Terra Nova, ce nordiste qui fait de l'or avec de vieilles puces

Par Genevieve Hermann, à Lille  |   |  494  mots
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Son procédé de récupération des métaux rares présents dans les cartes électroniques usagées lui vaut de décrocher des contrats jusqu'en Corée et au Japon. Une récente levée de fonds de 4 millions d'euros vont lui permettre d'augmenter encore sa production.

Créée en 2006 sur un ancien site d'Arcelor à Isbergues (62) par des anciens de Metaleurop Nord qui ne voulaient pas se résoudre à voir mourir leur savoir faire de métallurgiste, Terra Nova a conçu un procédé par pyrolyse (montée en température sous atmosphère pauvre en oxygène) capable de concentrer plus de 98 % des métaux rares (or, argent, cuivre, platine, etc) présents dans les cartes électroniques usagées. En comparaison, les traitements traditionnels à l'acide n'en récupèrent guère plus de 70 %. « Notre concentré part ensuite chez des fondeurs spécialisés dans la purification par affinage des différents métaux. Nos clients sont en Espagne, Belgique, Pologne, Corée et nous venons de signer un contrat avec Mitsubishi au Japon », indique Christian Thomas, directeur général de l'entreprise.

1 500 tonnes mensuelles d'ici à fin 2013

De 900 tonnes de concentrés de métaux rares extraits par mois en 2012, la production du métallurgiste devrait monter à 1 500 tonnes mensuelles d'ici fin 2013 dont pourront être ensuite extraits 375 tonnes de cuivre, 45 kg d'or, 900 kg d'argent, 37,5 kg de palladium ainsi que de l'étain. D'ici là, Terra Nova aura investi 2,5 millions d'euros pour monter en puissance ses équipements. Les 4 millions d'euros levés en décembre auprès de ses actionnaires d'origines vont l'y aider. Ils lui permettront également d'accroitre son BFR en conséquence. Car comme il s'écoule jusqu'à 2 mois de délais entre le moment où Terra Nova paie ses déchets de cartes électroniques et celui où il facture ses clients, les augmentations de volume font croitre d'autant ses besoins de trésorerie.

Accroissement continu du gisement des cartes électroniques usagées

De 4,5 millions d'euros en 2011, le chiffre d'affaires de cette PME de 47 personnes, dont 7 en R&D, est passé à 12 millions d'euros en 2012. Il devrait dépasser les 25 millions d'euros en 2013. Il aura fallu au deux fondateurs, Christian Thomas et Michel Trabuc, directeur du site, beaucoup d'acharnement pour mener à bien leur projet. Faute d'argent pour rapidement démarrer leur activité de production, les deux hommes ont d'abord fait vivre leur société en vendant leurs compétences en R&D. Ce qui a d'ailleurs valu à Nyrstar, le premier fournisseur mondial de zinc, de pouvoir produire de l'indium sur son site dunkerquois. C'est aujourd'hui le seul site en France à le faire. « Nous ne laissons pas tomber notre activité de R&D sur les métaux dits stratégiques mais comme notre activité de production est devenue rentable, elle devient notre priorité », précise Christian Thomas. Avec la montée du cours des métaux rares et l'accroissement continu du gisement des cartes électroniques usagées - il s'en fabrique dans le monde 2,5 millions de tonnes dont 500 000 tonnes seulement sont démantelées - Terra Nova a un bel avenir devant lui. Il lui faudra bientôt encore lever des fonds pour mener à bien un projet d'implantation au Canada. Mais il faudra alors bien plus que 4 millions d'euros.