetti d'algues (kombu, wakamé). Pour le secteur cosmétique, des perles de massage ont été réalisées à base de gélifiants naturels.

Tandis qu'à Rennes, Edixia Automation s'inspire du fonctionnement du cerveau humain pour la création de caméras bio-inspirées, le retour à la nature concerne aussi l'habitat du futur. Un prototype de maison économe et permacole, la BioClimHouse, est expérimenté dans la commune écolo de Langouët. À l'intérieur, pas de chauffage mais un système calqué sur celui des termitières qui récupère les calories de la terre pour les réinjecter dans l'habitat.

Innover et entreprendre en s'inspirant de l'intelligence du vivant, c'est d'abord respecter les écosystèmes, s'accordent à dire les spécialistes. « C'est de la bio-inspiration », rappelle Franck Zal, qui n'a pas vidé les plages bretonnes du ver arénicole. « On a compris comment ces vers fonctionnaient, et on recrée tout cela dans une ferme pour ne pas détruire la nature. »

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