Et si on supprimait l'Île-de-France ?

Par Jean Pierre Gonguet  |   |  691  mots
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Face à la concurrence de Londres et sa stratégie de communication mondiale, la région se cherche un autre nom de marque. « Ile de France » n'est pas compréhensible pour les investisseurs étrangers : ils ne connaissent que « Paris » et sont plus touchés par les statégies marketing de Londres, Berlin, Hambourg ou Barcelone. Réponse dans deux mois. Campagne mondiale début 2013.

Le marché n° 1100765, passé il y a quelques jours par le Conseil Régional d'Ile de France, s'intitule laconiquement : « assistance à maîtrise d'ouvrage portant sur la création d'une marque de territoire pour l'Ile de France ». Jean Paul Planchou, le vice président du Conseil régional d'Ile de France en charge du développement économique, demande  de «diagnostiquer l'identité du territoire, définir son positionnement et créer le nom de la marque ». Est-ce à dire qu'il veut supprimer le nom Ile de France ? Pas vraiment, mais ce n'est pas l'envie qui doit lui en manquer. Cela fait des années que les responsables franciliens savent que leur territoire est invendable sous le nom Ile de France. Une étude avait jadis montré que les étrangers prenaient le nom à la lettre et pensaient que ce territoire était en fait une ile que possédait la France et qu'elle se situait pour les uns au large de la Bretagne, pour les autres du côté de la Réunion ou dans les Antilles ! Pas facile d'attirer l'investisseur chinois ou dubaïote dans ces conditions. Et c'est d'autant moins facile que l'Ile de France héberge en son sein, Paris. Une ville qui a la particularité d'être la plus connue au monde. Une étude a montré que la plupart des habitants de la planète connaissent aux moins deux villes : celle ou ils habitent et Paris.

Ne l'appelez jamais plus Île-de-France

Du coup, depuis des années l'Ile de France s'arrange un peu avec la réalité. En France ses plaquettes économiques s'intitulent « Paris Île de France » (« Paris » dans un corps deux fois plus gros qu'Île de France, bien sûr). Mais en anglais, les mêmes plaquettes pour les décideurs,  c'est « Paris Region » et en allemand c'est carrément « Die region Paris ». et lorsque les investisseurs étrangers cherchent des contacts, l'Ile de France n'existe carrément plus : ils viennent voir les responsables de « Paris Region Economic Development Agency ». Et la Région a eu beau se battre contre le Grand Paris de Nicolas Sarkozy, cela fait longtemps qu'elle conseille aux investisseurs de se déplacer avec le « Greater Paris Express Network », ou de venir visiter the « Greater Paris Main Clusters ». Des industriels saoudiens en visite professionnelle il y a quelques jours ont ainsi reçu un programme d'une vingtaine de pages dans lequel le nom de l'Ile de France n'apparait jamais. De toute façon, ils lisent tous depuis des années dans les aéroports le magazine bilingue « ParisRegion » et ils ne connaissent que ce nom (et la Tour Eiffel qui, bien évidemment, le logo de ParisRegion !)



Résister au bulldozer londonien

Reste à savoir quel nom et pour quel territoire. Depuis longtemps Denis Tersen, le patron de l'Agence Régionale de Développement de l'Île de France et Vincent Gollain, en charge du marketing territorial, ont appris à se passer du nom Ile de France. Là ils sont à la recherche d'une « marque ombrelle » qui en protège d'autres. C'est vital pour la promotion de la région face à la concurrence : Londres, la grande rivale, est en train de faire, l'année des Jeux Olympiques, une campagne remarquable à l'international avec ses spots « 2012 is GREAT britain » ou « GREAT britain you're invited ». Campagne qui se rajoute à celle du Greater London. Berlin s'est lancé avec une campagne et une marque qui cartonnent (« BeBerlin »), Hambourg est en train d'émerger, Barcelone énerve le monde entier avec ses considérables budgets de promotion, ... c'est rude pour l'Ile de France.

Campagne mondiale en 2013

Le nouveau nom ?Aucune agence ne devrait faire de folies : un nom de marque ça se partage, cela doit être consensuel et compréhensible dans n'importe quelle langue. Il suffira peut être de mettre les mots « Paris », « Grand » et « Région » et de secouer pour voir ce qu'il en sort. L' important est ailleurs : avec la stratégie du Grand Paris, la rénovation des transports, l'aménagement de la zone Roissy Le Bourget, etc... des centaines de milliards vont être investis. Face à Londres, il faut communiquer, c'est le moment où jamais. La campagne mondiale démarrera début 2013. Sans Île de France.