"La mobilité est la clé d'entrée du grand débat national" (Stéphane Beaudet, région IDF)

Le conseil régional d’Île-de-France vient de voter son budget 2019, dont 1,53 milliard d'euros pour les transports et les mobilités. Au menu notamment : le renforcement d'un plan vélo, un appel à projets sur l'air des stations et un plan de renouvellement des bus et métros. Le vice-président (LR) chargé des Transports, Stéphane Beaudet, promet par ailleurs de demander un décalage du chantier du CDG Express s'il n'a pas l'assurance d'une livraison dans les délais.
César Armand
Stéphane Beaudet est maire (LR) de Courcouronnes, président de l'Association des maires d'Ile-de-France et vice-président de la région Ile-de-France chargé des Transports.

LA TRIBUNE - Les transports ne sont qu'une partie de la première question du grand débat national "Comment mieux accompagner les Français dans leur vie quotidienne pour se déplacer, se chauffer, isoler leur logement ?". Le regrettez-vous ?

STÉPHANE BEAUDET - Je ne sais pas s'il faut le regretter. Le débat est nécessaire mais en même temps si complexe à mettre en oeuvre. Les sujets sur la table sont tellement variés que, si nous voulons arriver à trouver à des solutions, il faut en limiter le champ. Je veux bien que nous ouvrions tous les débats, mais ce ne serait pas simple. Rappelez-vous que tout est parti de l'essence et de la relégation territoriale. Les questions de la désindustrialisation, de France "périphérique", donc de l'emploi, et des mobilités sont les clés d'entrée de ce grand débat national.

Lors du vote du budget régional le 17 décembre, vous avez notamment insisté sur la priorité donnée à des transports plus écologiques. Quelles sont vos pistes dans un contexte où la RATP va faire rouler un peu plus longtemps des bus diesel ?

La durée de vie moyenne d'un bus est de 14 ans, mais ces bus diesel vont rouler moins longtemps que prévu. Ne mélangeons pas tout. Nous comptons 10.000 bus en Île-de-France. Si nous avions voulu des bus propres, il aurait fallu engager la transformation de centaines de bus dès 2011. [Stéphane Beaudet est vice-président de la Région depuis décembre 2015, Ndlr]. ll faut aussi que la RATP et d'autres soient capables de transformer les dépôts. [La RATP est actuellement en train de convertir ses centres-bus vers l'électrique et le biogaz, Ndlr] Par ailleurs, la question de la vitesse commerciale n'est pas un petit sujet. Aujourd'hui, elle dégringole à 7 ou 8 km/h dans certains secteurs parisiens. On s'approche de la vitesse moyenne de la marche à pied ! La mécanique économique et d'exploitation veut en outre que, plus vous allez vite, moins vous avez besoin de bus. C'est pourquoi nous demandons à la RATP et à la ville de Paris de tout mettre en œuvre pour prioriser la circulation des bus.

Vous avez lancé aujourd'hui Véligo, un service de location de vélos électriques d'une durée minimale de 6 mois, de même que vous dédiez 21 millions d'euros au vélo dans votre budget 2019. Concrètement, quels objectifs poursuivez-vous ?

Nous ne sommes pas maîtres d'ouvrage, mais nous pouvons être des aiguilleurs, des stratèges et parfois même des boîtes à outils. Sur les 40 millions de trajets quotidiens dans notre région, 78% font moins de 5 kilomètres. Nous poussons donc toutes les agglomérations à porter une politique vélo qui couvre toute la chaîne, de la sécurité au jalonnement en passant par la location de ce Véligo avec Île-de-France Mobilités. Sous la précédente majorité, 18 millions d'euros étaient votés chaque année mais n'étaient jamais dépensés. Aujourd'hui, ils le sont. Certes, ils ont augmenté de 3.000 à 5.000 le nombre de kilomètres de liaisons douces, mais chacun sait aujourd'hui que cela n'a pas amélioré la part modale de la bicyclette. En 2018, nous avons reçu trente dossiers venant majoritairement de collectivités ; ça prend. C'est pourquoi nous avons débloqué 21,5 millions d'euros de financements qui seront réellement utilisés.

Dans le même temps, l'Etat met aussi sur la table 350 millions sur 7 ans...

C'est une bonne nouvelle dont je me félicite. Ce sujet monte enfin dans la société. Toutes les mobilités actives ne sont pas non plus des sujets neutres. Comme maire de Courcouronnes, je vois bien que les gens qui vont à la gare à pied marchent 5 à 8 minutes et j'aménage en conséquence. Demain, avec les trottinettes, pour le même temps, la distance peut être multipliée par quatre. Cela change complètement l'aménagement urbain.

Par ailleurs, Suez expérimente déjà un système de filtration des particules dans le métro. Quelle est la prochaine étape de l'appel à projets "Innovons pour l'air de nos stations" ? Cet investissement de 1 million d'euros a-t-il vocation à revenir dans les budgets successifs, ou est-ce trop tôt pour le dire ?

C'est un enjeu majeur ! Je me souviens que lors des journées de pollution, nous avons longtemps dit " prenez le métro !" Or, c'est l'un des endroits les plus pollués en Île-de-France en matière de particules fines. La pollution dans les couloirs est liée au frottement des pneus en caoutchouc sur les rails, mais elle vient également des machines au diesel qui fonctionnent la nuit avec tous les chantiers. Nous nous devons donc de travailler sur toutes ces questions.

Quelle suite, enfin, a été donnée à votre demande de suspension des travaux du CDG-Express ?

Notre délibération est très claire. Nous avons réaffirmé au titre de la région que cette liaison est essentielle pour l'attractivité économique et touristique de la Région, mais il est démontré qu'elle sera en retard. Nous préférons de même privilégier les 850.000 voyageurs du RER B. Par conséquent, si nous n'avons pas l'assurance d'une livraison dans les délais de 2024, nous demanderons un décalage du chantier.

César Armand

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Commentaires 5
à écrit le 26/12/2018 à 14:37
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Le CDG Express n'est pas fondamental pour l'attractivité de la région. Ce qui est fondamental, c'est d'améliorer la desserte et l'urbanisme des banlieues nord. Ca exige de mettre les sous et le foncier au service de cet objectif et non au service d'u...

à écrit le 23/12/2018 à 10:49
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Assez de blabla autours de mots creux, des actes.

à écrit le 22/12/2018 à 11:05
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Si la mobilité est une composante de l'accès au travail, c'est ce dernier qui est fondamental. La consultation dans un climat social où travailler, permet de retrouver de la dignité, permettra un dialogue apaisé.

à écrit le 22/12/2018 à 10:47
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Une piste à suivre: "Bâtir ou briller ?" https://www.monde-diplomatique.fr/2012/08/BASBOUS/48056 Parce que déjà il serait bon de redonner du sens à la mobilité humaine, à savoir piétonne.

à écrit le 22/12/2018 à 9:57
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Et si ils rapprochaient le logement et le travail, il est commun que le logement à Paris est inaccessible. Cela fait des dizaines d'années qu'ils poussent vers les mêmes erreurs. Désignons 50% de citoyens dans ces "clubs" très sélect que sont devenus...

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