Elle a beau en avoir vécu plusieurs coups de tabac, Catherine Millet, la maire d'Étretat avoue être ressortie « un peu chamboulée » de la salle de réalité virtuelle du laboratoire Cireve de Caen. Difficile de rester de marbre à la vue de paquets de mer déferlant à plus d'un mètre seconde dans les rues de sa ville. Fussent-ils virtuels. Comme une cinquantaine d'autres élus d'Etretat, de Thiberville et de Villers-sur-mer, elle a été invitée à assister à une projection en 3D, fruit de plusieurs mois de travaux de trois laboratoires normands (1).
« Dans ces trois villes, nous avons rejoué, de façon très réaliste, la tempête de février 1990 en ajoutant un mètre au niveau d'eau de l'époque : un événement dont les études nous disent qu'il est appelé à se produire régulièrement à partir de 2100 », explique le géologue Stéphane Costa. Émotion garantie. « Certains spectateurs étaient dans un état de stupeur ».
Convaincre ou contraindre
Objectif de ce programme de recherche ? Diffuser la connaissance scientifique via un média plus évocateur que des cartes ou des graphiques, pour convaincre les élus d'anticiper. Le but semble être atteint dans la ville chère à Maurice Leblanc. « Je pense que les conseillers municipaux, comme moi, en sont sortis persuadés qu'il faut proscrire toute construction dans la bande des cent mètres » confirme Catherine Millet. L'initiative inédite est saluée par les services de l'État.
« Plutôt que de rentrer par le prisme de la contrainte, ce genre de démonstration amène les responsables à se poser les bonnes questions. C'est de nature à faciliter l'acceptation des politiques publiques » veut croire Alexandre Herment, chef du pôle Risques à la Direction départementale des territoires et de la mer (DDTM) de Seine-Maritime. Allusion aux difficultés qu'ont les préfets à faire accepter les plans de prévention instaurés après la tempête Xynthia, qui sont régulièrement attaqués devant la justice administrative.
(1) LETG et Cireve à Caen, M2C à Rouen. Le laboratoire Cireve de Caen a rejoué la tempête de février 1990 en ajoutant un mètre au niveau d'eau.