Masques : la production de l’usine de Plaintel prête à être relancée

Par Pascale Paoli-Lebailly, à Rennes  |   |  758  mots
(Crédits : LEON KUEGELER)
Plaintel (22). Un projet collaboratif de relance du site est à l’étude. Le Département et la Région y sont favorables, mais pas sans garanties. Guy Hascoët est chargé de piloter l'initiative.

En 2018, l'ancienne usine de masques de protection de Plaintel en Côtes d'Armor produisait jusqu'à 20 millions d'unités par mois. Fermée il y a un an et demi par le groupe américain Honeywell puis transférée en Tunisie, elle est devenue, en pleine crise sanitaire du Covid-19, le symbole local d'un désengagement de l'Etat et d'un gâchis industriel. Humain aussi car le site costarmoricain a employé jusqu'à 300 personnes.

Alors que la pénurie de matériel médical se fait cruellement sentir, le souhait de voir une industrie des masques de protection se réimplanter en Bretagne s'exprime fortement depuis début avril. Un projet porté par l'ancien directeur Jean-Jacques Fuan avec des salariés de l'usine Honeywell (ex-Sperian) et des partenaires locaux a émergé. Des contacts ont été pris avec des investisseurs, des fournisseurs de machines et de matières premières. Tandis qu'une pétition en faveur d'une relance du site recueille sur mesopinions.com près de 40.000 signatures, sur le plan politique, la Région Bretagne et le Département des Côtes d'Armor se sont déclarées prêtes à investir dans une nouvelle usine de masques. Mais pas sans garanties. Loïg Chesnais-Girard, le président de la Région et Alain Cadec, celui des Côtes d'Armor, demandent des engagements clairs à l'Etat ou à l'Union européenne (UE) pour assurer l'avenir d'un tel site. Ils ont missionné Guy Hascoët, ancien secrétaire d'État à l'Economie solidaire du gouvernement Jospin, pour proposer une solution de redémarrage.

Vers un actionnariat incluant les citoyens ?

« Nous avions une usine qui en produisait en Bretagne, elle est malheureusement fermée depuis 2018. Après des échanges avec les élus du territoire, nous voulons confirmer notre disponibilité pour étudier tout projet de relance de cette usine de masques, qui pourrait s'avérer un outil stratégique dans l'indépendance recherchée vis-à-vis de ces produits indispensables en temps de crise sanitaire. Mais, les mêmes causes produisant les mêmes effets, il est indispensable que l'Union européenne et/ou l'État s'engagent dans des commandes stratégiques de long terme. Des contacts ont été pris ces derniers jours sur ce point », indiquent les deux élus dans un communiqué commun, estimant que le sujet des masques est, et restera encore longtemps, au cœur des enjeux de santé publique.

Les collectivités étudient avec Jean-Jacques Fuan et ses conseils les formes juridiques permettant d'associer des citoyens volontaires à l'actionnariat. Le projet est sur les rails. Guy Hascoët est chargé de le faire aboutir et surtout d'éviter de conduire les différents acteurs dans une impasse. Il travaillera en lien étroit avec les équipes régionales, départementales et locales dont Saint-Brieuc Agglo et les acteurs de l'écosystème. Le projet pourrait prendre la forme d'une Société coopérative d'intérêt collectif (SCIC), qui associerait des collectivités, des entreprises, des clients du corps médical. « Nous souhaitons tout mettre en œuvre pour fédérer les énergies sur ce projet industriel qui doit devenir le projet de toute une région et de ses habitants », fait ainsi valoir Alain Cadec.

2 millions de masques commandés, 4, 2 millions d'euros engagés

 Les collectivités admettent qu'un masque fabriqué en France sera toujours plus cher qu'un masque conçu en Asie, mais le projet fédère les énergies car la crise actuelle enseigne que le prix ne doit pas être le critère déterminant. Outre l'investissement nécessaire, la relance d'une chaîne de fabrication, détruite par l'actionnaire américain et qui n'existe plus, prendra du temps : autour de six à neuf mois.

« Une machine n'est pas opérationnelle tout de suite », fait remarquer un entrepreneur breton qui, pour sa part, attend le feu vert des autorités pour produire, maintenant, des équipements médicaux et des masques pour les soignants et la population.

A ce jour, la Région Bretagne et les quatre départements ont mobilisé plus de 4 millions d'euros contre le Covid-19 : 800.000 euros pour 700.000 flacons de gel hydroalcoolique achetés à l'entreprise McBride (Rosporden, 29), 1 million d'euros pour l'achat de 100.000 tests ultra rapides auprès de l'entreprise NG Biotech et 2,4 millions d'euros pour 2 millions de masques chirurgicaux et FFP2.

Cette dernière commande est financée à 50% par l'UE. Un premier arrivage de 500.000 unités destinées aux différents personnels de santé et médico-sociaux a été réceptionné à Rennes. Les prochaines livraisons comprendront des masques FFP2 que la Région répartira pour équiper les personnels hospitaliers.